Les chambres d’agriculture, les FDSEA et les Jeunes agriculteurs de l’Isère, de la Drôme, de Savoie-Mont-Blanc tentent de trouver une solution à la crise que connaît la filière noix.
En raison de la crise que connaît actuellement la noix, Jean-Claude Darlet, président de la Chambre d'agriculture de l'Isère, souhaite structurer la filière.
L’objectif pour lui et ses pairs drômois et savoyards, ainsi que pour les FDSEA et les Jeunes agriculteurs des départements, est de créer une filière de la noix qui puisse soutenir ses nuciculteurs lors de crises et qui puisse leur apporter des réponses et des solutions. « La situation que nous connaissons est sans précédent, mais les nuciculteurs gardent malgré tout le moral. Il faut en profiter pour structurer la filière », explique Jean-Claude Darlet.
Et d’ajouter : « Notre but serait de créer une assemblée constitutive de tous les producteurs isérois, drômois et savoyards d’ici le début du mois de septembre. Il faudrait ensuite que nous réussissions à faire de même dans le sud-ouest pour qu’un comité national de la filière noix soit créé en France. »
Par la suite, des représentants nationaux auraient pour rôle de « peser sur le ministère », mais également sur le marché local pour pouvoir faire face aux metteurs en marché. A terme, ils pourraient travailler sur de nouveaux débouchés, « comme le développement sur le marché du cerneau, peut-être que des travaux peuvent être menés avec l’industrie agroalimentaire ».
Pour le président de la chambre, la filière fruits est un modèle à suivre. C’est pourquoi des représentants du secteur fruitier accompagneront le travail autour de la noix, « pour partager leur expérience avec nous et nous permettre d’avancer ».
S’unir
« La crise que connaît actuellement la filière noix est le résultat de diverses causes », explique Sandra Riquet, cheffe de service à la Chambre d'agriculture de l'Isère. En 2018, les cours mondiaux chutent de 30 % en raison de la guerre économique entre les Etats-Unis et l’Asie, puis ces cours mondiaux exercent une forte pression sur les nuciculteurs français pour écouler les reports de stock américains et chiliens de 2021. Entre la guerre en Ukraine et l’inflation, les consommateurs n’achètent pas ce produit en priorité. Et en 2022, la récolte française a été supérieure de 31 % à celle de 2021, avec 50 000 tonnes produites, se traduisant par des stocks importants dans les structures mais aussi chez certains producteurs.
Cette situation a donné l’impulsion aux chambres d’agriculture de l’Isère, de la Drôme et de Savoie-Mont-Blanc et aux syndicalismes (FDSEA et Jeunes agriculteurs) pour travailler à la structuration de la branche dans le sud-est de la France. Dans ces trois départements, la volonté de reprendre leur destin en main émerge et « ne concerne pas que la noix de Grenoble », précise Jean-Claude Darlet.
Comptabiliser les dommages
Plusieurs réunions ont eu lieu entre les différents acteurs. Une première s’est tenue avec des représentants du sud-ouest de la France, ainsi qu’au niveau national avec la FNSEA, la FNPF et le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Une réunion a été menée à Vinay en avril avec une centaine de producteurs nucicoles pour parler de la crise de la noix. Ces derniers se sont prononcés unanimement pour la structuration de leur filière. Elle devrait alors se faire autour d’un volet commercialisation « pour se défendre face aux metteurs en marché, ce qui serait renforcé par une adhésion à la FNPF », explique Sandra Riquet, conseillère technique à la Chambre d’agriculture de l’Isère, et d’un volet sanitaire, « pour mieux s’organiser autour des demandes de phytosanitaires devant être renouvelées chaque années en raison de changements de législation et de la gestion des maladies ».
Parallèlement, une enquête a également été lancée afin que les chambres et les syndicats connaissent le stock de noix restant dans les exploitations. Les prix pratiqués par les metteurs en marché ont aussi été évoqués.
Désormais, un comité de pilotage a été constitué. Le 5 juillet, les acteurs de la noix du sud-ouest et du sud-est se donneront rendez-vous au Sénat, et une rencontre avec le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation est prévue le 19 juillet. En ce qui concerne les metteurs en marché, « nous devrions les rencontrer courant juillet pour discuter de ce qui reste dans les fermes mais aussi pour parler des prix », ajoute Jean-Claude Darlet.
Morgane Poulet
La noix sur le devant de la scène
Le neuvième symposium de la noix et de la noix de pécan a été tenu à Grenoble, du 12 au 16 juin.
Pour le neuvième symposium de la noix et de la noix de pécan, la ville de Grenoble, berceau de l’AOP noix de Grenoble, a été choisie pour accueillir des congressistes du monde entier. Du 12 au 16 juin, des scientifiques étaient invités à participer à des conférences organisées autour de multiples sujets, comme les maladies des noyers ou encore le développement des pépinières. Lors de la soirée d’accueil du 12 juin, la filière noix iséroise a été présentée par les différents représentants de cette branche.
Des difficultés
« L’AOP noix de Grenoble est la première AOP de fruits obtenue en France », a annoncé Christian Mathieu, co-président de la Senura. Aujourd’hui, 40 % de cette production est consommée directement en France.
En Isère, plus de 11 000 actifs travaillent dans la noix : « il s’agit surtout d’exploitations familiales », précise Jean-Claude Darlet, président de la Chambre d’agriculture de l’Isère. Il rappelle également que cette année, « nous vivons des moments très durs car jusqu’à présent, les choses allaient peut-être trop bien. Le consommateur français boude la noix, lui préférant d’autres produits de consommation. »
Même si la noix française reste concurrentielle, un problème demeure : des noix étrangères entrent dans le marché français sans droits de douane alors que la filière française doit en payer à l’export.
Pour Fabien Mulyk, vice-président du Département, les « menaces pesant sur les nuciculteurs » ont augmenté en raison des aléas climatiques et de la pression apportée par « des militants, donneurs de leçon, alors que la concurrence étrangère est moins respectueuse de l’environnement ».