Jeunes agriculteurs
« L’installation reste complexe »

Morgane Poulet
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Alors que les Jeunes agriculteurs de l'Isère organisent les finales régionale et départementale de labour, Terre Dauphinoise revient sur l'importance de l'installation pour le syndicat.

« L’installation reste complexe »
Jordan Desimone, co-président des Jeunes agriculteurs de l'Isère, suit de près le dossier de l'installation dans le département.

L’installation d’agriculteurs est un sujet très suivi par Jeunes agriculteurs de l’Isère, comme en témoigne Jordan Desimone, co-président de la structure. « Il est important de valoriser l’agriculture française et de redorer le métier car il y a de moins en moins d’agriculteurs dans le pays. »
 
Renouvellement des générations
 
La chute du nombre d’agriculteurs est différente selon les activités concernées. « L’installation reste complexe », constate Jordan Desimone. Cela est dû à la situation économique actuelle, qui rend les financements incertains et lourds pour les porteurs de projet. Les marchés étant en dents de scie, il est difficile de monter des projets, surtout dans le cas où ces derniers ont une certaine ampleur et que beaucoup de capitaux sont en jeu.
Monter un prévisionnel économique avec des financements et des prix relatifs en ce qui concerne les charges d’entreprise freine le montage des projets. « Les JA arrivent tout de même à installer de belles structures, même si la chute du nombre d’actifs agricoles n’est pas endiguée, mais globalement, le nombre d’installations en Isère est très satisfaisant », remarque le co-président. Preuve en est, l’année 2022 a battu des records d’installation, avec 175 porteurs de projet installés et 116 Dotations jeune agriculteur (DJA) accordées.
 
Suivi de dossiers
 
« Les JA sont bien acteurs de l’installation, du début du parcours à sa fin, explique Jordan Desimone, que ce soit pour les stages de formation obligatoires en lien avec la chambre d’agriculture ou dans les tâches administratives concernant la DJA, par exemple ». Les porteurs de projet sont représentés par le syndicat pour appuyer leur demande, comme dans la commission de la Safer.
Une nouvelle DJA a d’ailleurs vu le jour le 1er janvier 2023 avec pour objectif de diminuer la charge administrative liée aux demandes. Entièrement dématérialisée, tout se fait désormais via un portail d’aides géré par le Conseil régional et non plus par la CDOA (Commission départementale d’orientation de l’agriculture). Les grilles et modulations ont été simplifiées, car il y en avait auparavant deux fois plus. Désormais, les secteurs sont divisés en zones de montagne, de plaine ou défavorisée. Il y a des modulations pour la démarche de qualité, pour la formation et il existe aussi trois modulations concernant les montants d’investissement. La DJA a également été revalorisée en Auvergne-Rhône-Alpes, grimpant jusqu’à 56 000 euros. Il s’agit de la plus haute de France.
« C’est plus simple pour effectuer les demandes, mais aussi d’un point de vue administratif pour faire les contrôles liés à l’attribution de la DJA », ajoute Jordan Desimone. Mais les formalités ayant évolué, il est aussi demandé de fournir des études de marché, de vente directe.
 
Un métier qui a de l’avenir
 
Les JA effectuent aussi des démarches en amont des projets d’installation, comme la défense des métiers agricoles. Tout au long de l’année ont lieu des interventions dans des lycées professionnels, l’organisation d’un forum des métiers, mais aussi des événements pour le grand public, comme des comices et des foires. « Nous voulons valoriser les pratiques agricoles et montrer aux gens qu’elles ne sont pas négatives, que le métier d’agriculteur est intéressant et qu’il y a de l’avenir dans le domaine, ajoute le co-président du syndicat, notamment parce que personne ne s’arrêtera de manger, parce que la croissance de la population fait qu’il faut continuer d’entretenir les terrains pour prévenir les risques d’incendie, par exemple, et en montagne, il y aura toujours besoin de pastoralisme. »
D’autant plus qu’il y a une perte de qualité lorsque les produits sont importés de pays étrangers, « mieux vaut les produire chez soi », surtout lorsque la règlementation appliquée en France n’est pas imposée aux produits d’importation. Pour lui, la question du loup, la consommation de veaux, la qualité des produits français sont régulièrement critiquées sans réel fondement et le rôle des JA est aussi de montrer que des idées préconçues peuvent être fausses et d’expliquer ce qu’il en est réellement.
 
Une géographie adéquate
 
« Les principaux syndicats sont véritablement acteurs de l’installation, indique Jordan Desimone. Nous nous faisons critiquer par d’autres syndicats d’opposition qui ne sont pas réellement acteurs de l’installation car ils ne participent pas aux événements qui y sont liés. Et pourtant, les chiffres montrent qu’il y a beaucoup d’installations en Isère… »
Pour lui, l’avantage du département est qu’il permet une production très diversifiée, grâce à sa topographie mais également grâce à la dynamique du pouvoir d’achat du bassin grenoblois, qui représente un potentiel de clients important. « Tous les produits peuvent être vendus », ajoute-t-il. La vente directe est également valorisée dans le territoire isérois.
Les tissus économique et politique favorisent aussi l’agriculture, autant dans la région que dans le département. « Dans les Hautes-Alpes, par exemple, ce n’est pas pareil, il y a une grande disparité, tant dans les moyens politiques accordés que financiers. On ne se rend pas vraiment compte de la chance que l’on a en Isère car on baigne dedans, mais on la constate lorsque l’on compare avec les départements voisins », conclut Jordan Desimone.

Morgane Poulet
Un soutien de taille
Nicolas Dufour s'est installé en mai 2023 à Chozeau.
Portrait

Un soutien de taille

Nicolas Dufour, installé en mai 2023 à Chozeau, a bénéficié de l’aide de Jeunes agriculteurs pour appuyer son dossier.

Nicolas Dufour, membre des Jeunes agriculteurs (JA) de l’Isère, a réalisé ses premières démarches en octobre 2022 et s’est définitivement installé en mai 2023. Une installation qu’il juge rapide, malgré des étapes qui ont pris un certain temps avant d’être validées, comme l’augmentation de la surface prévisionnelle, l’analyse de la commission et l’attribution des subventions.
En Gaec avec ses parents et son épouse sur 300 hectares, dont 200 de terres labourables, il élève des charolaises et des chèvres de race alpine.

Un appui précieux

Lorsqu’un JA souhaite s’installer, « le syndicat pousse le dossier afin que les terres soient attribuées à un jeune », explique Nicolas Dufour. Pour lui, être adhérent aux JA est un avantage lors de l’installation. « Je reçois bien plus de remontées du département en termes d'actualité et de nouvelles en général depuis que j’en fais partie », déclare-t-il.

AB
Cultiver l’entraide
Damien Ogier-Denis, installé en 2022, construit un bâtiment plus moderne que l'actuel pour que ses vaches puissent passer l'hiver au chaud.
Témoignage

Cultiver l’entraide

Installé à Miribel-les-Échelles, Damien Ogier-Denis a pu compter sur le réseau de Jeunes agriculteurs Isère pour mener à bien ses projets.

Installé en Gaec avec son père depuis janvier 2022, Damien Ogier-Denis, éleveur laitier à Miribel-les-Échelles, a bénéficié du réseau des Jeunes agriculteurs (JA) pour mener à bien son installation et un projet innovant.
L’exploitation, qui comprend 35 vaches laitières et 50 hectares de prairies, avait en effet besoin d’améliorations, selon lui. « Le bâtiment d’hiver pour les vaches ne me convenait pas, je voulais en créer un plus moderne et ergonomique », explique-t-il.
 
Créer du lien
 
« Je suis entré chez les JA en 2019, explique Damien Ogier-Denis. En compagnie d’un autre agriculteur, nous avons recréé le canton de Chartreuse, abandonné il y a des années, et qui compte désormais une quinzaine d’adhérents. »
C’est en arrivant dans le syndicat qu’il explique s’être créé un réseau et en avoir développé un dans son canton, pratique pour obtenir des informations inhérentes aux projets d’installation, pour échanger, mais également pour développer l’entraide. « Aujourd’hui, nous connaissons nos voisins, et plusieurs d’entre eux sont venus m’aider dans la construction d’un nouveau bâtiment pour les vaches », ajoute-t-il.
L’ancien datait des années 1970, était limité en place et peu fonctionnel. Les travaux ayant commencé en septembre 2022, ils devraient être achevés fin octobre 2023. Il pourra accueillir 50 vaches et leurs veaux ainsi qu’une salle de traite.
Le bâtiment sera ergonomique pour les exploitants car la traite aura lieu à hauteur d’homme. Mais il le sera aussi pour les bêtes, qui seront dans une stabulation libre et non pas attachées tout l’hiver et qui pourront se déplacer pour aller à la traite.

MP