Portrait
Vent debout contre les difficultés
Kévin Zinant, secrétaire des Jeunes agriculteurs du secteur Heyrieux-La Verpillière, s’est installé à Satolas-et-Bonce et se lance seul dans la culture de 210 hectares de céréales, malgré les difficultés inhérentes au secteur.
Installé depuis décembre 2021 à l’Earl des Sorbières, à Satolas-et-Bonce, Kévin Zinant a repris les 68 hectares de Robert Ballefin, qui les lui loue, ainsi que son hangar neuf, dans le cadre d’un bail de 25 ans. Louant aussi des terres voisines, le jeune exploitant cultive seul, en tout, 210 hectares de céréales : maïs irrigué, blé, orge, colza et luzerne. Et ce malgré quelques contraintes propres au territoire.
Également secrétaire des Jeunes agriculteurs (JA) du canton d’Heyrieux-La Verpillière, il participe de près à l’organisation du concours de labour de Satolas-et-Bonce, le 10 septembre. L’occasion pour les JA de redynamiser leur secteur tout en donnant envie à de potentiels adhérents de les rejoindre. En 2019, un premier comice était organisé à Satolas-et-Bonce et un deuxième le sera en 2024. « Le concours de labour de cette année aura donc vocation à faire la passation entre les deux événements, en plus de créer une dynamique dans le territoire », explique Kévin Zinant.
Une direction à suivre
« Jean-Baptiste Millon, le président du canton, m’a contacté lorsque je me suis installé pour me proposer d’intégrer le syndicat des Jeunes agriculteurs et j’en suis devenu le secrétaire », explique Kévin Zinant. Ce dernier n’était en effet plus composé de beaucoup d’agriculteurs, la population agricole locale étant vieillissante, à l’image de celle de la France. « Aujourd’hui, nous sommes une dizaine dans le canton, mais nous ne sommes que trois à avoir moins de trente ans », ajoute-t-il.
Passé par la Chambre d’agriculture de l’Isère pour s’installer, il évoque un parcours très long, de plus d’un an, mais une transmission réussie. « Robert et moi nous connaissons depuis que je suis tout petit, nous avons la même vision des choses et cela a facilité la transmission de son exploitation », évoque-t-il. Après une année de salariat aux côtés de son cédant, Kévin Zinant a pu reprendre la ferme et poursuivre l’activité telle qu’elle était. « C’est une histoire de confiance, les cultures ont été conservées, de même que le mode de gestion », précise le céréalier.
Ses céréales sont ainsi revendues à plusieurs coopératives ou groupes, comme les maisons Cholat et Bernard. « Il faut faire en sorte d’en tirer le meilleur prix de vente possible, explique Robert Ballefin, or, actuellement, il est préférable de ne pas tout donner au même, mais de regarder avec attention ce que telle céréale nous rapporte chez l’un ou chez l’autre ».
Installé en conventionnel, le jeune agriculteur se fournit en désherbant en Bretagne, car « il est moins cher que les produits faits plus localement, explique Robert Ballefin. En Bretagne, les vendeurs se fournissent directement auprès des fabricants, il n’y a donc pas d’intermédiaire entre eux, ce qui donne des prix d’achat moins élevés pour l’agriculteur, même en comptant les frais de port ».
Faire vivre l’agriculture locale
Le principal problème qui touche l’agriculture locale est l’irrigation. « Irriguer devient presque un métier à part entière, confie le jeune agriculteur. Il faut arroser de plus en plus tôt en raison de la chaleur et du changement climatique ». Il faut ainsi être « très performant » dans ce domaine et bien surveiller le déroulement de l’irrigation. D’autant plus qu’il n’y a dans le secteur que des forages privés, ce qui complique la donne lors de restrictions.
Pour pallier cet accès parfois difficile à l’eau, d’autres types de culture pourraient être envisagés. Le lin pourrait être une solution, par exemple, mais sa culture demande un très bon terrain, or celui du secteur est assez caillouteux. Le soja, quant à lui, serait trop demandeur en eau et, qui plus est, aurait besoin d’eau à une période plus tardive que celle du maïs. Elle coïnciderait avec le moment où l'irrigation est fortement contrainte. Les haricots pourraient en revanche constituer une meilleure option, mais leur culture est encore à son ébauche dans le département. Dans tous les cas, des essais peuvent être faits, mais seulement sur une petite parcelle avec de limiter les risques financiers.
L’Earl a également tenté de produire des cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) pour un méthaniseur voisin, mais l’expérience ne s’est pas soldée comme prévu. « Nous devions au départ toucher 30 euros la tonne de vert, mais les conditions ont changé en cours de route et le prix final fixé a été de 70 euros la tonne de matière sèche, regrette le jeune exploitant. Sur 330 tonnes livrées, seules 70 nous ont été payées ».
« Dans tous les cas, quoi que nous fassions, tout dépendra des normes administratives à venir concernant l’irrigation », précise Kévin Zinant. D’autant plus qu’aujourd’hui, « il est difficile de trouver des cultures peu demandeuses en eau ainsi qu’une filière dans laquelle les organismes collecteurs ne prennent pas tout le chiffre d’affaires », concède Robert Ballefin.