Enseignement agricole
Les ambitions de Bruno Ferreira (Draaf) : renouveler les générations en agriculture et faire vivre le monde rural

Isabelle Brenguier
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Bruno Ferreira, le directeur de la Draaf, a marqué le temps de la rentrée scolaire des MFR de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, lors d’une visite organisée le 25 septembre dans l’établissement de Chatte. 

Les ambitions de Bruno Ferreira (Draaf) : renouveler les générations en agriculture et faire vivre le monde rural
Le 25 septembre, Bruno Ferreira, le directeur de la Draaf, est venu rencontrer les élèves de première et deuxième année de BTS Acse de la MFR de Chatte.

Ils ont à peine vingt ans, mais se projettent déjà totalement dans leur future vie professionnelle. C’est ce qu’a pu constater Bruno Ferreira, le directeur de la Draaf (1), le 25 septembre à la MFR (2) de Chatte, dans le cadre d’une visite de rentrée rassemblant l’administration et les responsables des MFR de l’ensemble de la Région Auvergne-Rhône-Alpes.
En rencontrant les élèves en première et deuxième année de BTS Acse (3), il a pu mesurer toute l’envie et tout l’engagement de ces jeunes qui, pour la plupart, nourrissent le projet de s’installer, dans un futur plus ou moins proche, le plus souvent au sein de la ferme familiale et en élevage. Bruno Ferreira s’est réjoui de ces projets, qui répondent au besoin majeur de renouvellement des générations en agriculture.
Car, comme il le rappelle, « en Auvergne-Rhône-Alpes, d’ici dix ans, 16 600 agriculteurs vont prendre leur retraite et un tiers d’entre eux, n’ont pas de projet de reprise ». Il évoque aussi que « dans nombre de territoires ruraux de la région, 30 % des emplois dépendent de l’agriculture. Dans nombre d’entre eux aussi, on ne peut faire que de l’élevage. Si ces chiffres varient d’un département à un autre, il reste primordial que les exploitations se renouvellent partout car elles conditionnent la vitalité des territoires ».

Système formateur

Les jeunes présents en MFR n’ont pas choisi ce réseau par hasard. Ils sont là parce qu’ils ont été séduits par l’apprentissage, par cette idée d’apprendre à l’école et en entreprise, et parce qu’ils ont apprécié les valeurs portées par ce réseau, ainsi que l’accompagnement privilégié qu’il leur prodigue.
Conscients de la technicité et de la difficulté du métier, ils estiment que pour bien l’exercer, il convient d’être bien formé. « Un bac pro CGEA (4) est trop léger pour s’installer. Pour avoir des connaissances suffisantes en matière de comptabilité et de gestion pour la conduite d’une exploitation, il faut un niveau BTS », affirme Firmin Pégoud, élève âgé de 20 ans, en deuxième année de formation.


Un point de vue que défend énergiquement Fabien Ageron, le nouveau président de la MFR de Chatte, éleveur laitier à Saint-Antoine-l’Abbaye, issu de cette même MFR et qui maintenant emploie des apprentis de l’établissement pour l’aider dans sa ferme. « Aujourd’hui, on ne peut pas installer n’importe qui dans une exploitation. Si avant, c’était celui qui ne savait pas compter qui restait à la ferme, maintenant, ce n’est plus possible. Celui qui s’installe, c’est celui qui sait compter et qui a été bien formé. L’enseignement supérieur est indispensable ».
Bruno Ferreira acquiesce à ces propos. « On oublie trop souvent qu’un exploitant agricole est un chef d’entreprise », reconnaît-il.
Evoquant également l’intérêt de l’apprentissage qu’il veut « défendre à tout prix », Fabien Ageron indique à quel point le système est formateur et à quel point il a transformé des jeunes.

Formations complémentaires

La visite des classes ayant fait l’objet d’un échange à bâtons rompus, Bruno Ferreira a aussi pu appréhender toutes les interrogations des jeunes concernant la poursuite de leurs parcours. Cela lui a permis de leur présenter leurs droits à la formation (5) ainsi que les formations obligatoires qu’ils auront à réaliser pour apprendre les nouvelles technicités et respecter l’évolution de la réglementation. Il leur énonce aussi « un nouveau projet en cours, mené au niveau régional pour offrir aux agriculteurs -jeunes et moins jeunes- de nouvelles possibilités de formation ».
Au cours de son échange avec les représentants des Maisons familiales de la région, Bruno Ferreira a mis en avant le dynamisme de l’enseignement agricole, précisant que ses effectifs sont en hausse, alors que la période connaît un creux démographique.


« Nous sommes la première région en nombre d’établissements -nous en avons 117 dont 76 MFR- et en nombre d’apprentis. Nous avons une diversité de formations complémentaires les unes des autres, qui répondent aux attentes des jeunes. Chacune a sa place. Mais pour relever l’enjeu du renouvellement des générations, nous devons aller chercher tous les publics et nous montrer inventifs pour faire évoluer l’offre de formations pour qu’elle s’adapte aux besoins des territoires. Les établissements du ministère de l’Agriculture constituent un réseau à taille humaine, fort d’une grande agilité. Cela est apprécié », souligne-t-il.  
Parmi les priorités de l’enseignement agricole de cette rentrée, la volonté de former des jeunes citoyens, figure en bonne place. Il est important qu’« ils deviennent autonomes et responsables, capable d’une pensée critique et créative. Il faut qu’ils intègrent les conseils municipaux, qu’ils fassent entendre leur voix au quotidien. Les débats ne doivent pas avoir lieu qu’entre les agriculteurs et les politiques, mais aussi entre les agriculteurs et les citoyens », ajoute-t-il.

Isabelle Brenguier

(1)   Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt

(2)   Analyse, conduite et stratégie de l'entreprise agricole

(3)   Maison familiale et rurale

(4)   Conduite et gestion de l'entreprise agricole

(5)   Tout au long de leur vie, les agriculteurs ont un droit à la formation. Il est géré par Vivea (le Fonds pour la formation des entrepreneurs du vivant). Les salariés aussi en ont un. Il est géré par Ocapiat (l’Opérateur de compétences pour la coopération agricole, l'agriculture, la pêche, l'industrie agro-alimentaire et les territoires)

« Cela prend du temps »
Les élèves en première année de BTS Acse à la MFR de Chatte ont interpellé le directeur de la Draaf, Bruno Ferreira, sur les suites des manifestations agricoles.
Dialogue

« Cela prend du temps »

Questionné par les élèves de la MFR de Chatte sur les suites données aux revendications agricoles, Bruno Ferreira, le directeur de la Draaf, indique quelques avancées et la poursuite des travaux avec la nomination du nouveau gouvernement.

Les pieds déjà dans les bottes, les élèves en première année de BTS Acse à la MFR de Chatte, ont profité de la rentrée dans les établissements agricoles du directeur de la Draaf, Bruno Ferreira, pour l’interpeller sur les suites des manifestations agricoles. Ils considèrent que depuis, « les choses n’ont pas vraiment bougé et que la détresse est toujours présente ».
En désaccord avec cette affirmation, le responsable de l’administration régionale estime que des améliorations ont été menées pour simplifier certains domaines, « notamment au niveau de règles liées à la PAC, concernant les jachères, les prairies sensibles ». Au niveau national, il affirme que « les choses avancent », mais concède que « cela prend du temps, car il faut passer par la loi. Un travail important a été mené au printemps dernier avec les OPA (1), les élus, les jeunes en établissements, pour contribuer à écrire ce que l’on voulait faire évoluer notamment par rapport à l’enjeu de renouvellement des générations. Un texte a été élaboré. Il a démarré son examen au Parlement avant l’été, mais ensuite, il y a eu la dissolution de l’Assemblée nationale. Tout a été bloqué. Les travaux n’ont pas abouti. Pour autant, dans ce texte qui contenait un volet sur les enjeux liés à la transmission, à l’installation, et à la formation, un autre sur la simplification a été ajouté suite à la crise. Avec la préfète de Région, nous avons régulièrement rencontré les OPA et nous nous sommes mis d’accord sur les chantiers prioritaires sur lesquels nous pouvions avancer sans cadre législatif, comme des expérimentations pour accélérer les dossiers de création des retenues d’eau, sur l’adaptation des zones vulnérables… L’administration ne s’est pas arrêtée à cause de la dissolution. Elle a continué à travailler. Mais il y a des décisions qui ne relèvent pas d’elle, mais du politique. C’est le cas des sujets fiscaux qui nécessitent un budget. Pour autant, maintenant qu’un gouvernement a été nommé, le Premier ministre a indiqué être d’accord pour relancer les travaux sur loi. Il faut que le débat et le travail parlementaire reprenne ».

IB

(1)   Organisations professionnelles agricoles

Les MFR, le « sur-mesure » du monde rural

En matière d’enseignement, les maisons familiales et rurales revendiquent faire « du sur-mesure », pas du « prêt-à-porter ». Elles se déclarent prêtes à accueillir tous les jeunes intéressés par leurs formations, qu’ils soient issus du milieu agricole ou pas.
Cette rentrée, les 76 établissements (1) ont ouvert leurs portes à 7 000 jeunes, dont 2 500 en 4e et en 3e.  Les MFR disposent de nombreuses formations en agriculture mais pas seulement. C’est à l’ensemble du monde rural qu’elles adressent. « Elles maillent le territoire. Elles répondent à ses enjeux », avance Pierre Millet, directeur du réseau des MFR d'Auvergne-Rhône-Alpes.
Elles ont profité de la rencontre avec Bruno Ferreira, le directeur de la Draaf, pour présenter le document stratégique qu’elles viennent d’élaborer et qui vise à « accroître le nombre de jeunes formés, accompagner les projets d’orientation, répondre aux besoins en emploi, favoriser la transition écologique et renforcer l’enseignement supérieur ».
Elles veulent s’engager dans ces axes de travail pour répondre aux enjeux actuels et futurs de la formation et de l’emploi agricole. Grâce à une enquête réalisée auprès de 500 jeunes sortis de leurs formations, les responsables des MFR ont constaté que plus de 75% d’entre eux restaient dans le milieu agricole en tant qu’exploitant, salarié ou dans un métier affilié. Quant aux autres 25 %, ils restent en milieu rural, à exercer des métiers connexes. « C’est une vraie satisfaction pour nous », insiste Pierre Millet.

IB

(1) 55 sont contractualisées avec le ministère de l’Agriculture