Interview
« Je suis combatif »

La  FNSEA et les JA ont lancé mercredi 4 décembre à Montignac-Lascaux (Dordogne) leur campagne pour les élections aux chambres d'agriculture. Quels sont les enjeux de ce scrutin ? Réponse avec Arnaud Rousseau, président de la FNSEA

« Je suis combatif »
Arnaud Rousseau, président de la FNSEA était en meeting à Montignac-Lascaux pour le lancement de la campagne des élections aux Chambres d'agriculture ©Maxime Shilt

Dans quel état d'esprit êtes-vous au moment d'aborder ce temps fort syndical ? 

Arnaud Rousseau : « Je suis combatif car cela fait un an que nous sommes sur le terrain pour obtenir un certain nombre d'avancées et que des promesses nous ont été faites, mais qu'en raison de la motion de censure, nous allons encore une fois repartir de zéro. Je suis combatif parce que lorsque l'on voit l'été que les agriculteurs ont passé en France que ce soit en production viticole, en grandes cultures ou sur le sanitaire en élevage, nous voyons bien que les attentes sont fortes de la part de la profession. Je pense que les agriculteurs attendent des responsables professionnels nationaux qu'ils soient à la manœuvre et combatifs pour essayer d'apporter des solutions. Toutefois, nous ne pouvons pas tout faire, nous avons besoin d'un gouvernement et nous avons besoin de décisions et au moment où l'on se parle, elles ne viennent pas. »

Vous lancez votre campagne en Dordogne, un département encerclé par la Coordination rurale qui tient les chambres d'agriculture du Lot-et-Garonne de la Haute-Vienne et de la Vienne. Médiatiquement, la mobilisation des bonnets jaunes a marqué les esprits l'hiver dernier. Comment faire pour que le Périgord ne bascule pas à son tour ?

A.R. : « D'abord, je voudrais rappeler que 95 % des départements ont fait confiance à la FNSEA et aux JA lors des dernières élections et ce, depuis des années. Après, il y a des questions qui se font jour dans ce département par rapport à l'avenir agricole, par rapport à la typicité de ce département et à la pérennité des exploitations de polycultures élevages ou vis à vis des productions spécialisées. Je pense évidemment à la noix qui traverse des difficultés. Il y a donc des agriculteurs qui ont envie de tout envoyer aux pelotes. Je le comprends, mais je dis et je le redis : la colère, ce n'est pas l'avenir pour l'agriculture. Construire un avenir, c'est essayer de trouver des solutions, c'est ce qui nous anime nous à la FNSEA. Nous proposons des solutions autour du goût d'entreprendre, de la fierté d'être agriculteur avec les sujets de dignité, de simplification que l'on porte depuis des mois. Nous le faisons avec des équipes d'élus et de collaborateurs implantées dans tout le pays. Ce qui fait la force de l'Europe agricole, c'est d'être si différente y compris ici en Dordogne. »

C'est ce message que vous allez aussi délivrer aux indécis qui hésitent à vous rejoindre dans cette campagne ?

A.R.: « Je crois qu'il faut d'abord parler avec tout le monde avec clarté, présenter le projet, les convictions et notre bilan. Je rappelle aussi que ces élections sont des élections départementales et qu'elles doivent coller à la réalité du projet de chaque département. Derrière, il ne faudrait pas que les élus nationaux fassent oublier le travail d'agriculteurs, hommes et femmes, engagés depuis des années au service des chambres d'agriculture et des projets de territoires différents d'un département à l'autre. Concentrons-nous sur ce qu'est la réalité, sur ce que l'on veut proposer aux agriculteurs des départements pour les six prochaines années. Faisons en sorte que l'on y trouve les bons relais. »

Justement comment la campagne va-t-elle se décliner dans les territoires durant cette campagne ?

A.R.: « D'abord avec le réseau d'élus engagés dans les toutes les communes car il y a certes, le temps de la campagne, mais il va y avoir le temps du travail. Je suis très admiratif de ceux qui acceptent de monter un projet et de faire du collectif. On parle beaucoup du collège chef d'exploitation, mais dans les campagnes aux chambres d'agriculture il y a d'autres collèges comme les anciens et celui de la coopération. Il y a donc beaucoup de gens engagés derrière un projet et c'est de cela dont on souhaite parler. »

Quels sont les sujets majeurs de la campagne. Sur quels thèmes peut-elle se jouer ?

A.R. : « Je crois que cette campagne va se jouer sur la construction de l'avenir agricole. À un moment où la situation est très difficile sur le plan des revenus, à un moment où les gens s'interrogent sur les modèles de production, sur l'Europe passoire, j'ai le sentiment que la campagne va se gagner sur le projet et le travail réalisé. Il y a des syndicats qui proposent le chaos, d'affamer et de tout casser, ce n'est pas notre projet. Nous avons par exemple dit que nous étions pro-Europe car nous considérons que dans la bataille à laquelle se livre le continent Sud-Américain, elle peut être une protection si nous avons une politique adéquate. C'est pour cela que la FNSEA parle de souveraineté alimentaire, de réciprocité et de traçabilité et que nous sommes hostiles au Mercosur. Face à l'Ukraine qui se bat pour sa liberté, nous voulons aussi une forme de réciprocité. Une Europe qui protège et qui porte un projet qui n'est pas décroissant comme pouvait l'être le Green Deal, mais un projet qui permet de produire durablement l'alimentation. Il faut travailler là où se prennent les décisions. »

Quelle est votre réaction face à la censure votée contre le budget ?

A.R. : « Pour la deuxième fois en moins de six mois nous n'avons plus d'interlocuteur. Conclusions : les promesses faites ne tiennent pas, les promesses du projet de loi de finance de la sécurité sociale ne tiennent pas non plus. Je pense au sujet des retraites agricoles qui sont les plus faibles de toutes les classes socioprofessionnelles. C'est un vrai scandale. Cela nous questionne. Mais notre sujet n'est pas politicien. Nous avions des promesses à 400 000 millions d'euros. Il y a le sentiment que l'on nous méprise et ce n'est pas tolérable. »

Maxime Shilt