Transmission
 « Il faut soutenir les jeunes » 

Dans le Trièves, à Roissard, Pascal Trémeau a transmis sa ferme à deux jeunes exploitants : un couple de maraîchers et une éleveuse.

 « Il faut soutenir les jeunes » 
Pascal et Françoise Trémeau tirent une certaine fierté d’avoir permis l’installation de deux jeunes sur leur exploitation à Roissard.

« Lorsque nous avons pensé à notre cessation d’activité, nous nous sommes dit que nous pourrions peut-être installer des jeunes plutôt que ça parte à l’agrandissement. Il faut soutenir les jeunes. »
Pascal Trémeau a créé son exploitation agricole à Roissard dans le Trièves en 1984. Cette ferme laitière d’une trentaine de vaches de race montbéliarde et prim’hosltein, occupait une SAU de 60 ha.
La production de lait a cessé il y a une dizaine d’années, remplacée par un élevage allaitant.   
Son épouse, Françoise Trémeau, désormais retraitée, a longtemps été conjointe collaboratrice. A l’heure de transmettre leur exploitation, il était indispensable pour ces agriculteurs « qu’il y ait de la vie qui reste sur la ferme ».  

En faisant du vélo 

Aucun de leurs trois enfants n’ayant souhaité reprendre l’exploitation et conscients que le modèle laitier n’était plus viable avec les installations actuelles, ils ont d’abord pensé qu’il n’y aurait pas de suite.
Avec un petit espoir tout de même en inscrivant l’exploitation au RDI, avec une offre suffisamment ouverte pour qu’un ou plusieurs porteurs de projets s’y projette(nt).   

« Puis Françoise a rencontré Matthieu, qui en faisant du vélo, cherchait des terres pour s’installer en maraîchage. Mais nous, on ne voulait pas des maraîchers qui vivent du RSA ! », déclarent les agriculteurs cédants.
« Matthieu m’a expliqué son projet, reprend Françoise Trémeau, j’en ai parlé à mon époux pendant deux heures. »
A peine l’affaire conclue, ils reçoivent un coup de fil de Marie Scherrer, à la recherche de parcelles pour installer son élevage de porcs en raison de la dissolution de son Gaec. 
Sur une SAU de 27 hectares dont le couple est propriétaire, la transmission de l’exploitation se concrétise donc en trois hectares dédiés au maraîchage et 24 ha pour l’élevage.
« Nous n’avons même pas cherché à trouver un repreneur, reconnaissent les cédants. Mais il faut être ouvert. Nous n’aurions jamais pensé aux cochons ! »  

Avoir des convictions 

Alors qu’ils finalisent leur transmission, les retraités retracent les difficultés de leur parcours d’installation, qu’ils voient se reproduire avec les jeunes aujourd’hui.
« Cela n’a pas changé. Quand on a un projet, il faut avoir des convictions car le voisinage porte toujours un œil critique. Cela soulève la question du foncier, des locations ou de l’agrandissement. Et les difficultés sont d’autant plus grandes pour des inconnus. »
Mais les agriculteurs sont « fiers d’installer deux couples sur une exploitation qui n’existait pas il y a 35 ans. » 
Pascal Trémeau sait qu’il ne pourra pas décrocher si facilement, surtout des animaux. Aussi, il fait encore des heures au service de remplacement.
Il a aussi donné un coup de main à l’éleveuse, notamment pour construire les parcs afin d’accueillir 40 truies en élevage bio de plein air.  

Un terrain en urgence 

« J’ai essuyé beaucoup de fins de non-recevoir, puis j’ai rencontré Françoise », raconte à son tour Matthieu Lombard, le maraîcher à qui les Trémeau louent trois hectares.
Avec sa compagne Sonia Catala, ils souhaitaient s’installer dans le Trièves sur des parcelles « avec moins de 5% de pente, ce qui faisait rire tout le monde ».
Lui est producteur de légumes, elle de plants de potager et horticoles. Ils ont pendant un temps été associés dans une ferme de Chartreuse avant de mener leur propre projet.
« Il nous fallait trouver un terrain en urgence », souligne le maraîcher. Car Sonia Catala avait conservé ses plants et son précieux emplacement à la foire aux plants d’Aiguebelette.
« Quand on cherche du terrain, on ne sait pas trop où prospecter, lance Matthieu Lombard. Le meilleur moyen, c’est encore la bistrologie ! » 

En dépit de la pression foncière dans le secteur du Trièves, les deux maraîchers, grâce à la rencontre avec Françoise Trémeau, ont bénéficié d’une installation rapide, bouclée dans le courant de l’année 2020. Un coup de chance.
« Il ne faut pas se mentir : il faut que le cédant et le repreneur s’entendent un minimum sur un projet et que le repreneur présente un projet cohérent, analyse Matthieu Lombard. Mais ce qui a facilité les choses, c’est que nous n’avons pas les mêmes productions. »  

Sécuriser l’exploitation 

Les maraîchers ne voulaient pas d’un bail classique « au risque de se faire mettre à la porte » et souhaitaient un bail de carrière, « qui permet de sécuriser l’exploitation et de rassurer. C’est un gage de sérieux, le signe qu’on ne va pas partir au bout de deux ans. D’autant que nous avons pour projet de construire un bâtiment afin d’améliorer notre confort de travail. »
Les nouveaux exploitants ont surtout investi 50 000 euros dans l’achat de 800 mètres de serres, d’un camion et la création d’un forage. Matthieu Lombard a bénéficié de 37 400 euros de DJA. La prochaine étape sera l’ajout d’un tunnel de 600 mètres, la plantation d’un verger et l’élevage de poules pondeuses.  

La production maraîchère, qui compte déjà une trentaine de légumes, est surtout commercialisée via la plateforme cagette.net ; une aubaine en cette année de confinement. « Nous faisons une tournée de paniers locaux, de Roissard à Gresse-en-Vercors et le marché du soir à la ferme. » Une partie de la production est aussi livrée aux magasins spécialisés à Grenoble. 
Quant aux plants, Sonia Catala en compte plus de 500 variétés qu’elle commercialise sur des marchés régionaux dédiés ou des marchés de plein vent.
Son activité est en plein (re)développement après une pause bébé. Car le projet d’entreprise de ces producteurs est aussi un projet de vie.
« On a mis le paquet dès la première année », reprend Matthieu Lombard. Le sérieux des maraîchers a été un gage d’intégration dans le secteur.  

Isabelle Doucet 

 

 

 

Les maraîchers de Roissard

Les maraîchers de Roissard
C’est au hasard d’une rencontre que Sonia et Matthieu Lombard ont trouvé le terrain tant recherché pour installer leur exploitation maraîchère.

La transmission et l’installation en Isère 

Chiffres clés de la chambre d’agriculture :
- 25 stages tests mis en place en 2020
- 38 nouvelles offres RDI inscrites en 2019 (une trentaine par an)
- 150 à 200 contacts de cédants par an.  
- En 2019 : 200 contacts au Point accueil transmission, 100 RDV dont plus de la moitié pour des projets de transmission Hors cadre familial. 
- 393 candidats porteurs de projets inscrits au RDI en décembre 2020.