Maraîchage
Une ferme à l’épreuve des tests

Morgane Poulet
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Lors de la signature du deuxième Plan régional de la filière maraîchage, le 27 mai, Laurent Naselli a ouvert les portes de son exploitation dans laquelle il réalise de nombreux tests.

Une ferme à l’épreuve des tests
Laurent Naselli, Aude Hardy et Nadège Koch sont exploitants aux Jardins du Fontanil.

Quatrième génération de maraîchers implantés au Fontanil-Cornillon, aux Jardins du Fontanil, Laurent Naselli mène différents tests dans son exploitation pour améliorer ses méthodes en continu. Son objectif : faire l’agriculture la plus saine possible tout en se dégageant un revenu.
 
Une base familiale
 
L’histoire de la ferme est familiale. L’arrière-grand-père de Laurent Naselli a commencé la commercialisation des produits en vente directe. Son grand-père s’est plutôt penché sur la vente en gros. Son père, quant à lui, a développé le commerce avec les grandes surfaces dès la fin des années 1980, « ce qui lui a permis de vivre de son travail et de construire l’exploitation telle qu’elle est aujourd’hui », précise Laurent Naselli. A partir des années 2000, néanmoins, la situation est devenue plus compliquée au regard des prix, qui commençaient à diminuer pour les exploitants. « Or, il tirait 50 % du chiffre d’affaires des salades, 20 % des carottes et 20 % des blettes et ces produits n’étaient plus assez rémunérés », ajoute le maraîcher. Le cap a tout de même pu être maintenu jusqu’en 2016.
Lors de sa reprise de l’exploitation en 2015, Laurent Naselli fait le choix de la convertir en bio. « Ça n’a tout de même pas constitué un grand virage, dans le sens où mon père faisait déjà en sorte que le sol soit en bonne santé : nous sommes d’ailleurs en non-labour depuis une trentaine d’années. » Et le sol, en effet, est composé de limon hydromorphe et est donc très fragile « et ne doit pas être brutalisé, précise l’exploitant. Mon père était très porté par la technique et nous avons fait en sorte que la terre soit saine ».
Aujourd’hui, l’exploitation comprend 5,5 ha de plein champ, 1,5 ha de serres et trois associés : Laurent Naselli, Nadège Koch et Aude Hardy.
 
Compter sur les plantes
 
Depuis quatre ans, ses associées et lui mettent l’accent sur les engrais verts, et notamment sur un mélange seigle-vesce pour drainer le sol. A terme, le maraîcher espère qu’il ne sera plus nécessaire de l’émotter.
Et pour la première fois, au lieu de mettre des bâches en plastique dans ses allées, il a testé le raygrass et le trèfle pour « faire du vert » et de la photosynthèse. Dans d’autres allées, du seigle a été planté pour aider l’exploitation à lutter contre les pucerons. Dans les serres, où le seigle a été semé, le système fonctionne plutôt bien : « Les pucerons vont dedans plutôt que dans les cultures », remarque Laurent Naselli.
Cette année, les associés ont également fait le choix de placer des bâches d’ensilage avant de semer certaines cultures pour occulter la lumière et ainsi détruire les adventices. Il s’agit de couvrir une première fois le sol, puis de retirer la bâche pour que les adventices germent. Il faut ensuite les recouvrir pendant une quinzaine de jours et il est ensuite possible de semer. « Cette méthode fonctionne bien pour la betterave car elle se développe rapidement. Elle marche aussi avec le navet et nous prévoyons de l’essayer pour les semis d’épinards sous serre », explique Laurent Naselli.
 
Anticiper
 
Ayant du mal à trouver de la matière organique, les associés ont décidé de créer leur propre compost en récupérant des copeaux de bois et en compostant leurs restes de légumes.
Les Jardins du Fontanil sont irrigués depuis la nappe de l’Isère, mais « je crains que nous ayons des problèmes dans le futur si le niveau de l’Isère est divisé par deux d’ici 30 ans, comme on peut parfois l’entendre », se questionne Laurent Naselli. C’est pourquoi, pour s’adapter au changement climatique, les associés utilisent du plastique biodégradable car il garde l’eau.

Morgane Poulet
Le Plan régional de maraîchage reconduit
La deuxième Plan régional de la filière maraîchage a été signé au Fontanil-Cornillon le 27 mai.
Filière

Le Plan régional de maraîchage reconduit

Le deuxième Plan régional de la filière maraîchage a été signé au Fontanil-Cornillon le 27 mai et a vocation à accompagner les maraîchers à répondre aux enjeux de leur filière.

« La filière légumes bouge et installe beaucoup, a annoncé Jean-Claude Darlet lors de la signature de la reconduction du Plan régional de la filière maraîchage, le 27 mai au Fontanil-Cornillon. On retrouve des exploitations plus ou moins grandes, de moins d’un hectare à plus de 100 hectares avec différentes destinations de commerce ». Et pour chacune de ces exploitations, le Plan doit pouvoir répondre aux grands enjeux auxquels la filière est confrontée.
 
Quatre axes
 
Fabrice Pannekoucke, vice-président à l’agriculture de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, explique que le Plan régional de la filière maraîchage doit permettre de renforcer les groupements et accompagner les producteurs. « Il faut apporter un conseil technique aux exploitants », précise-t-il.
Mais il est aussi question de communiquer au sujet de leurs pratiques, les maraîchers faisant de plus en plus l’objet de mécontentements vis-à-vis du voisinage et des élus (bruit, odeurs, traitements...). « Il faut que le Plan soit à l’origine d’une meilleure connaissance du travail et qu’il aide les agriculteurs à expliquer aux riverains ce qu’ils font, comment et pourquoi », ajoute-t-il.
« L’attractivité des exploitations maraîchères, au regard du recrutement de salariés, doit être mise en avant », explique le vice-président. Il est en effet nécessaire pour les producteurs de réussir à trouver de la main-d’œuvre qualifiée, mais aussi de la conserver.
Enfin, le changement climatique concourt à la transition dans les exploitations et le Plan de filière maraîchage doit accompagner cela. La gestion de l’eau est particulièrement concernée. « Les maraîchers ont besoin de systèmes d’irrigation adéquats et de matériel permettant d’économiser l’eau. »
Pour « accompagner l’avenir de l’agriculture et l’aider à s’adapter aux besoins sociétaux et aux contraintes environnementales », résume Jean-Claude Darlet, 200 000 euros par an pendant quatre ans sont alloués au Plan, soit 800 000 euros en tout.

MP

Le maraîchage en Aura en chiffres

-       1 500 exploitations
-       3e région productrice de légumes
-       16 200 hectares de production, dont 20 % en agriculture biologique
-       2 Siqo : IGP ail de la Drôme et IGP lentille verte du Puy
 
Les produits les plus cultivés en Aura :
 
-       Lentilles, 4 185 ha
-       Laitue, 1 100 ha
-       Poireau, 570 ha
-       Ail, 450 ha
-       Tomate, 445 ha

MP
Fabrice Pannekoucke, au premier plan à droite, a visité les Jardins du Fontanil avant de signer le deuxième Plan régional de la filière maraîchage.
Laurent Naselli et ses associés souhaitent développer les engrais verts dans l'exploitation.