ÉVÉNEMENT
Guerre en Ukraine et souveraineté alimentaire au menu du Salon de l’agriculture

Du 26 février au 6 mars, la 58e édition du Salon international de l’agriculture a réuni plus de 500 000 visiteurs à Paris. Pendant neuf jours, la guerre en Ukraine est restée dans toutes les têtes. Ce contexte tendu, combiné à celui de la prochaine élection présidentielle, a donné une coloration particulière à ce Salon. Surtout, il a rendu d’autant plus nécessaire la mise en avant de la souveraineté alimentaire et le soutien au modèle agricole français.

Guerre en Ukraine et souveraineté alimentaire au menu du Salon de l’agriculture
Neige, vache abondance de 4 ans, venue du Grand Bornand (Haute-Savoie), était l'égérie de ce 58e Salon de l'agriculture. ©C. Pietri

Pour une édition des retrouvailles après une édition 2021 annulée pour cause de rebond de la pandémie de Covid-19, les organisateurs avaient espéré une ambiance plus détendue et plus joviale. La guerre entre la Russie et l’Ukraine, lancée aux portes de l’Union européenne deux jours avant l’ouverture du Salon de l’agriculture, en a décidé autrement. Si le président de la République, Emmanuel Macron, est venu pour la traditionnelle inauguration le samedi 26 février, cela s’est fait en un temps record. Arrivé vers 7 h 15 porte de Versailles, dans le 15e arrondissement de Paris, le chef de l’État est reparti à peine deux heures plus tard après avoir coupé officiellement le ruban tricolore aux côtés de la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, et du président du Ceneca (l’organisateur du Salon, ndlr), Jean-Luc Poulain. S’adressant aux nombreuses personnalités du monde agricole qui l’accompagnaient, le président de la République a placé cette 58e édition sous le signe de la souveraineté agricole et alimentaire.

« Plan de résilience »

Le chef de l’État a insisté sur des marqueurs forts tels que « la juste rémunération du travail ». Évoquant les négociations commerciales, il a indiqué que les contrôles ont été multipliés par quatre. « Avec le gouvernement, nous faisons pression sur la transformation et la grande distribution. Jusqu’à la dernière minute, nous ne lâcherons rien », a-t-il expliqué. « Le marché ne doit pas être le Far West », a-t-il martelé, expliquant être soucieux de « redonner de la valeur à l’alimentation ». Le président Macron a aussi évoqué la transition agroécologique et climatique que le monde agricole « mène de manière silencieuse » en faisant sa troisième révolution : numérique, robotique et génétique. Remerciant « très sincèrement » les agriculteurs et les filières d’avoir tenu depuis deux ans « pour nourrir notre nation », mais aussi d’avoir su faire face aux différentes crises (évènements climatiques, épizooties…), Emmanuel Macron a assuré que « ce que nous sommes en train de vivre (à propos de la guerre en Ukraine, ndlr) ne sera pas sans conséquences sur le monde agricole et les filières qui sont les vôtres ». Le président de la République a ainsi évoqué l'augmentation les coûts de l'énergie et de l'alimentation du bétail remettant en cause la capacité des agriculteurs à se fournir. Cette guerre « qui durera » et à laquelle « il faut nous préparer » ne sera pas non plus sans impact sur nos exportations, a-t-il ajouté. Pour préserver cette souveraineté alimentaire, le chef de l’État souhaite initier « un plan de résilience, d'abord pour sécuriser nos filières et nos intrants, pour ensuite essayer au maximum de bâtir des boucliers en termes de coûts aux niveaux national et européen ». Et de conclure, avant de passer la main à son Premier ministre, Jean Castex, et au ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie : « Je suis attaché à ce que vous représentez, à l’agriculture, à son sol, ses productions et ses valeurs. Nous en aurons besoin ».

La diversité de l’agriculture représentée

Guerre en Ukraine oblige, le président de la République n’a donc pas eu l’occasion de battre son propre record de 14 heures de présence en 2019. Un contexte particulier qui n’a pas empêché ce 58e Salon de battre son plein. Dans le hall 1, celui des filières d’élevage bovin, ovin, porcin et caprin – l’aviculture ayant été écartée en raison de la recrudescence de grippe aviaire – tous les yeux étaient braqués sur Neige, cette vache abondance de 4 ans venue du Grand-Bornand (Haute-Savoie), choisie pour être l’égérie de ce Salon. En cette année d’élection présidentielle, l’enclos de Neige a représenté un passage obligé pour de nombreuses personnalités politiques. Le hall 2 était de son côté dévolu en majorité aux cultures et filières végétales. Avec sa tour Eiffel de plusieurs mètres de haut composée de fruits, Interfel, l’interprofession de la filière fruits et légumes, a attiré comme chaque année de nombreux visiteurs. Mais au petit jeu du comptage, c’est sans aucun doute le hall 3, celui des produits et saveurs de France, qui l’a emporté. Parmi l’ensemble des productions régionales représentées, les régions Bourgogne-Franche-Comté mais surtout Auvergne-Rhône-Alpes ont affiché un nombre record de stands. Dans le hall 4, une ambiance plus « officielle » régnait avec la présence d’organisations comme FranceAgriMer ou encore la FNSEA. De nombreuses conférences ont été proposées, que ce soit par l’Agence Bio ou l’organisme de formation Vivea. Dans les quatre autres halls, les visiteurs ont notamment pu retrouver des produits d’outre-mer et de l’élevage équin. Du 26 février au 1er mars s’est également déroulé dans l’immense hall 7 le Concours général agricole des produits et vins. À voir ces allées noires de monde et ces sourires sur les visages des visiteurs comme des professionnels, nul doute que cette 58e édition, celle des retrouvailles, restera dans toutes les mémoires.

Pierre Garcia et Christophe Soulard