La Caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA) qui accompagne au quotidien et au plus près l’ensemble de ses ressortissants agricoles constitue un bon baromètre de la santé du monde agricole. L’année 2024 ne restera pas dans les annales comme un bon cru.
Jean-François Fruttero, le président de la CCMSA, n’a pas caché son inquiétude sur le recouvrement des cotisations sociales pour cette année, lors d’une conférence de presse le 1er octobre. Sans donner d’estimation, il constate d’ores et déjà que le bilan de l’année écoulée ne sera pas très bon, en raison notamment des mauvais chiffres de l’agriculture française plombée par des mauvaises récoltes en céréales, une crise viticole sérieuse, les épizooties à répétition (FCO, MHE) dans les élevages… « Nous constatons une détérioration des niveaux de cotisations sur toutes les filières », a ajouté Anne-Laure Torrésin, directrice générale de la CCMSA. Un indice ne trompe pas : celui du fonds d’action sanitaire et social qui est activé pour alléger les cotisations des ressortissants les plus en difficulté. L’enveloppe de 15 millions d’euros allouée pour le premier semestre par le gouvernement dans le cadre du contrat d’objectif et de gestion a déjà été dépensée. Quant à celle du second semestre, d’un montant équivalent, son plafond est déjà explosé. « Nous avons besoin de 90 millions d’euros (M€) », a indiqué Jean-François Fruttero, soit 75 M€ supplémentaires. « Nous allons relancer Annie Genevard lors d’une prochaine rencontre pour abonder ce fonds », a-t-il précisé. Parallèlement, l’organisme social constate une augmentation des demandes d’échéanciers de paiement et d’étalement de la dette. « Des indices qui se dégradent », a insisté Anne-Laure Torrésin comme pour mieux souligner la détresse dans laquelle se trouvent certaines exploitations.
« Outil de solutions »
C’est en partie ce qui explique, qu’entre le premier semestre 2023 et celui 2024, le nombre de sollicitations du dispositif Agri Écoute, qui lutte contre le mal-être en agriculture, a augmenté de 20 %. La CCMSA et ses 35 caisses locales se mobilisent pour permettre aux chefs d’exploitation et à leurs ayants droit de passer le cap difficile. Le réseau « Sentinelle » compte désormais plus de 6 000 correspondants qui permettent d’activer des dispositifs concrets comme l’aide au répit en cas d’épuisement professionnel, le financement du service de remplacement ou encore l’aide au répit administratif. « Il existe un réel besoin dans nos territoires. Certains baissent les bras et n’ouvrent même plus leur courrier. Ils ont besoin d’être remis en selle, ne serait-ce que pour rouvrir leurs droits aux prestations sociales », a concédé le président de la CCMSA. « Car la population agricole ne vient pas réclamer automatiquement ses droits », a renchéri Anne-Laure Torrésin. « Notre ambition est de positionner la MSA comme un outil, comme une solution, d’être une MSA humaine et humaniste », a ajouté Jean-François Fruttero qui compte sur le gouvernement pour inscrire la réforme des retraites agricoles calculées sur les vingt-cinq meilleures années dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2025). La CCMSA veut aussi profiter de l’examen de ce projet de loi pour élargir le cercle de ses cotisations et intégrer les nouvelles activités comme « la méthanisation, l’agrivoltaïsme, l’accueil social, l’accueil pédagogique », a précisé la directrice générale. Pour la CCMSA, la volonté est que la réforme soit appliquée le 1er janvier 2026.
Christophe Soulard