Foncier
Le statut du fermage, un contrat fondamental
Co-président de la section départementale des fermiers et métayers depuis plus de dix ans, Jean-Pierre Michallat vient d’être élu au conseil d’administration de la section nationale. Céréalier à Moirans, il est aussi membre de la commission consultative des baux ruraux.
Pourquoi vous intéressez-vous à cette question du fermage ?
« Je considère que c’est une question primordiale, car elle touche au sujet du foncier qui est la base du métier d’agriculteur. Ce métier, on ne peut l’exercer si on n’a pas accès à du foncier. Quand on sait qu’en Isère, 80 % de la surface agricole utile n’appartient pas aux exploitants, le contrat du fermage trouve toute son importance. Grâce à lui, on assure la pérennité des exploitations. Si dès le départ, tout est mis par écrit, on part sur de bonnes bases. Sans lui, sans l’établissement de relations bien établies, on reste dans la précarité. C’est pourquoi, sa défense me semble aussi indispensable. Mais cela implique une veille permanente sur le sujet. Je m’intéresse aussi à cette question parce qu’elle nous place dans une relation contractuelle, dans une relation humaine, et qu’elle nécessite un engagement de confiance entre deux personnes, une qui détient du foncier et une autre qui le met en production ».
Quelle position défendez-vous ?
« Je suis pour le maintien de ce statut. Dans la mesure du possible, je suis favorable à l’établissement d’un bail de neuf ans avec renouvellement tacite, car j’estime qu’il est le plus adapté. Pour moi, le statut du fermage est équilibré, même si d’aucuns considèrent que, sur certaines dispositions, il peut-être plus avantageux pour les fermiers. Mais nous sommes ouverts aux négociations et prêts à le faire évoluer pour qu’il soit le plus favorable possible aux deux parties. J’ai le sentiment que les gens manquent parfois d’informations sur ce sujet. Par exemple, quand un bailleur dit que, quand il a un fermier sur une parcelle, il ne peut pas s’en séparer, c’est vrai et c’est faux. Effectivement, tant qu’il assume ses devoirs, il est compliqué de l’obliger à renoncer. Mais il peut le faire s’il souhaite lui-même s’installer ou installer l’un de ses descendants. Je trouve que les règles ont été établies de façon équilibrée par les anciens. Même si elles sont perfectibles. C’est pour cela que fermiers et bailleurs, nous nous rencontrons au moins une fois par an au sein de la commission consultative des baux ruraux et nous mettons d’accord pour les faire évoluer ».
Le thème du congrès national était la transmission. Est-ce que le statut du fermage est un sujet qui intéresse les jeunes générations ?
« Je ne pense pas qu’il y ait une vraie prise de conscience de l’importance de ce sujet chez les jeunes. Lorsqu’on pose la question à ceux qui s’installent : « quel est le premier contrat que vous signez ? » Aucun ne cite le bail. Dans le parcours à l’installation, le module sur le statut du fermage est même devenu facultatif. Ce n’est pas normal. Cela conduit à un déficit d’information sur le sujet alors qu’il faut qu’ils s’y intéressent. Pour eux, personnellement. Et pour le collectif. Aujourd’hui que nous sommes confrontés au problème du vieillissement de la population agricole, il faut du renouvellement et il faut une politique favorable aux installations. Mais les installations durables ne passent que par l’établissement d’un contrat de statut du fermage avec des baux en bonne et due forme. C’est grâce à cela aussi que l’on construira notre autonomie alimentaire ».
Propos recueillis par Isabelle Brenguier
Vers une évolution du statut du fermage
Selon Jean-Pierre Michallat, co-président de la section départementale des fermiers et métayers, « ces derniers sont favorables à une évolution du statut du fermage au sein d’une loi foncière. Avec la reconnaissance du statut de l'agriculteur professionnel et le renforcement du contrôle des structures inscrits comme préalables, nous aimerions voir figurer les six propositions suivantes :
- rendre l'état des lieux de sortie obligatoire en supprimant l'indemnité afférente tant aux bailleurs qu'aux preneurs s’il n’est pas réalisé,
- rendre obligatoire la conservation de la parcelle de subsistance par le fermier prioritairement sur ses terres en propriété,
- permettre la rédaction d'un accord amiable préalable entre les deux parties afin de fixer les modalités d’autorisation d’exercer sereinement l’activité agricole et leur indemnisation lors de la réalisation d'éventuelles constructions, investissements et améliorations sur le fond loué,
- ramener la possibilité pour le fermier de demander une révision du prix du fermage à son propriétaire au cours de la sixième année et non plus au cours de la troisième, pour dissuader de proposer des prix de fermage excessifs,
- travailler à la transmission de l'entreprise du fermier sortant en étroite concertation avec les différents bailleurs et leurs implications dans une recherche commune de préservation de l'outil de travail et de poursuite dans de bonnes conditions de l'entité économique,
- subroger le droit de préemption du fermier à d'autres apporteurs de capitaux dans le cadre du développement d'un système de portage de foncier ».
Toutes ces demandes sont portées par la section nationale des fermiers et métayers. Le congrès qui s’est tenu dans la Loire les 22 et 23 février a été l’occasion de renouveler l’équipe dirigeante. « La transmission s’est faite sereinement dans le désir de poursuivre le travail déjà engagé », assure Jean-Pierre Michallat, nouveau membre de la section nationale.
IB