Viticulture
La nouvelle vague des vins alpins
La 3e édition du salon professionnel Jour Fruit s’est déroulée pour la première fois en Isère, réunissant des viticulteurs des Savoie, du Bugey et de l’Isère.
Pas moins de 50 viticulteurs et plus de 600 visiteurs, la 3e édition de Jour Fruit a déplacé de nombreux professionnels, lundi dernier, 7 mars à Fort Barraux.
C’est la première fois que ce grand rassemblement de producteurs de Savoie, du Bugey et de l’Isère se tenait dans le département.
« Au carrefour alpin, un lieu intéressant et bien placé, mais aussi un clin d’œil aux vignerons isérois », savoure Olivier Chéreau, sommelier savoyard et organisateur de la manifestation.
« Ce sont des vignerons engagés, qui défendent une philosophie, qui mettent leurs tripes en avant », ajoute-t-il pour justifier la sélection des domaines présents.
Reconstruction
Tous ne sont pas en agriculture biologique, en biodynamie, ou producteurs de vins nature, mais tous défendent leur identité et leur terroir. « Les vins de Savoie connaissent un renouveau après des années où la qualité n’était pas au rendez-vous. En Isère, c’est différent. Il s’agit de reconstruction. Il n’y a jamais eu de mauvais vins et il s’agit de les remettre en avant. Dans le Bugey, c’est un peu la même histoire », explique Olivier Chéreau.
Et l’organisateur fait mouche, attirant des restaurateurs, des cavistes, des négociants, des chefs, des importateurs, des sommeliers, des serveurs et les élèves de toutes les écoles hôtelières alentour.
Car ce qui frappe, c’est la jeunesse de ce public professionnel qui témoigne de l’attirance pour le renouveau des vins de la région. En rendant le vin « accessible sans le vulgariser », l’organisateur impulse une nouvelle dynamique au concept de salon.
« Il n’y a que de très bons vins, des gens de bonne humeur, qui partagent facilement », lance Jérémie Dupraz, viticulteur à Apremont.
Tout ça, c’est un peu à cause de lui, même s’il s’en défend. C’est lui qui a accueilli la première édition de Jour fruit en 2021, un événement un peu artisanal, mais qui a donné l’envie à Olivier Chéreau de reprendre le flambeau. « Je ne supportais pas l’idée que les meilleurs salons soient à plus d’une heure trente de chez nous et pas ici. »
Il représente, avec son frère Maxime en cours d’installation, la 6e génération de viticulteurs du domaine familial.
« Il y a 390 vignerons en Savoie et 142 à Apremont. Mais personne n’est capable d’en nommer un seul », déclare-t-il, convaincu qu’une clientèle, cela se mérite.
En conversion bio, il voulait aussi reconquérir le public « car il y a un abysse entre le vin et le particulier ». Sa mission : désacraliser le vin et aller à la rencontre de ceux qui le dégustent.
Il défend une vision « moderne et qualitative du vin » et a décidé de se prendre en main pour le faire savoir.
« Ce qui me fait plaisir le matin, c’est de partager du vin », déclare-t-il en communiquant largement son enthousiasme sur les réseaux sociaux.
« Nous sommes reconnus »
« C’est important d’être là, avec cette nouvelle vague, car il y a un élan qui se crée autour des vins de Savoie », assure Sébastien Bénard, du domaine Les Alpins à La Buisse, qui participait pour la première fois au salon.
« C’est un événement qui ne fédère que des vignerons qui veulent sortir du lot. Cela nous permet d’être visibles, de porter un message collectif et de travailler en réseau. » Il ajoute : « Ce qui est notable, c’est que ça se passe ici et seulement avec des gens des Alpes. »
Pour Wilfrid Debroize, le président du syndicat des vignerons de l’Isère et associé du Domaine des Rutissons au Touvet, la présence de quatre vignerons isérois dans ce salon – Domaine Finot ; Les Alpins ; Jérémy Bricka et Les Rutissons – « prouve que les vins isérois prennent de l’importance ».
Il fait valoir la dynamique impulsée autour des petites appellations, Savoie, Isère, Bugey. « Nous sommes acceptés et reconnus comme tels, dans notre diversité ampélographique et de vignerons », lance-t-il.
Et comme il est préférable, selon le calendrier biodynamique, de déguster un vin un Jour fruit, le salon éponyme a mis les visiteurs professionnels dans les meilleures dispositions, avec l’espoir que les vins alpins retrouvent les meilleures tables et les meilleurs caves de la région.
Isabelle Doucet