BOIS & FORÊT
Le chêne français, victime des Chinois

Selon la Fédération nationale du bois (FNB), un chêne français sur trois est aujourd’hui exporté en Chine contre un sur dix il y a dix ans. La filière forêt-bois s’inquiète de cette frénésie chinoise et les industriels ont lancé une pétition en ligne et rencontré le ministre de l’Agriculture.

Le chêne français, victime des Chinois
Selon la Fédération nationale du bois (FNB), la France a exporté, lors des quatre premiers mois de l’année 2021, 100 % du volume exporté sur l’ensemble de l’année 2020. ©Actuagri

Selon Nicolas Douzain-Didier, délégué général de la Fédération nationale du bois (FNB) qui représente les scieurs et les transformateurs, la France a exporté, lors des quatre premiers mois de l’année 2021, 100 % du volume exporté sur l’ensemble de l’année 2020 ». C'était un chêne sur trois l’année dernière. Depuis le début de cette année, « c’est pratiquement deux chênes sur trois qui partent en Chine dans les adjudications de bois sur pied, a récemment déclaré Jacques Ducerf, président de la FNB au micro de Sud-Radio. La France dispose en effet d’une des plus grandes ressources en quantité et en qualité de chêne dans le monde, ce qui attire notamment les Chinois. »

Raréfaction

Cela fait déjà plusieurs années que les professionnels de la filière tirent la sonnette d’alarme. Déjà en 2018, ils s’inquiétaient que 25 à 30 % du chêne récolté en France partaient à l’étranger pour y être transformés et que les scieries spécialisées dans la découpe de chêne ne fonctionnent qu’à 60 % de leurs capacités par manque de matière première. La situation s’est aggravée depuis que la Chine a décidé de protéger ses forêts durant 99 ans… parce qu’elles sont surexploitées. La Russie, deuxième exportateur mondial de bois, a également annoncé son intention de cesser l'exportation de certains types de bois. La tension sur ce marché s’est aggravée. Même l’augmentation de la production de chêne en France n’a pas suivi ni compensé l’augmentation du volume des exportations. Il s’est ensuivi une raréfaction de ce bois noble avec pour conséquence une augmentation de son prix. Rien qu’entre 2007 et 2017, il avait connu une augmentation de 65 % selon l’Office national des forêts (ONF).

Vers des quotas d’exportation ?

Les responsables de la filière ont été reçus vers la mi-juin par le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie. Ce dernier s’était déjà ému, fin avril d’une possible « catastrophe », en particulier sur le volet social. Le seul secteur de la transformation représente un emploi sur huit dans la filière : 50 000 emplois sur 400 000 environ. D’ailleurs, les acteurs du bois ont lancé une pétition en ligne « pour sauver la scierie française : stop aux exports de grumes ». La situation est d’autant plus inquiétante que les scieries françaises ont puisé dans leurs stocks de bois sans avoir le temps de les reconstituer. Car la récolte de chênes n’a pas été à la hauteur des espérances en 2019. Se pose maintenant la question de mettre en place des quotas d’exportation, ce à quoi les propriétaires forestiers privés s’opposent au nom de la liberté d’entreprendre et de commercer mais qui souhaitent aussi que les chênes français soient transformés sur place. En France, 41 % des massifs sont recouverts par sept espèces nationales de chêne. Selon le ministère de l’Agriculture (Agreste), la récolte de chêne destinée au sciage a atteint un volume, en 2020, de 2,4 millions de m3.

Christophe Soulard