HORTICULTURE
Une filière régionale aujourd’hui en danger

Le végétal, produit de première nécessité ? C’est en tout cas ce qu’ont demandé les professionnels français de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage lors d’un échange avec Emmanuel Macron début décembre. En Auvergne-Rhône-Alpes, la filière est en danger et ne pourrait pas supporter un nouvel arrêt brutal, alerte Véronique Brun, animatrice régionale pour la FNPHP.

Une filière régionale aujourd’hui en danger
La filière végétale en Auvergne-Rhône-Alpes compte 4 440 entreprises, pour près d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires. (Crédit : SARL Les Serres du Baderand)

« Nous ne pouvons pas investir 500 millions d’euros aujourd’hui sans avoir la certitude de pouvoir vendre notre production demain ! », ont souligné les professionnels français de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage à l’issue d’une année 2020 particulière qui aura mis à mal la filière. Fortement impactée par le confinement du printemps dernier, l’ensemble de la profession horticole a besoin de garanties pour l’avenir, et notamment en ce qui concerne les circuits de commercialisation pour ce début d’année 2021.

Elle demande ainsi le classement immédiat du végétal comme produit de première nécessité au risque de voir sacrifiée cette filière française d’excellence. Une demande réalisée lors d’une rencontre à l’Elysée, avec le président de la République, le 6 décembre dernier. Selon Mikaël Mercier, président de Val’hor (interprofession), Emmanuel Macron « a été attentif aux problématiques de la filière et l’enjeu du printemps à venir. Cet échange a permis de rappeler que la filière fait partie de l’âme de la France ». 52 000 entreprises spécialisées sont concernées et attendent des engagements fermes de la part du gouvernement. 

Un demi-milliard d’investissement

Alors que les cicatrices sont encore vives, les entreprises de la production française de végétaux doivent d’ores et déjà réengager près d’un demi-milliard d’euros pour permettre la mise en culture des végétaux sans avoir aucune visibilité quant à la reprise. « Mettre en culture maintenant, pour ne pas rater une deuxième fois consécutive la saison cruciale, c’est faire le choix d’investir tout de suite un demi-milliard d’euros pour la seule filière horticole, dans les plants, les intrants, le recrutement de contrats saisonniers et le matériel à acheter ou à rénover. Ce choix ne tolère ni l’incertitude, ni la précarité de la situation actuelle », alerte l’interprofession.

Au niveau régional, la filière végétale est également sous tension. « L’inquiétude est forte quant à un éventuel reconfinement. Nous n’avons aucune garantie, aucune visibilité sur l’avenir de nos circuits de distribution. Nous craignons que les entreprises, qui doivent engager des frais énormes pour la mise en production des plantes et fleurs de printemps, subissent de nouveau la situation », indique Véronique Brun, animatrice régionale du bassin Rhône-Méditerranée de la fédération nationale des producteurs de l’horticulture et des pépinières (FNPHP).

La filière régionale en perdition ?

La demande auprès du gouvernement est donc pour l’instant restée sans réponse. « Nous avons vraiment besoin du soutien de nos élus politiques pour défendre le côté essentiel du végétal, d’autant plus que nous avons vu, lors des confinements, que les consommateurs se sont tournés vers le jardinage, la nature. » Véronique Brun souligne le soutien de la Région Auvergne-Rhône-Alpes avec un plan d’aide exceptionnel pour l’horticulture, avec une enveloppe de 400 000 € à destination des entreprises les plus impactées par la crise sanitaire. Une aide financière qui permettra à beaucoup de relancer les mises en production pour cette saison 2021. « Malgré tout, notre filière est en danger. Elle ne pourrait pas supporter un nouvel arrêt brutal », conclut Véronique Brun.

La filière, bien que dynamique, est en difficulté depuis plusieurs années. En Aura, 10 % d’entreprises horticoles et de pépinières ont disparu, entre 2013 et 2019. La perte la plus prononcée concerne l’Auvergne, avec la disparition de 18 % des entreprises en 6 ans. La situation est donc difficile à appréhender pour la filière, d’autant plus que les produits qu’ils fournissent sont vivants et périssables. Au niveau national, les pertes de l’an passé ont mis à mal de nombreux acteurs du secteur, avec la destruction de 3 600 emplois, la cessation d’activité de 3 000 entreprises du secteur, la mise en décharge de 100 millions de tiges et une perte estimée à 60 M€ pour la destruction des végétaux invendus.

Amandine Priolet