A l’approche du 25 novembre et de la célèbre Sainte Catherine, les pépiniéristes et horticulteurs isérois rapportent les tendances du moment et font part de leurs préconisations pour réaliser avec succès de belles plantations d’automne.

« C’est le moment de planter ! »
Crédit photo Florian Breuil. Florian Breuil, horticulteur à Saint-Jean-de-Bournay, assure que les haies « gourmandes » rencontrent beaucoup de succès.

« A la Sainte Catherine, tout bois prend racine ». Le dicton est ancien mais l’activité qui règne en ce moment au sein de la filière de la pépinière et de l’horticulture lui confère toute sa véracité. « Pour autant, il ne doit pas être pris au pied de la lettre », tempèrent les professionnels du secteur. S’il fait bien référence à la période la plus propice pour les plantations, celle-ci ne dure pas la seule journée de la Sainte-Catherine – le 25 novembre - mais s’étend sur les mois d’automne et d’hiver, de novembre à mars. « Cela correspond à la période durant laquelle les arbres sont en repos végétatif, c’est-à-dire que leurs feuilles sont tombées et que leur sève est descendue », explique Eric Arnaud, pépiniériste au Touvet, dans la vallée du Grésivaudan.

A partir de maintenant, il est donc possible de planter « tout ce qu’on veut qui ne craint pas le gel ». Cela inclut les arbres, les arbustes, les rosiers, les vivaces et même les bulbes. Et avec le changement climatique qui nous fait connaître des étés particulièrement chauds et secs, ce principe revêt de plus en plus d’importance. D’une part, cela évite un sur-arrosage au printemps. Et d’autre part, même si les températures sont fraiches, la terre reste chaude, ce qui permet aux plantes de commencer leur enracinement les rendant d’autant plus résistantes pour passer leur premier été.

Haies « gourmandes »

Les professionnels de la discipline sont donc en ce moment en pleine effervescence pour satisfaire leurs clientèles avides de bons produits… et de conseils avisés. Tous ont noté un engouement plus fort pour l’entretien et l’aménagement du jardin depuis deux ans, qui s’est encore accru après le confinement du printemps. « Je pense que cette période a sensibilisé les particuliers à leur extérieur. Les gens sont plus chez eux, partent moins en vacances. Ils considèrent leur jardin comme une nouvelle pièce à vivre. Ils sont donc très demandeurs de conseils pour réussir leurs plantations à des fins d’aménagement et de consommation. Ils s’interrogent sur la manière dont sont cultivées les plantes et sont sensibles à leur qualité. Mais au milieu de toute l’information commerciale qui lui est donnée, le consommateur est parfois perdu et n’a plus la notion des saisons », explique Gilles Bonnaire, pépiniériste à Bourgoin-Jallieu. Un constat que partage Sylvie Delay, pépiniériste à Vienne : « Souvent les gens viennent nous voir avec leur cahier des charges et leurs idées qui ne correspondent pas forcément aux réalités des végétaux. C’est notre travail de leur expliquer et de leur faire découvrir ce qui va répondre à leurs attentes ».

Cet attrait se traduit par des achats qui ont vocation à « joindre l’utile à l’agréable », c’est-à-dire par une disposition marquée à l’égard des arbres et arbustes vivriers qui révèlent une envie de « se faire plaisir » et de « produire et récolter pour cuisiner ». Outre les arbres fruitiers, les pépiniéristes et horticulteurs du département indiquent avoir de fortes demandes pour des haies, qualifiées par Florian Breuil, horticulteur à Saint-Jean-de-Bournay, de « gourmandes ». « Il s’agit de mélanges de cassis, groseilles, baie de mai ou de gogi », détaille-t-il. A ceux-là, s’ajoutent encore le cornouiller mâle ou l’amélanchier, plébiscité. « Cet arbuste dispose d’un délicat bois veiné, propose une jolie couleur rouge d’automne et une très belle floraison blanche au printemps et offre des fruits comestibles en été qui font d’excellentes confitures. Il plaît beaucoup », assure Jérémy Vaudaine, pépiniériste à Seyssuel, à côté de Vienne. Au sujet des haies persistantes et occultantes qui ont vocation à cacher les vis-à-vis, la tendance n’est plus à la mono-spécialité. Ce qui compte, c’est la diversité des variétés pour avoir différents feuillages et différentes couleurs. « Le trio, laurier du Caucase, photinia, eleagnus, fonctionne bien », indique Florian Breuil. Gilles Bonnaire soumet pour compléter, le seringat, les viornes et les chèvrefeuilles qui offrent de belles alternatives.

Résistantes au sec

Réchauffement climatique oblige, la tendance pour les plantes résistantes au sec est de plus en plus forte. « Le phénomène n’est pas nouveau mais s’accentue d’années en années », souligne Gilles Bonnaire. Le laurier du Portugal, l’érable lacinié ou à feuilles découpées, le mûrier platane s’avèrent être plus résistants que bien d’autres espèces. Les grenadiers, les oliviers, les palmiers et autres lauriers roses gagnent aussi du terrain.

Pour autant, si elles sont moins gourmandes en eau que d’autres, toutes les plantes en ont quand même besoin. Il est donc recommandé de veiller à l’arrosage du printemps, au moment où les arbres mettent leurs feuilles et en été, surtout en cas de grosse sécheresse. Le système de goutte-à-goutte, plus économique et plus efficace, est préféré au tuyau. Les pépiniéristes préconisent également un apport d’engrais bio tous les deux ans pour favoriser l’enracinement des plantes.

Enfin, pour assurer la réussite d’une plantation, les professionnels rappellent qu’« il faut toujours être attentif à l’exposition. On ne met pas les mêmes espèces au nord ou au sud, en plein vent ou à l’abri ». « Et il ne faut pas non plus oublier d’apporter, lors de la plantation, une fertilisation naturelle assez importante, comme du compost, du fumier frais ou déshydratés », ajoute Sylvie Delay.

Isabelle Brenguier

A l’instar des jardins des maisons, les abords des fermes peuvent aussi être valorisés par des plantations réussies. Outre leur intérêt esthétique, elles peuvent apporter un bénéfice important en matière de biodiversité.

Aujourd’hui, la réalisation de haies champêtres ou paysagère est privilégiée. « Exit les haies monobloc. Place à la diversité et à la variété des essences qui donnent un effet plus sauvage et permettent d’intégrer des plantes mellifères favorisant la biodiversité », assurent d’une même voix les professionnels de la pépinière.

Pour Jérémy Vaudaine, pépiniériste à Seyssuel, elles peuvent être constituées de tetradium, encore appelé arbre à miel, apprécié pour sa floraison odorante et pour son feuillage luxuriant, de buddleilla, aussi appelé arbre à papillon, qui se présente sous la forme d’imposants buissons dont les branches se couvrent dès juin de belles panicules de fleurs colorées, blanches ou violet-mauve ou de leycesteria formosa, également nommé arbre aux faisans, à cause de ses baies qui, lorsqu’elles sont à maturité attirent les oiseaux en général et les faisans en particulier, mais également les abeilles et les papillons.

Pour Gilles Bonnaire, pépiniériste à Bourgoin-Jallieu, elles peuvent être formées de cotoneaster et de pyracantha : deux espèces tout aussi intéressantes pour attirer oiseaux et abeilles.

Quant à Florian Breuil, installé à Saint-Jean-de-Bournay, sa préférence se porte sur la charmille. « C’est une variété de la région, qui pousse bien et qui s’intègre bien dans notre paysage isérois », souligne l’horticulteur.

Bosquets fleuris

Dans le même esprit, le pépiniériste berjallien préconise la formation de bosquets fleuris constitués de mélanges attractifs pour les pucerons, les parasites et les oiseaux. « Même s’ils sont semés dans une surface d’un mètre carré, ils rendent vraiment bien. C’est très important pour l’équilibre général. Il s’agit de petits paquets de 50, 250 grammes ou un kilo composés de différentes espèces qui poussent de façon un peu folle et qui attire les prédateurs des pucerons et des araignées. C’est super pour la biodiversité », s’enthousiasme le professionnel. Ainsi, certaines associations présentent un intérêt particulièrement marqué en matière de lutte biologique. Et Gilles Bonnaire de citer la potentille jaune qui, installée au milieu des chrysanthèmes, attire les prédateurs des pucerons. Elle joue le même rôle quand elle est placée à proximité des arbres fruitiers.

IB

En complément des arbres et arbustes, les plantes vivaces ont toute leur légitimité pour bien terminer un massif déjà garni ou former des petites haies basses utiles pour délimiter un espace. Leur intérêt est d’autant plus grand qu’elles sont particulièrement résistantes au sec. Les professionnels assurent que la demande concernant ces petites plantes est de plus en plus forte. Florian Breuil, horticulteur à Saint-Jean-de-Bournay, apprécie particulièrement la sauge arbustive. « Elle est odorante et fleurit de juin jusqu’aux premières gelées », affirme, convaincu, le spécialiste, qui met aussi en avant la joubarbe, l’euphorbe et les échinacées.

Quant à Chloé Martin, pépiniériste spécialisée en plantes vivaces, installée à Vinay, ses coups de cœur de se portent sur les vivaces qui présentent de beaux feuillages d’automne. Et la jeune femme de citer l’amsonia, le plumbago et les sedums. Elle apprécie aussi toutes les floraisons longues comme les gora, les anémones du Japon ainsi que les roses de Noël.

Ainsi, les possibilités sont pléthores pour réussir un beau jardin et les professionnels du secteur ont beaucoup d’idées pour sortir des sentiers battus. Leurs conseils s’avèrent précieux.

IB