INTERVIEW
Retraite agricole : « Le combat n’est pas terminé »

De réelles évolutions, obtenues ces deux dernières années, ont permis d'améliorer les retraites du régime agricole. Mais, selon Jean-Claude Chalencon, président de la section régionale des anciens exploitants, ce n’est pas suffisant.

Retraite agricole : « Le combat n’est pas terminé »
Jean-Claude Chalencon, président de la section régionale des anciens exploitants. ©VG

Les agriculteurs bénéficient de très petites retraites, alors même qu’ils ont travaillé durant toute leur vie sur leur exploitation. Pouvez-vous nous en expliquer les raisons ?

Jean-Claude Chalencon : « Les bénéficiaires du régime agricole sont victimes de plusieurs inégalités, c'est notamment le cas pour l'année de service militaire, dont les quatre trimestres sont bien validés pour la retraite, mais qui ne rapportent rien sur le plan financier, ni sur la retraite de base ni sur la RCO. La moyenne des retraites agricoles reste basse comparée aux autres régimes. On peut bien sûr l'expliquer par de faibles revenus, mais aussi par le coefficient d'adaptation (mis en place en 2003 pour prendre en compte l'augmentation de la durée d'activité) qui vient minorer la retraite proportionnelle. »

Le réseau FNSEA-JA se bat depuis des années pour améliorer les retraites et corriger certaines inégalités. Estimez-vous que de réels progrès ont été faits ?

J-C Chalencon : « La Section nationale des exploitants agricoles (SNAE), qui fait partie intégrante du réseau FNSEA-JA, se bat depuis plus de 20 ans pour revaloriser nos pensions de retraite et atteindre la moyenne des pensions du régime général. Et l'on peut dire que notre action syndicale a porté ses fruits, que ce soit avec la loi Chassaigne 1, qui a permis aux chefs d'exploitation d'atteindre les 85 % du Smic, et la loi Chassaigne 2 qui a revalorisé les pensions des conjoints collaborateurs et des aides familiaux. Nous exigeons la prise en compte, en 2026, des 25 meilleures années dans le calcul de nos retraites. Oui, nous avons décroché de belles avancées, mais c'est encore insuffisant, car il existe encore un différentiel de 300 € en faveur de la pension de retraite des salariés. L'alignement des conditions d'attribution des minima de pension des membres de la famille des exploitants sur des règles plus favorables du minimum contributif des salariés doit être mis en œuvre au plus vite. Pour garantir un minimum de retraite décent, nous demandons une loi visant à supprimer les restrictions qui n'existent pas dans les autres régimes. Il est par exemple inacceptable qu’à la suite du décès du conjoint(te), un(e) veuf(ve) voit sa revalorisation supprimée et sa pension diminuée en raison des plafonds. La demi-part fiscale des veufs(ves) doit être rétablie et pérennisée. Mais la priorité reste la pension des conjoints(tes) à revaloriser en vue d'atteindre les 85 % du Smic. »

Quel travail reste-t-il à conduire pour réduire les inégalités inter-régimes ?

J-C Chalencon : « Tout d'abord sur la mesure des 25 meilleures années qui doit entrer en application le 1er janvier 2026, il faut rester vigilant pour que cette date soit respectée. Il revient aussi aux actifs de défendre ceci ! Dans un second temps, il faudra être attentif à son mode d'application. En ce qui concerne la revalorisation annuelle de nos pensions, au sein de la section régionale, nous défendons un recours à un forfait plutôt qu'à un pourcentage qui favorise les retraites les plus importantes. Ainsi, la hausse de 2,2 % (appliquée en 2025) donne une revalorisation totale de 22 € pour une pension de 1 000 €/mois, et de 88 € pour une pension de 4 000 €... Il serait normal d'obtenir une reconnaissance financière pour ceux, comme beaucoup d'agriculteurs, qui ont élevé correctement leurs enfants. D’autre part, les contributions sociales (9,2 % de CSG et 0,5 % de RDS retenus sur les revenus des exploitants) doivent absolument être transformées en cotisations retraites pour obtenir plus de points de retraite proportionnelle.

Propos recueillis par Véronique Gruber