INTERVIEW
Michèle Boudoin : « L’aide ovine sera essentielle pour nos éleveurs ovins demain »

Alors que les négociations dans le cadre de la future Pac sont en cours, Michèle Boudoin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO), appelle le gouvernement à ne pas brader l’aide ovine, garante du maintien de la filière en France.

Michèle Boudoin : « L’aide ovine sera essentielle pour nos éleveurs ovins demain »
Michèle Boudoin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO).

D’après les chiffres de l’Institut de l’élevage et de FranceAgriMer, les cours de l’agneau ont atteint un bon niveau à Pâques. Vous confirmez ?

Michèle Boudoin : « A Pâques, les cours de l’agneau ont en effet atteint 7,65 euros le kilo. Même en cette période festive où les prix sont traditionnellement hauts, ce niveau est sans précédent, mais nous restons prudents face aux évènements qui peuvent se mettre en travers de notre chemin et que nous ne mesurons pas aujourd’hui. Le contexte que nous vivons depuis un an est inédit. Qui aurait imaginé que les consommateurs français seraient au rendez-vous à Pâques 2020 pour acheter de l’agneau français ? Qui aurait pensé que les allègements des contraintes sur les déplacements interrégionaux au moment des fêtes de Pâques de cette année allaient relancer la demande intérieure en agneau pascal ? Et enfin, qui peut garantir aujourd’hui que la Nouvelle-Zélande demeure tournée vers la Chine à l’export ? Tous ces éléments sont liés au contexte de la crise pandémique et ont eu, pour conséquence, d’obtenir des prix favorables, mais demain, allons-nous pouvoir les maintenir ? Rien n’est acquis ! La FNO reste donc mobilisée et extrêmement vigilante, d’autant plus que nous sommes actuellement en pleine renégociation de la réforme de la Pac. »

Justement où en sont ces négociations ?

M.B : « Nous en sommes encore au stade des échanges et des propositions au sein du PSN (Plan stratégique national). Celles-ci se font dans le cadre d’une enveloppe budgétaire arrêtée au niveau de l’UE en juillet 2020. Le PSN doit être finalisé à l’été 2021 par le gouvernement français pour une application de la Pac à partir de janvier 2023. »

Quelles sont vos attentes pour la filière ovine ?

M.B : « Ce que nous voulons, c’est le maintien de l’aide ovine dans le cadre des renégociations de la politique agricole commune. Les aides couplées nous ont permis, il y a 10 ans, de sauver le secteur ovin. Or aujourd’hui, les discussions avec les pouvoirs publics menacent ces aides couplées qui sont pourtant essentielles pour les éleveurs ovins demain, pour produire des agneaux de qualité, répondre à la demande de consommation intérieure et revaloriser les revenus. Il y a certes le prix de nos animaux mais il y a aussi les aides et il n’est pas question pour nous d’abandonner les 125 M€ qui nous avaient été alloués au départ. La Pac doit continuer à nous accompagner dans notre projet d’aide ovine équilibré, ambitieux, pour toutes les brebis et tous les territoires ; un projet qui permettra aux consommateurs et aux citoyens d’avoir des produits de qualité et des territoires entretenus et économiquement dynamiques. N’est-ce pas là la demande de la société ? Les producteurs ovins français s'engagent à y répondre mais l’UE doit les y aider.

Plusieurs vidéos portraits produites par la FNO sont diffusées en ce moment sur les réseaux sociaux. Dans quel but ?

M.B : « Effectivement, depuis plusieurs jours et jusqu’à la fin du mois d’avril nous diffusons des vidéos très courtes mais percutantes dans lesquelles des éleveurs de nos régions expliquent concrètement en quoi la production ovine en France est importante et quels sont ses atouts. Cette démarche s’inscrit dans la volonté de la FNO d’enrichir les discussions en cours autour de la future Pac. Car le sujet est trop important, je dirais même vital, pour le maintien d’un élevage ovin capable de répondre en même temps aux enjeux d’une alimentation de qualité, de l’aménagement du territoire, de la préservation des espaces naturels et du développement économique. »

Propos recueillis par C.Rolle