Industrie
Oxyane construit son usine de trituration de soja à La Côte-Saint-André
La future usine de trituration d’Oxyane, destinée à fabriquer du tourteau de soja, sortira de terre à La Côte-Saint-André d’ici fin 2023.
De la création de semences à la production de tourteau de soja, c’est toute la filière de cette légumineuse que la coopérative Oxyane pilotera à partir de 2023.
En effet, l’entreprise va construire une usine de trituration de soja sur son site de La Côte-Saint-André, entre le silo et l’usine d’aliments DNA. D’une capacité de 25 000 tonnes de graines, elle pourra ainsi produire 18 000 tonnes de tourteau non OGM, en agriculture biologique ou conventionnelle.
Elle entrera en production à partir de l’hiver 2023-24.
Le procédé de fabrication consiste en la pression et la cuisson de la graine de soja, sans utilisation de solvant, pour la transformer en tourteau.
Stocké sur place, le soja sera fourni en fonction des besoins de trituration. A l’issue de la transformation, une partie du flux sera destinée à la fabrication d’aliments composés par l’usine DNA, l’autre partie sera directement vendue comme matière première aux éleveurs.
« C’est une usine en cohérence avec le potentiel de consommation et de production de graine », indique Grégory Pinçon, directeur de l’activité élevage de la coopérative Oxyane et de ses filiales.
L’investissement d’un montant de plus de 5 millions d’euros a bénéficié du Plan de relance, du soutien du Feader, de la Région et du Département de l'Isère.
Des usines en France
La France reste dépendante à plus de 90% (1) des importations de soja, dont la plus grande partie sont des variétés OGM. La dépendance du tourteau non OGM est, elle, de 80 %.
« Si la France a produit du soja jusque dans les années 90, en revanche, elle n’avait pas d’outils pour transformer les graines, explique Grégory Pinçon. On assiste à un regain d’intérêt depuis quelques années car il existe des débouchés. »
Portées par des acteurs privés ou des coopératives, les usines de trituration sont récemment sorties de terre là où les conditions pédoclimatiques permettent la culture du soja, la plante ayant sensiblement les mêmes besoins que le maïs.
10 ans de recherche
La construction de l’usine de la Côte-Saint-André est l’aboutissement de dix années de recherche. « La filière commence par la production de semences avec Top semence (2) qui est un acteur important dans la multiplication, explique le directeur de l’activité élevage d’Oxyane. L’enjeu consiste à connaître les variétés, leurs caractéristiques génétiques et adapter nos préconisations variétales. »
Le catalogue Top propose32 variétés en agriculture biologique ou conventionnelle.
Oxyane, et auparavant La Dauphinoise, mènent aussi des essais depuis 10 ans sur le soja destiné à la production de tourteau de soja expeller.
Le tourteau en lui-même a suivi le même process pour être réinventé, qualifié et standardisé. Cette phase de recherche et développement a été conduite avec le concours du centre d’élevage de Poisy, du PEP laitier et dans les exploitations.
Une conjoncture favorable
La question du coût de production et de la rémunération a été au centre de la réflexion stratégique. Le futur outil doit couvrir ses charges. L’objectif de la coopérative n’est pas de réaliser des profits, mais de proposer un tourteau de qualité à un prix compétitif.
Pour cela, l’usine devra tourner à 100% de ses capacités industrielles. Aujourd’hui la tonne de tourteau de soja OGM s’échange à 640 euros sur le marché mondial et à 800 euros en soja non OGM.
« Nous avons bénéficié d’une conjoncture favorable, conclut Grégory Pinçon. Nous portions ce projet depuis quelques années, lorsque nous avons eu confirmation de l’attente des éleveurs, mais aussi que la valeur nutritionnelle des tourteaux donne de très bons résultats techniques en élevage. Ce projet répond à la stratégie d’Oxyane de produire ce dont on a besoin. Il y avait besoin industriel de disposer de suffisamment de tourteau. De plus, cette production locale présente un intérêt environnemental car le tourteau produit en Rhône-Alpes émet trois fois moins de gaz à effet de serre qu’un tourteau d’importation. Enfin, Oxyane a bénéficié du plan de relance pour accompagner son investissement. »
Ce projet majeur pour la coopérative Oxyane doit apporter des opportunités de valeurs ajoutée au territoire et assoir la filière soja pour les années à venir.
Isabelle Doucet
(1) Académie d’agriculture 2021
(2) Union de 11 coopératives agricoles (dont Oxyane) et Invivo, à La Batie-Rolland (26)
Un trait d’union entre production et consommation
Alors que les éleveurs recherchent des tourteaux de soja non OGM, les céréaliers profitent d’une culture alternative au maïs.
L’usine de trituration d’Oxyane « sera le trait d’union entre la production et la consommation. Il permet de valoriser la production locale et de répondre aux besoins des éleveurs », assure le directeur de filière d’Oxyane, Grégory Pinçon.
Ces besoins sont de plusieurs ordres, à commencer par celui de tourteau non OGM que recherchent plus particulièrement les éleveurs engagés dans une filière qualité. Ceux en agriculture biologique sont aussi en quête d’aliments bio et si possible issus de filière française (plutôt que du tourteau de soja bio importé d’Afrique ou de Chine), ainsi que tous les exploitants en polyculture élevage qui pourront bénéficier de la trituration à façon, soit le plus court chemin du champ au râtelier. Mais aussi tous les autres éleveurs, dont ceux d’animaux monogastriques (poules pondeuses ou filière porc).
Une culture sous contrat
« Le point capital est de disposer de graines, ajoute Grégory Pinçon. Oxyane encourage donc ses adhérents à développer cette espèce. » La surface actuellement cultivée s’étend sur environ 5 500 ha, « Soit 4% de la ferme Oxyane ». Il en faudrait 9 000 en tout.
Grégory Pinçon rappelle les bénéficies d’implanter une telle culture en tant qu’alternative au maïs et source de valeur ajoutée.
L’intérêt est d’abord agronomique puisque la légumineuse n’a pas besoin d’apport d’azote. Son introduction dans la rotation est pertinente dans la lutte contre la chrysomèle du maïs.
« C’est une espèce qui a rarement besoin de séchage », ajoute-t-il.
Conduit comme un maïs, le soja est une culture de printemps récoltée en septembre et octobre. Enfin, cette culture sous contrat offre un potentiel de rendement intéressant de 30 qtx par hectare (l’intérêt est moindre en dessous de 23 qtx), d’autant que les conditions pédoclimatiques régionales sont adaptées à sa culture.
Le soja a besoin de chaleur et d’humidité (mais moins que le maïs) afin que lors de sa récolte, les gousses comptent suffisamment de graines (PMG).
Les zones irriguées lui conviennent très bien.
Enfin, Grégory Pinçon fait valoir la souveraineté régionale qu’apportera la culture du soja et sa trituration sur place.
ID