INTERVIEW
« Le soutien au GNR passera bien à 30 centimes du litre au 1er septembre ! »

Crise sanitaire du Covid, crise économique liée à l’invasion de l’Ukraine, et désormais une sécheresse dont les effets vont peser lourdement sur les résultats des éleveurs comme de certaines productions végétales et des prix très hauts des carburants. Interview du vice-président de la FNSEA, Luc Smessaert.

« Le soutien au GNR passera bien à 30 centimes du litre au 1er septembre ! »
Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA. ©Actuagri

Quelles sont les solutions pour aider les exploitants agricoles à passer cette période économiquement difficile ?

Luc Smessaert : « Il est évident que la conjonction de tous ces évènements va fragiliser de nombreuses exploitations agricoles qui ne peuvent répercuter sur le prix de vente de leur production les hausses de charges subies. La volatilité des cours des carburants, qui touche particuliers comme professionnels, permet d’illustrer les difficultés auxquelles doivent faire face les exploitants agricoles, tous les ans, quand des aléas, par nature imprévisibles, viennent impacter la vie économique de leur entreprise. Sur le cas particulier du carburant, nos demandes de soutien direct et immédiat ont été entendues, afin de limiter l’impact à court terme des prix hauts du GNR sur les exploitations. La pérennisation de la prise en charge de 18 centimes du litre, jusqu’à fin août, suivi d’un renforcement à hauteur de 30 centimes en septembre et octobre, permettront de mieux gérer les approvisionnements nécessaires aux travaux de la fin d’année. Pour autant, nous savons qu’une telle mesure aura également pour conséquence de concentrer la demande sur ces deux mois, risquant de mener à une augmentation artificielle du prix et non du fait de facteurs géopolitiques. Nous devons donc collectivement lisser la demande sur cette période, pour ne pas créer une bulle préjudiciable à tous. Il serait contre-productif de concentrer les achats début septembre, alors que le soutien de l’État s’étalera sur deux mois, au minimum. Par ailleurs, la réduction de la charge liée au carburant passe également par plus de sobriété du matériel, à travers leur utilisation, l’amélioration des moteurs existants, mais aussi par l’adjonction de modules électriques sur le matériel tracté, qui limite d’autant le recours à la prise de force. Nous travaillons en étroite collaboration avec le machinisme agricole pour faire émerger des alternatives au GNR, économiquement viables pour les exploitants et qui permettent de concilier les impératifs de souveraineté et de sobriété énergétique. »

Au-delà de l’impact sur le résultat, ces prix hauts du GNR engendrent des difficultés de trésorerie importantes pour les exploitations, difficultés aggravées par l’avance de TICPE que consentent les exploitants lors de l’achat du GNR. Quand ce système prendra-t-il fin, pour enfin taxer le GNR agricole à son juste niveau, à la pompe ?

LS : « L’État a estimé à 270 millions d’euros le montant que la Ferme France avance tous les ans, lors de l’achat du GNR, avant d’en obtenir le remboursement l’année suivante. Ce système de remboursement partiel de TICPE sera nécessaire tant que d’autres secteurs achèteront du GNR, sans bénéficier du taux réduit agricole. Les difficultés économiques que connaissent les entreprises de travaux publics, utilisatrices de GNR, ont conduit le gouvernement a repoussé d’un an encore le passage à l’achat de gazole blanc pour ces usages de travaux publics. En conséquence, l’intégration du remboursement agricole de TICPE doit être reportée d’un an également. Pour autant, ce n’est pas aux exploitants agricoles de supporter les difficultés économiques d’autres secteurs, et encore moins de fournir de la trésorerie à l’État ! Nous avons donc demandé le versement d’un second acompte de TICPE dès septembre 2022, pour compenser partiellement la TICPE acquittée sur les achats de GNR à venir d’ici à la fin d’année, et nous sommes en discussion avec le gouvernement pour mettre en place un système pérenne d’acomptes de TICPE. »

 
Propos recueillis par Actuagri