Espaces naturels sensibles

Campagne ENS en Isère : découvrir la nature pour mieux la préserver

Envie de partir sur la piste d'un castor ? D'apprendre à reconnaître les papillons ou le doux chant du sonneur à ventre jaune ? Jusqu'au 9 octobre prochain, seize animateurs nature accueillent les curieux dans le réseau des espaces naturels sensibles (ENS) de l'Isère pour en découvrir les incroyables richesses. Avec 145 sites départementaux ou locaux, il y a de quoi faire, y compris tout près de chez soi. C'est en tout cas le message que veut faire passer le Département cette année en rappelant sur le flyer de la campagne qu'« agir pour la biodiversité, ça commence juste à côté de nous ».

Visite guidée dans les tourbières

Exemple grandeur nature le 20 mai dernier, lors du lancement de la saison 2021 dans les anciennes tourbières de l'Herretang et de la Tuilerie. Situé en Chartreuse, entre Saint-Joseph-de-Rivière et Saint-Laurent-du-Pont, le site se déploie sur 85 hectares, dont une partie est aménagée en sentier découverte. Ce jour-là, Fabien Mulyk, vice-président du Département en charge des ENS, et quelques élus locaux, dont les maires des deux communes limitrophes, ont chaussé leurs bottes pour se prêter au jeu de la visite guidée. Conduits par une petite équipe d'animateurs passionnés et passionnants, ils ont arpenté les zones (très) humides de l'Herretang jusqu'au site de la Tuilerie, se faisant conter les merveilles à portée d'œil.

Ruses de pie-grièche

Sur cet arbuste épineux, on imagine les ruses et le lardoir de monsieur pie-grièche écorcheur à la conquête de madame. Au-delà, on apprend que les prairies humides sont entretenues par des chevaux de Camargue et de jeunes génisses locales grâce à un savant pâturage tournant. Les animateurs nature expliquent comment la biodiversité du site est préservée, voire améliorée, grâce à un partenariat avec les « usagers », agriculteurs et sylviculteurs.

Rousserolles et libellules

La balade repart. A droite, un ancien canal de drainage se faufile entre les saules, les viornes obier et les érables sur le tronc desquels s'entortille le houblon sauvage. Le sentier rejoint une digue séparant le canal de l'Herretang de son contre-canal. Un colvert s'envole, les truites filent dans le courant. Un peu plus loin, l'ancienne tourbière, remise en eau en 1996, a laissé place à un plan d'eau peuplé de libellules, de rousseroles et de nénuphars, de perches et de gardons, apparemment indifférents au concert des grenouilles rieuses. Perché sur un tronc mort, un cormoran offre ses ailes aux rayons du soleil pour les faire sécher. Spectacle simple et tranquille, que l'on prend le temps de savourer, à l'abri d'un observatoire en bois tout neuf, juché sur pilotis.

Contre-coup du confinement

En encadrant de telles sorties, les animateurs sont plus que des guides nature. Ils font comprendre aux visiteurs l'intérêt de l'observation, toucher du doigt une « biodiversité » qui a pris beaucoup de place dans le discours politique, mais peu dans le tumulte des vies quotidiennes. D'où le slogan de la campagne 2021 : « Connaître, c'est déjà agir ! »

L'environnement, c'est l'affaire de tous

Cette année, leur travail de médiation va sans doute prendre un tour singulier. Car après des mois de confinements à répétition, certains réflexes, pour peu qu'ils existent, auront peut-être été oubliés. « Si l'on veut que l'environnement soit l'affaire de tous, il faut éduquer les gens, a rappelé le président du conseil départemental, Jean-Pierre Barbier, aux animateurs à l'issue de la balade dans les tourbières. Accueillir plus de 15 000 personnes chaque année dans les espaces naturels sensibles, c'est un vrai challenge. Il faut savoir faire de la médiation, pour que les gens repartent avec l'envie de protéger l'environnement. Après le confinement, les gens ont besoin de s'échapper, mais il faut aussi les encadrer : la nature doit être respectée partout où elle est. »

Maîtriser l'affluence

Pour ce qui est des animateurs, pas de problème : ils sont rôdés. L'inquiétude vient plutôt de l'affluence et de ses conséquences sur ces espaces patrimoniaux extrêmement fragiles. « Les gens ont besoin de sortir, de s'aérer, confie Fabien Mulyk. Mais on voit passer un public qui n'est pas forcément initié. » Un peu comme dans les alpages l'an dernier…

Marianne Boilève