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Patrick Bénézit : « Trop tôt pour dire si cette réforme est adaptée à nos zones ou pas »

A l'issue d'un Conseil supérieur d'orientation (CSO) tenu au ministère de l'Agriculture le 21 mai, Julien Denormandie a présenté les grandes lignes de la déclinaison française de la Pac, le Plan stratégique national (PSN). Les réactions de Patrick Bénézit, président de la FRSEA Massif central et de la Copamac.

Patrick Bénézit : « Trop tôt pour dire si cette réforme est adaptée à nos zones ou pas »
Patrick Bénézit estime, qu’à ce stade, de grandes inconnues subsistent sur la déclinaison française de la Pac. ©SC

Le ministre de l'Agriculture a tenu vendredi 21 mai une conférence de presse sur les orientations du Plan stratégique national, feuille de route française de la politique agricole commune de 2023 à 2027. Ces annonces, attendues depuis plusieurs semaines déjà, répondent selon Julien Denormandie « à une vision politique tournée vers la souveraineté agroalimentaire du pays ». Dans le détail, il n’y aura pas d’augmentation du transfert de fonds du premier pilier de la Pac vers le second. Le paiement redistributif reste à 10 % sur la base des 52 premiers hectares. Sur la convergence des DPB (droits à paiement de base), elle va se poursuivre, de 70 % aujourd’hui, elle devrait atteindre 85 % en 2027 avec un plafond de perte de 30 %. Pour maintenir l’enveloppe d’1,1 milliard d’euros dédiée aux ICHN (indemnité compensatoire de handicaps naturels), l’État français va abonder le budget de 108 millions d’euros par an sur toute la période. Le paiement JA est établi à 1,5 %. Une aide couplée au maraîchage dotée de 10 millions d’euros va être créée, tandis que l’enveloppe dédiée au bio va passer de 262 à 340 millions d’euros, sans toutefois rétablir l’aide au maintien. Objectif : atteindre 18 % de la SAU en bio d’ici 2027. Julien Denormandie a également annoncé une enveloppe de 30 millions d’euros pour les zones défavorisées, zones intermédiaires en tête, dont les contours restent toutefois à affiner.

Fusion des aides laitière et allaitante

Sur le premier pilier, un transfert progressif sera bien opéré des aides animales (bovines, ovines, caprines) vers les protéines végétales dont le budget va doubler d'ici à la fin de la période. Par ailleurs, l'instauration d'aides couplées animales à l'UGB a été actée. « Les critères et modalités restent à définir en concertation avec la FNB et la FNPL », a précisé le ministre. Cette aide à l'UGB fusionnera les aides laitière et allaitante actuelles. Du fait du transfert, elle perdra « 17 millions d’euros par an », soit « entre 3 et 4 % de ces aides », selon le ministre. Au sein de cette aide bovine rénovée, un « soutien particulier sera accordé aux laitiers » de « quelques dizaines de milliers d'euros », au motif qu'ils seront par ailleurs perdants dans le mécanisme de convergence des aides découplées.

Inquiétudes

« L’ICHN est préservée, quand bien même une revalorisation était demandée », analyse, Patrick Bénézit, président de la FRSEA Massif central et de la Copamac, qui appelle à la plus grande vigilance s’agissant des modalités qui vont accompagner le transfert progressif d’une partie des aides couplées animales vers les protéines végétales. Un transfert que la mobilisation massive et répétée des éleveurs des massifs depuis le début de l’année n’a pu empêcher et qui suscite l’inquiétude, même si le ministre a laissé une porte ouverte aux éleveurs. « Les mélanges graminées-légumineuses pourraient avoir accès à l’aide couplée aux protéines végétales, mais nous ignorons encore les critères qui y seront associés et si les éleveurs pourront en bénéficier ou pas », indique le responsable cantalien. De même, les modalités de l’aide couplée à l’UGB bovine ne sont pas calées. « À ce stade, il est donc difficile de dire si cette réforme sera adaptée ou pas à nos zones difficiles. Nous restons très inquiets car selon les premières données que nous avons, ce serait 100 millions de l’élevage qui partiraient vers la protéine végétale en fin de réforme. D’où l’intérêt de rester très mobilisés », affiche Patrick Bénézit, qui prend acte par ailleurs d’un paiement redistributif inchangé et d’une convergence certes majorée, « mais pas poussée à son maximum ».

Sophie Chatenet et Patricia Olivieri