INTERVIEW
« Nous ne céderons pas à la stratégie d’usure »

Les agriculteurs s’impatientent face aux promesses du gouvernement qui tardent à se concrétiser. Jocelyn Dubost, président de Jeunes agriculteurs Auvergne-Rhône-Alpes appelle à ce que « les portes des chantiers ouverts se referment vite sur du concret ». Interview.

« Nous ne céderons pas à la stratégie d’usure »
« L’État, a-t-il encore les moyens de ses ambitions ? », s’interroge le président de Jeunes agriculteurs Aura, Jocelyn Dubost. ©AA

Dans un communiqué de presse commun avec la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, Jeunes agriculteurs (JA) déplore que la simplification administrative soit au point mort. Quel est votre sentiment face aux promesses de l’État qui ne se concrétisent pas ?

Jocelyn Dubost : « Aujourd’hui, malgré toutes les belles promesses autour de la simplification administrative, nous ne sommes nulle part. Il a été demandé à la profession agricole, ainsi qu’aux services administratifs, de faire remonter leurs attentes face à ce chantier. Nous l’avons fait et aujourd’hui tout est comme avant. Pour exemple, je citerai l’arrêté ministériel du 14 mars dernier concernant la taille des haies et notamment les demandes de dérogations. Dans ce cas précis, on se demande où se trouve la simplification. Nous en sommes toujours au même point. »

Dans ce même communiqué, vous indiquez, qu’aucune piste n’est encore évoquée pour libérer les moyens de production. Qu’entendez-vous par là ?

J. D. : « Nous n’avons en effet pas vu grand-chose bouger concernant la protection des cultures, le développement de la ressource en eau ou encore l’arrêt de toutes surtranspositions comme la loi Agec ou encore la protection des troupeaux face à la prédation. Aujourd’hui, beaucoup de chantiers sont ouverts, mais peu aboutissent. Nous sommes en droit de nous interroger de savoir si l’État a encore les moyens de ses ambitions ou si une stratégie d’usure est mise en place. Il est urgent que les portes des chantiers se referment aujourd’hui sur du concret. Aujourd’hui, nous n’avons que très peu de retours sur nos demandes. »

La loi d’orientation agricole (LOA) sera présentée demain, vendredi 29 mars, au Conseil des ministres. Certaines avancées sont pressenties. Qu’attendez-vous de cette loi ?

J. D. : « J’ai longtemps nourri de nombreux espoirs concernant cette loi malgré l’appel à vigilance de mes aînés qui en avait connu d’autres avant moi. Aujourd’hui, je suis beaucoup plus prudent et très curieux de voir ce qui va être annoncé, même si quelques mesures ont déjà fuité, j’attends de voir réellement ce qui en ressortira. J’espère que le projet ne va pas accoucher d’une souris. Pour la FRSEA et JA, les grandes lacunes du projet de loi d’orientation agricole (PLOA) traduisent le manque d’ambition du président de la République et du gouvernement pour l’agriculture française et la souveraineté alimentaire de notre nation. Si tel était le cas et après un travail d’analyse, nous devrons aller à la rencontre des parlementaires pour défendre notre avenir. »

Comment s’annonce la suite des mobilisations ?

J. D. : « Tout va dépendre de l’avancée des chantiers. Les propositions des réseaux FNSEA et Jeunes Agriculteurs sont toujours sur la table. Il est encore temps pour le président de la République et le gouvernement de changer de cap, de sortir de l’ornière de la décroissance et d’agir enfin, dans l’intérêt de l’agriculture française. Le temps passe et nous n’avons pas la volonté de céder à la stratégie d’usure qui est mise en place. Si les choses n’avancent pas, des actions seront conduites. Nous devons continuer à nous faire entendre. »

Propos recueillis par Marie-Cécile Seigle-Buyat