Montagne
Pas de montagne sans ses acteurs

Isabelle Doucet
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La ministre de la Cohésion des territoires en charge de la ruralité, Dominique Faure, était présente au le salon Mountain planet de Grenoble. Elle a défendu le dossier de l’Alpe-du-Grand-Serre.

Pas de montagne sans ses acteurs
La montagne, une affaire d’État au salon Mountain planet.

Pas d’écologie sans économie. Dominique Faure, la ministre de la Cohésion des territoires en charge des Collectivités territorailes et de la Ruralité, a adressé un message fort aux acteurs économiques et politiques de la montagne, lors de la 50e édition du Salon Mountain planet, qui s’est déroulé à Grenoble du 16 au 18 avril.
Pour appuyer son propos elle a affirmé tout son soutien au projet d’ascenseur valléen de l’Alpe-du-Grand-Serre, la station de moyenne montagne de Matheysine, qui cherche des financements pour son projet quatre saisons.
« Nous faisons face à deux enjeux : soutenir l’économie de la neige et soutenir la transition écologique », explique la ministre.


Dominique Faure, ministre d ela Cohésion des territoires et de la ruralité

À l’unisson des acteurs de la montagne, elle déclare que certes « d’ici 2030, la neige va se réduire, les saisons vont raccourcir, mais il y aura encore de belles journées ».
Et s’il convient « de ne pas tout faire reposer sur la neige », ce sont « les 25 % des communes de montagne et les 18 % de Français qui vivent en zone de massif qui peuvent le mieux parler de ce monde en transition ; un écosystème fragile et magnifique ».
La ministre a cité l’ensemble des aides mobilisables au profit de la montagne, à commencer par le Fonds avenir montagne (331 M € depuis 2021) ou le plan France ruralité (30 M € qui peuvent être mobilisés pour le dernier km), mais aussi les aides complémentaires issues des fonds européens etc.

Décarboner, isoler

« Là où il n’y a pas de vie, il n’y a pas d’écologie », a renchéri Jean-Luc Boch, président de l’association nationale des maires de stations de montagne.
Il a souligné combien « les plans neige successifs ont permis à des milliers de personnes de vivre sur le territoire de montagne ».
Il ajoute : « S’il n’y a pas de travail, les gens ne restent pas dans les territoires et il n’y a pas de capacité à les faire fonctionner et se développer ». Face au changement climatique et à la nécessité de « changer de paradigme », il fixe deux priorités : décarboner les mobilités et isoler les bâtiments.
Alexandre Maulin, président de Domaines skiables de France, s’est quant à lui ému du rapport de la Cour des comptes, paru début février, intitulé « Les stations de montagne face au changement climatique ».
« Nous ne sommes pas des pompes à argent public mais contribuons au développement harmonieux des territoires », assène-t-il.
« Depuis 100 ans, il y a parfois eu des erreurs d’aménagement, mais nous avons permis d’arrêter l’exode rural et à des territoires pauvres de devenir riches. De plus, l’économie du ski vient tirer l’industrie et le secteur tertiaire du piémont. Il reste encore quelques décennies pour faire du ski et accompagner le développement économique et social de ces territoires. »
C’est cette idée de « préparer le terrain pour demain », qu’a fait valoir Fabrice Pannekoucke, vice-président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes délégué à l’agriculture et aux espaces valléens.
Le changement et l’adaptation coûteront cher et « le moteur économique est d’abord l’activité hivernale et le ski », rappelle l’élu régional.
La diversification s’appuiera sur cet « héritage exceptionnel de la nature et de la pente où l’on peut encore inventer des choses au service de ce que nous devons à la biodiversité et pour accompagner les territoires et ceux qui les habitent ».
Fabrice Pannekoucke demande « une reconnaissance de l’État de l’action des acteurs de montagne », à commencer par des procédures allégées. Il réclame aussi que ces territoires soient considérés comme « vivants et habités ».

Besoins en ingénierie

Joël Giraud, député des Hautes-Alpes et ancien ministre, s’est emparé de ces questions dans un rapport sur la montagne française.
Son cadre : « Avoir une vision à l’horizon 2030 » et « l’inscrire dans un plan national d’action face au réchauffement climatique ».
Premier constat : « Les territoires ont besoin de beaucoup d’ingénierie et pas que de l’investissement ». Le rapporteur pointe aussi la « spirale infernale » de la question de la réhabilitation des logements de montagne. Il réclame des « mesures publiques d’incitation » et plaide pour transformer ces appartements redevenus habitables en logements permanents.
Concernant la mobilité, le député souligne l’importance « d’amener les gens jusqu’au bout » et d’avoir « des trains fiables ».
Enfin, il avance trois qualifications de stations : celles qui vont fermer et qu’il faut aider ; celles qui conserveront une partie de leur domaine skiable et celles qui continueront.
Pour les premières, il propose un abandon de dette mais aussi la reconstruction d’une économie basée sur d’autres ressources, comme les filières bois et agroalimentaires. Enfin, s’adressant aux collectivités, il plaide pour une solidarité aval-amont.
« La montagne est par essence un territoire qui réclame du sur-mesure », a reconnu la ministre Dominique Faure, incitant les élus à se rapprocher des spécialistes de la montagne à l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT).

Isabelle Doucet

Un ascenseur valléen pour l’Alpe-du-Grand-Serre
Dominique Faure, ministre de la Cohésion des territoires, en charge des Collectivités territoriales et de la ruralité.

Un ascenseur valléen pour l’Alpe-du-Grand-Serre

À la recherche de financements pour boucler son projet d’aménagement, la station de ski de L’Alpe-du-Grand-Serre a trouvé le soutien de la ministre.

Un ascenseur valléen pour sortir la station de L’Alpe-du-Grand-Serre de son ornière économique : c’est l’idée qui a été entérinée lors de la rencontre organisée entre la ministre de la Ruralité Dominique Faure et les acteurs partie prenante du projet de diversification de la station, le 18 avril, en marge du salon Mountain planet. 
« Nous avons engagé un travail pour finaliser l’ingénierie. Nous allons trouver des financements ensemble », a assuré la ministre qui a promis de revenir dans un mois. Elle propose de lancer un projet expérimental, propre à la moyenne montagne.
« C’est un projet simple, pour skier et pour les amoureux de la montagne qui pourront accéder à tous les loisirs à 1 700 m d’altitude. » Si le modèle est encore en cours de définition, la ministre s’est engagée à trouver des solutions.
Il manque 7 millions d’euros sur un budget total estimé à 24 millions d’euros. Dominique Faure propose de recourir à des fonds européens et d’interpeller la banque des territoires.
« Il y a de la souffrance dans cette vallée et j’ai une envie féroce de les aider. » Elle préconise une approche globale du fonctionnement du village et de la station et se félicite que d’autres aménagements pour le tourisme quatre saisons soient prévus autour de l’ascenseur valléen.
Par ailleurs, elle mentionne que le site a toutes les chances d’être pourvu de neige d’ici 20 à 30 ans et qu’il est situé à moins de 50 minutes de Grenoble.

Pluriactivité

La députée du secteur, Marie-Noëlle Battistel, ne cachait pas sa joie de voir aboutir un projet qu’elle porte depuis plus de deux ans et au prix d’échanges réguliers avec la ministre et son cabinet.
« Cela permet de démanteler l’essentiel des remontées mécaniques, de rendre l’espace vierge, de préparer durablement l’avenir avec une offre touristique adaptée et de régler le problème de la surfréquentation du Taillefer, indique-t-elle. En tant qu’îlot de fraîcheur à proximité de Grenoble, le projet a même reçu le soutien du maire de la ville centre. »
La députée insiste sur l’urgence humaine à retrouver une rentabilité à la station car c’est toute une économie qui est aujourd’hui déstabilisée, donc la vie d’un territoire.
« La pluriactivité est typique de l’Alpe-du-Grand-Serre », rappelle-t-elle. Elle indique que dans la vallée de la Roizonne, pas moins de 17 agriculteurs vivent dans l’incertitude quant à l’équilibre économique de leurs exploitations.
À l’image de l’éleveur de brebis Cédric Fraux, président de l’association La Morte Vivante, qui tire 70 % de ses revenus de ses activités de moniteur de ski. Ce sont aussi des centres de vacances qui ne peuvent plus répondre à des appels d’offres et des commerces qui vivotent.
« Je crois en ce projet d’ouverture estivale, qui permettra d’augmenter le chiffre d’affaires de la station », déclare Marie-Noëlle Battistel. Elle ajoute : « Le bonus, c’est la qualification d’ascenseur valléen qui change les perspectives de financement ».
Le principe : partir en chaussures de ville vers un espace aménagé, accessible à tout public, en toutes saisons. Le projet s’appellera Alpe-du-Grand-Serre 2050. « Nous n’avons jamais eu de signaux aussi positifs », s’enthousiasme la députée.
ID