Sécheresse
Une intensité particulière en Isère

La moyenne des pluies utiles sur les six derniers mois n'est pas alarmante. Mais mieux regardée sur les trois derniers mois, la situation apparaît très différente.
Une intensité particulière en Isère

Les cartes-bilans de méteo France concernant « l'hiver » englobent souvent la fin de l'année civile (octobre-novembre décembre) avec le début de l'année suivante. On cumule ainsi des mois très arrosés (automne) avec des mois traditionnellement peu pluvieux dans la Drôme et l'Isère (janvier février). Les bilans hydriques sur ces 6 mois d'hiver ne sont ainsi pas alarmants.
Pourtant en 2020, encore plus qu'en 2019, de nombreux éleveurs de ces deux départements souffrent de la sécheresse.

 

Voir aussi le tour de plaine et les témoignages des agriculteurs (éleveurs ou céréaliers) face à la l'impact sur les productions végétales


L'étude de 23 stations méteo pour le bulletin pâtur'RA permet de suivre trois facteurs essentiels quant aux sécheresses : la pluviométrie, la température moyenne et l'ETP qui en résulte (ETP = évapotranspiration potentielle, le besoin en eau des plantes). Pour évaluer l'intensité de la sécheresse,  les techniciens suivent chaque semaine l'évolution du déficit hydrique, le bilan pluies moins ETP. Le cumul semaine après semaine de ce déficit rend mieux compte de l'intensité de la sécheresse.
Quand le déficit cumulé dépasse 100 mm, sur les sols superficiels à faible réserve utile (40 mm) les plantes prairiales souffrent du sec. Sur un sol profond argileux riche en matière organique, la prairie produit encore.
La comparaison des quatre premiers mois de l'année montre une évolution marquée entre 2019 et 2020 : le déficit hydrique cumulé fin avril apparaît dans 4 territoires : plaine /piémont / voironnais et montagne de la Drôme. L'excédent de pluie a baissé aussi de + 100 mm en montagne iséroise.

 

Presque 1 degré de plus par jour

 

En comparant 2019 et 2020, on s'aperçoit que le cumul de températures depuis le 1er février a augmenté de 60 à 80° selon les territoires. Cette hausse de la température moyenne correspond à un gain de +0,7 à +1°C par jour du 1° février au 26 avril ! D'après les données Météo France, l'ETP est stable en plaine et piémont. Elle augmente davantage en montagne.

Les pluies par contre ont été très très faibles début 2020 sur l'ensemble des stations : pour cinq territoires on a perdu 100 à 150 mm sur les quatre premiers mois de l'année et ce alors que début 2019 était déjà une année sèche.

En cumulant ETP forte et pluies très faibles, le déficit hydrique résultant s'accentue très fortement.

Sur le graphique ci-dessous, on s'aperçoit de la remontée vers le nord et l'est du déficit hydrique précoce : fin avril, piémont 2020 a un déficit du même ordre que plaine/vallée du Rhône 2019, Voironnais 2020 a un déficit proche de Piémont 2019.

 


Cette remontée du climat méditerranéen sur les deux départements correspond tout à fait aux prévisions annoncées dans Climfourel par l'Inra de Montpellier mais cette remontée est plus rapide que prévue : les secteurs qui étaient épargnés par la sécheresse jusqu'à maintenant, la découvre et les élevages s'en trouve d'autant plus impactés que leur système fourrager est peu diversifié et que leur chargement est élevé.

Concernant le déficit en plaine-Vallée du Rhône, à de tels niveaux en avril, l'irrigation est indispensable : les céréales, des méteils, des prairies multi-espèces ont été arrosés en avril 2020 !

Jean Pierre Manteaux
Chambre d'Agriculture de la Drôme et de l'Isère
06 22 42 53 88