Autonomie
Aide à domicile, un métier d'engagement, un métier « essentiel »

Isabelle Brenguier
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Les aides à domicile jouent un rôle fondamental pour le maintien à domicile des personnes âgées. Il gagnerait à être davantage reconnu pour faire face à une demande de plus en plus forte.

Aide à domicile, un métier d'engagement, un métier « essentiel »
Crédit photo : Fédération départementale de l'ADMR de l'Isère. Les aides à domicile sont aux côtés des personnes âgées pour les accompagner dans l'ensemble des tâches du quotidien.

Quand elles débutent leur journée de travail entre 7 heures et 7 heures et demi, Sandra Roux-Bernard et Myriam Simian-Buissonnet savent déjà qu'elle sera bien remplie, rythmées par les nombreuses interventions qu'elles effectueront chez les personnes âgées des environs de Vinay, dans le Sud-Grésivaudan.

Aides à domicile au sein de l'ADMR * de Vinay, Sandra Roux-Bernard et Myriam Simian-Buissonnet sont présentes pour les accompagner à réaliser toutes les tâches du quotidien.
Elles commencent par des aides au lever, à la toilette, au petit déjeuner, à la prise des médicaments... Elles enchaînent par des heures de ménage et en fin de matinée par la préparation des repas.
L'après-midi, elles poursuivent avec d'autres interventions de ménage, d'administratif, ou alors elles conduisent les dames ou les messieurs chez le médecin, chez le coiffeur, ou faire leurs courses. Elles sont aussi présentes le soir pour aider aux toilettes, au dîner et au coucher.

Toute la journée, elles multiplient les interventions et sillonnent les petites routes des coteaux, faisant des kilomètres et des kilomètres, restant une demi-heure ici, une heure là, deux heures ailleurs. « Nous ne sommes pas « que » des femmes de ménage. Nous entrons dans la vie privée, intime, des personnes chez qui nous allons. Nous établissons une relation de confiance avec elles et avec leurs proches. Nous créons du lien. Nous avons une place à prendre dans cette aide et nous devons y rester », explique ainsi Sandra Roux-Bernard.

Plus qu'un rayon de soleil

Toutes deux exercent leur métier avec plaisir. Avec passion,même. C'est pourtant un travail qui s'avère parfois difficile, tant au niveau physique qu'au niveau moral.
« On nous dit bien qu'il ne faut pas nous attacher mais ce n'est pas facile quand on va trois fois par jour, sept jours sur sept chez quelqu'un. Pourtant, c'est vrai, il faut faire la part des choses », reconnaissent-elles.
« Pendant les confinements, nous avons vécu des moments très forts. Nous avons dû expliquer, et rassurer pour ne pas alarmer plus que ne le faisaient les médias. Et comme les familles ne pouvaient plus aller voir leurs aînés, nos visites étaient souvent les seules qu'ils recevaient. Nous étions plus que leur rayon de soleil », précise Sandra Roux-Bernard.
Pendant cette période, elles ne se sont pas arrêtées. Elles ont pris les précautions nécessaires, mais ont continué leur activité et se rendaient même chez les personnes malades. Myriam Simian-Buissonnet a d'ailleurs eu trois fois la covid...
Elles considèrent que leur travail est « très enrichissant » et qu'il leur apporte et leur apprend beaucoup. Il est souvent très gratifiant. Mais pas toujours.
Surtout, elles estiment qu'il n'est pas reconnu à sa juste valeur.

Manque d'attractivité

Le métier d'aide à domicile est pourtant « essentiel ». Le mot est choisi.
Sans Sandra Roux-Bernard et Myriam Simian-Buissonnet, sans tous ces professionnels qui exercent ce métier d'engagement, de nombreuses personnes ne pourraient rester chez elles. Alors que c'est leur souhait. Alors que cette volonté des aînés de rester dans leur maison, dans leur environnement, est de plus en plus marquée.
La crise sanitaire est passée par là. Du coup, la nature de la prise en charge évolue.
Pour être au plus près des besoins, l'ADMR propose régulièrement à ses salariés de se former. « Nous ne rencontrons plus de personnes en attente d'une entrée en Ehpad. Les gens veulent rester chez elles jusqu'au bout. Du coup, les dossiers sont plus lourds. Et l'enjeu pour les années à venir s'avère de plus en plus préoccupant. D'autant que le métier souffre d'un manque d'attractivité », assure Gérard Quinquinet, président de la Fédération départementale des ADMR de l'Isère.

Emploi de proximité

« Il faut que les pouvoirs publics reconnaissent que c'est un vrai métier qui mérite d'être davantage reconnu. Les salaires attribués doivent aussi être réévalués », ajoute Pierre-François Dumas, le directeur de la structure, qui déplore ne pas avoir entendu les candidats à l'élection présidentielle s'exprimer sur le sujet.
Car le constat est clair. En matière d'aide à la personne, le recrutement est compliqué. Tous les dirigeants de Services d'aides à domicile (Saad) l'attestent. 

Responsable de l'association mandataire « Aides à domicile » de Voiron, Véronique Allibert reconnaît être tout le temps en recherche de personnel.
« Nous faisons en sorte que les deux parties trouvent leur compte, que chacun soit dans les meilleures conditions », assure-t-elle.
Pour elle, le métier offre des perspectives dans la mesure où, même s'il a des contraintes, il peut s'adapter à différents profils. Car c'est un secteur d'activité qui offre le choix entre le temps partiel et le temps plein.
Les recruteurs proposent des interventions au plus près des domiciles des salariés, de façon à leur éviter de perdre du temps en trajet. Il peut donc convenir à des personnes à la recherche d'un emploi de proximité et d'un complément de revenu. 

Des femmes et des hommes

Véronique Allibert et Pierre-François Dumas expliquent que c'est un métier dans lequel le relationnel est très important, qu'il faut faire preuve de savoir-faire et surtout de savoir-être.
« Nous comptons sur les personnes que nous engageons. Nous leur faisons confiance. Il va de soi qu'elles doivent être honnêtes, discrètes, autonomes, organisées et qu'elles doivent savoir s'adapter aux personnes chez qui elles interviennent », assure Véronique Allibert.
Et contrairement aux idées reçues, même s'il compte de nombreuses femmes dans ses rangs, il peut aussi bien être exercé par les hommes. 

Isabelle Brenguier

* Aide à domicile en milieu rural

28 680 personnes aidées au titre de l'APA
Crédit photo : F. Pattou. Isèremag Le Département joue un rôle important pour le maintien des personnes âgées à domicile.

28 680 personnes aidées au titre de l'APA

En tant que chef de file de l'action sociale du territoire, le Département de l'Isère est impliqué pour favoriser - et financer - le maintien des personnes âgés à domicile.

 

Le maintien à domicile des personnes âgées se pose comme un enjeu de société majeur. Il va certainement prendre encore plus d'ampleur puisque les personnes vieillissantes ont déjà montré leur volonté renforcée de rester chez elles le plus longtemps possible.

Pour intervenir chez des personnes âgées ou des personnes handicapées au titre de l’aide à la personne, les services d’aide à domicile doivent être agrées par le Département. 130 sont ainsi répertoriés. Dans de nombreux cas, le financement est aidé.
« L'APA (allocation personnalisée d'autonomie), est une aide qui peut être octroyée à toutes les personnes âgées de plus de 60 ans, dont la perte d'autonomie justifie qu'elles soient aidées dans les actes essentiels de la vie quotidienne. 28 680 personnes en sont aujourd'hui bénéficiaires en Isère, dont 73 % pour une aide au maintien à domicile », explique Delphine Hartmann, vice-présidente du Département de l'Isère, en charge de l'autonomie et des handicaps.
Cette aide peut aussi être utilisée pour le financement d'un aménagement du logement, mais aussi pour des portages de repas, des soins à domicile, ou l'installation de téléalarme ou de téléassistance.
Pour bénéficier de l'APA, la personne doit remplir un dossier (disponible sur le site Internet du Département ou dans les maisons de territoire). 

Montrer la valeur ajoutée des métiers

Pour faire face au manque de salariés qui touche le secteur, le Département s'engage pour « redorer » la profession.
« Au delà de la revalorisation financière qui est indispensable mais pas suffisante, nous cherchons à redonner du sens et de la qualité de travail. C'est pourquoi, nous organisons des ateliers de rencontre pour influer sur les orientations professionnelles des jeunes, pour leur montrer la valeur ajoutée de ces métiers. C'est une question dont le Département s'est emparée mais qui doit être travaillée avec l'ensemble des acteurs du secteur », assure Delphine Hartmann.

IB

 

Différents services

En Isère, il existe de nombreux services employeurs d'aides à domicile, d'assistants ou d'auxiliaires de vie, qui contribuent au maintien à domicile des personnes âgées, dans de bonnes conditions et sans qu'elles ne se mettent en danger.

Les interventions peuvent se faire sous différentes formes. Soit les personnes assurent elles-même le recrutement. Soit elles font appel à un prestataire, une association ou une entreprise qui s'occupe de l'ensemble des formalités liées à l'embauche. Soit elles choisissent la solution du mandataire, une formule intermédiaire entre l’emploi direct d’un salarié et le recours à un service prestataire facturé.

Un avenant attendu

Reconnus trop bas, les salaires perçus dans la branche de l'aide à domicile ont été revus à la hausse grâce à la mise en œuvre de l'avenant 43, relatif aux rémunérations du secteur.
Entré en vigueur le 1er octobre 2021, il apporte une plus forte revalorisation des emplois et des rémunérations dans la branche depuis 2002. Par exemple, pour une rémunération de base d'un salarié de catégorie A (agent à domicile) sans ancienneté, le salaire passe de 1 539 euros à 1 573 €. 

Il rend plus attractifs les métiers de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile en les adaptant à l’évolution des activités et en facilitant les parcours professionnels.