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A nous d'être entrepreneurs !

Jérôme Crozat, secrétaire général de la FDSEA, à la veille du conseil fédéral sur la construction de filières rémunératrices qui se déroulera le 18 décembre à La Frette.
A nous d'être entrepreneurs !

Ce conseil fédéral marque un temps fort de la vie syndicale. Quelle orientation souhaitez-vous lui donner ?

Ce conseil fédéral donne suite au travail réalisé dans le cadre des Assises de l'alimentation par la FDSEA et partagé par le conseil agricole départemental, mais aussi par le Cerfrance et des organismes techniques qui ont un rôle à jouer auprès des agriculteurs.
Nous souhaitons attirer l'attention sur le fait que la prochaine loi d'orientation parle beaucoup des petites filières, mais que les grandes filières risquent d'en être absentes. Or, d'un point de vue économique, ce secteur est à la peine.
C'est pourquoi nous voulons dresser un bilan départemental. L'analyse de ces filières nous permettra d'identifier les éléments favorables et les contraintes, pour chercher la valeur ajoutée dans chacune d'elles.
Si nous voulions donner un nom à ce conseil fédéral, ce serait A la poursuite de la valeur ajoutée agricole dans notre département.

Comment ces sujets seront-ils traités ?

Nous les aborderons en deux phases correspondant à deux grandes productions.
Pour les productions végétales, nous avons invité un expert, Daniel Peyraube, agriculteur dans les Landes et président de l'AGPM, pour traiter de l'avenir de certaines grandes cultures, notamment du maïs.
A noter que dans les Landes, un tiers du maïs produit est consommé localement via la filière avicole. En région, la coopérative Dauphinoise développe sa propre filière avicole sur le segment des poules pondeuses.
Il y a donc un intérêt à faire que les céréales produites soient consommées sur place, en partenariat avec les opérateurs privés ou les coopératives. Ce qui permettrait aux agriculteurs de retrouver un revenu adéquat.

Sur l'autre segment, c'est-à-dire la filière animale, nous organisons une table ronde pour débattre de l'énorme problème de la filière lait.
Sont invités Jean-Robin Brosse, président de l'OP Danone, Jean-Michel Bouchard, président de l'OP saint-marcellin et Jean-Paul Picquendar, directeur de Sodiaal.

 

Quel est votre analyse de la filière lait ?

L'avantage de l'Isère est de produire un lait qui peut être valorisé sous label de qualité.
Mais si l'on prend l'exemple du saint-marcellin, il n'y a pas de réel retour de la valeur ajoutée au producteur.
C'est pourquoi nous avançons l'idée de reprendre le lait pour le transformer nous-mêmes. Nous pouvons nous appuyer pour cela sur le pôle agroalimentaire. A nous d'être entrepreneurs !

Nous souhaiterions retrouver un système plus collégial, de type fruitière, où vraiment le producteur est décideur.
Nous pouvons finaliser cela en mettant en place des contractualisations. Et s'il est nécessaire d'investir pour transformer 5 à 10 millions de litres de lait en Isère, nous comptons aussi sur les collectivités.
Il est important que les producteurs ne soient plus seulement des producteurs de matière première, mais se positionnent en amont et en aval de ce qu'ils produisent, qu'ils se réapproprient la filière, décident ce qu'ils veulent faire de leur produit et de ce qu'ils autorisent à mettre dedans.

C'est aussi une question d'image ?

Nous produisons des choses nobles et l'on s'aperçoit que des transformateurs ajoutent beaucoup d'ingrédients sans nous demander notre avis, alors que les premiers mis sur le banc des accusés sont les agriculteurs. Nous ne sommes plus des producteurs de minerai.
Et le consommateur est dans l'attente de produits plus vrais et de traçabilité. C'est pourquoi nous nous sommes fixés un cahier des charges avec la Charte des bonnes pratiques.

Les agriculteurs sont-ils prêts à se mobiliser ?

C'est un débat que nous portons : il est possible de dégager encore de la valeur ajoutée, un revenu supplémentaire.
Les Assises sont le point de départ de cette dynamique, mais la question mérite d'être posée. Peut-on partir ensemble ?
Il faut que tout le monde comprennent les différents enjeux qui sous-tendent les filières et ne pas laisser passer le train.
A ce titre, la FDSEA peut être porteuse de solutions, notamment dans l'accompagnement de la main-d'oeuvre. Mais il faut avant tout se parler plutôt que de s'ignorer.
Notre chance est de disposer d'un pôle de consommateurs de six millions de personnes en Rhône-Alpes. Il faut en profiter.

Propos recueillis pas Isabelle Doucet