Apprieu : le méthaniseur met les gaz

Des champs et des cultures à perte de vue. Le paysage de la plaine agricole de la Bièvre est ponctué ça et là par quelques grands arbres derrière lesquels viendra bientôt se glisser le premier méthaniseur de l'Isère. « C'est un projet agricole », insiste Lionel Thermoz-Bajat, le président de la structure Méthanisère qui porte le projet.
Cette fois-ci, les 14 agriculteurs associés qui portent l'entreprise se montrent confiants.
Le terrain de 1,5 hectare qui recevra l'unité de méthanisation a même été ceint d'une clôture qui matérialise le futur chantier et le sécurise puisque des études de sols ont déjà été menées. Un signe fort. « On avance », reprend le porteur de projet en répétant : « le terrain appartient à Méthanisère. »
Pas d'enquête publique
Le futur méthaniseur a donc réussi à s'affranchir de presque tous les écueils qui se sont présentés à lui.
Le dossier ICPE a été déposé le 28 juin dernier. Il est en cours d'instruction, la Dréal a quatre mois pour donner sa réponse. Il sera ensuite soumis à une consultation publique en mairie.
« Le plan d'épandage a été réalisé par la chambre d'agriculture de façon à ce qu'il corresponde aux exigences de la législation des installations classées », reprend Lionel Thermoz-Bajat.
Idem pour l'Ademe, le dossier de demande de subvention a été remis le 1er septembre dernier. Les aides peuvent couvrir 30 à 40% de l'investissement qui s'élève à 4,5 millions d'euros.
« Le permis de construire a été délivré par la préfecture il y a un an », reprend le porteur de projet. Tous les recours ne sont pas purgés, mais les embûches semblent bien se lever du côté d'Apprieu.
« Le 21 août dernier, lors du comice de Châbons, nous avons discuté avec Jean-Pierre Barbier, président du Conseil départemental et Didier Rambaud, président de Bièvre Est et conseiller départemental. Ils nous ont confirmé que l'enquête publique n'était pas obligatoire dès lors que notre projet est dans les clous. »
En effet, le dossier ICPE fait l'objet d'une procédure d'enregistrement, régime intermédiaire d'autorisation simplifiée pour les projets de sensibilité environnementale. Dans ce cas, l'enquête publique n'est pas forcément requise.
« Sinon, ce serait une catastrophe, estime l'agriculteur. Nous aurions à supporter un coût d'environ 50 000 euros supplémentaires et une perte de temps d'environ un an, ce qui serait désastreux au moment où l'agriculture va mal. »
Acceptation
Convaincu de l'exemplarité de son projet, Lionel Thermoz-Bajat ne manque pas d'arguments.
D'abord, c'est un projet à dimension humaine. Il a une capacité de 100 NM3*, équivalent à la production de 876 000 m3 de biogaz soit 9,5 millions de Kwh.
Il sera alimenté par 15 000 tonnes d'effluents d'élevage, Cive (cultures intermédiaires à vocation énergétique, c'est-à-dire les menues pailles, les fonds de silos etc.) et écoproduits.
« Nous sommes 100% propriétaires du gisement et des terrains d'épandage et nous avons encore du potentiel », insiste l'agriculteur.
Mais surtout ce méthaniseur apporte « une activité complémentaire entrant dans le champ de l'écologie en produisant du gaz vert. En plus, nous valorisons les effluents agricoles et levons ainsi les menaces sur les équilibres environnementaux », plaide-t-il.
Il rappelle que dans le cadre de la gestion des effluents, les exploitations sont soumises à de nouvelles mises aux normes, d'autant plus qu'elles sont situées en zone vulnérable.
Un méthaniseur permet à la fois de résoudre les onéreux problèmes de stockage et de limiter les apports d'engrais.
« Nous allons créer une Cuma ou un GIEE pour acheter du matériel de plus grande capacité et ainsi limiter les déplacements et gagner du temps, mentionne encore Lionel Thermoz-Bajat. Nous avons fait beaucoup d'efforts pour que le projet soit accepté. Nous avons eu des réunions pendant plus d'un an avec les riverains. Nous avons suivi quatre comités de pilotage avec le sous-préfet, le maire, le président de la communauté de communes, les agriculteurs du secteur et les opposants au projet. Nous avons participé à une réunion publique et à des conseils municipaux. Nous n'avons jamais caché les choses et toujours expliqué le projet. »
Pression foncière
Si le dossier a rencontré des difficultés, c'est surtout parce que le secteur est soumis à une rude pression foncière.
Apprieu dispose de la seule sortie d'autoroute entre Voiron et la banlieue lyonnaise. Nombre de familles, mais aussi des entreprises ont choisi de s'y installer et les terrains ne cessent de prendre de la valeur.
Or, le méthaniseur ferait peser la menace d'une dépréciation foncière. Ce qui revient à lui accorder beaucoup plus d'importance qu'il n'en a, implanté en zone agricole à plus de 500 mètres des premières habitations.
« Nous nous sommes donnés les moyens, techniquement, humainement et financièrement de mener ce projet à bien », insiste Lionel Thermoz-Bajat.
Le système d'injection de biométhane permettra de produire du gaz de qualité. Les fournisseurs de gaz ont déjà manifesté leur intérêt pour le projet qui remplit la condition de disposer d'un bassin de consommation dans le secteur.
« Nous pourrons lancer le chantier lorsque l'ICPE sera accepté, c'est-à-dire courant 2017 », affirme l'agriculteur qui souhaite que Méthanisère serve d'exemple afin que des méthaniseurs puissent enfin sortir de terre en Isère.
« C'est un bel outil de travail, qui permet aux entreprises agricoles de se diversifier. En élevage, nous avons besoin d'un plan B. Les cultures ne suffisent plus et en plus, nous créons de l'emploi ».
Isabelle Doucet
* Normaux mètre cube
Feu vert à des soutiens nationaux aux sources d'énergie renouvelables
La Commission européenne a donné fin août son feu vert à des projets de soutien en faveur des sources d'énergie renouvelables notifiés par trois États membres qui sont, selon elle, conformes aux règles de l'UE en matière d'aides d'État.La République tchèque prévoit notamment une aide d'environ 19 millions d'euros pour les installations d'une capacité maximale de 0,5 MW qui produisent de la chaleur par combustion de
biogaz provenant, à hauteur de 70 % au moins, de sous-produits animaux, de fumier de ferme ou de déchets biodégradables.
Le Luxembourg consacrera quelque 150 milions d'euros entre 2016 et 2020 au paiement de primes pour aider les exploitants d'installations éoliennes, solaires, hydroélectriques, au biogaz, et à la biomasse destinées à la production d'électricité.
Malte compte soutenir à hauteur de 140 millions d'euros entre 2016 et 2020 les exploitants d'installations solaires photovoltaïques et éoliennes terrestres.
(Source : Agra)
A lire aussi :