Coopenoix investit pour l'avenir

« Nous pouvons considérer que 2013 est une bonne année », affichait Pierre Gallin-Martel, le président de Coopenoix lors de la dernière assemblée générale de la coopérative. Mais la satisfaction demeure relative en raison de calibres inférieurs à une année moyenne et d'une qualité hétérogène des noix. Les chiffres pour 2013 avancés par Marc Giraud, le directeur de la coopérative, sont significatifs. La noix sèche s'inscrit dans une saison record de 6 970 tonnes, soit 25% de plus qu'en 2012, une année déjà considérée comme honorable. Beaucoup de noix en cerneaux aussi, avec 193 tonnes, mais qui témoignent d'un important volume de fruits orientés vers le cassage au moment du triage. La collecte compilée (noix fraîches, sèches et cerneaux) de Coopenoix et de sa filiale CT noix s'élève à 9 120 tonnes en équivalence noix sèches. « Dans les années 2000 elle ne dépassait pas les 3 500 tonnes. Ceci est le résultat de l'arrivée en production de nouveaux vergers dans la région », explique Marc Giraud.
Faibles calibres
Si 2012 avait été une année exceptionnelle en termes de calibre, puisque 54% de la récolte dépassait les 32 millimètres, en revanche, « 2013 est atypique dans l'autre sens, fait remarquer le directeur. Nous n'avons jamais rencontré des calibres aussi faibles. Seulement 13% des noix récoltées font plus de 32 millimètres de diamètre. Fort heureusement le calibre 30/32 est constant, 34% des noix entrent dans cette catégorie. » Cette année, plus de 53% de la récolte s'établissait à moins de 30 mm et seulement 11% à plus de 32 mm, le calibre de référence. « Cela a nécessité des arbitrages sur le plan commercial. Il a fallu s'ajuster en conséquence, » poursuit Marc Giraud. Il insiste également sur un taux de déchet inhabituel de 4,8% des noix au triage, soit trois points de plus que les autres années. En revanche, la couleur des coquilles apparaît comme le point positif. « Nous nous attendions à un niveau de gris important. Or les producteurs ont fait des efforts pour ramasser vite, en employant des nouvelles techniques de lavage. »
Relocalisation en France
La coopérative, qui réunit 450 producteurs adhérents d'Isère, de Savoie et de la Drôme ainsi qu'une centaine de producteurs indépendants, a enregistré des chiffres de vente exceptionnels. Les stocks de noix sèches sont quasiment épuisés. « Le produit commence à manquer dans certains calibres. Le marché a été porteur tout au long de la saison, poursuit Marc Giraud. En dépit d'une saison au démarrage tardif, pluvieuse et de noix de qualité discutable, le renouvellement de deux lignes de conditionnement et l'ajout de deux palettiseurs en bout de ligne ont permis de gagner en compétitivité. Avec la coopérative Valsoleil, dont elles commercialisent les fruits, Coopenoix et CT noix ont donc vendu plus de 10 000 tonnes de noix en Europe cette année, soit un quart de la production française. « Pour la première fois, la France est notre marché numéro 1, révèle le directeur. Les grandes enseignes veulent tenir le produit en magasin toute l'année. » A l'export, avec 21% du marché de Coopenoix, l'Italie rafle la deuxième place à l'Allemagne (18%) et l'Espagne. La coopérative enregistre donc un chiffre d'affaires de 25 millions d'euros (31 millions d'euros avec CT noix), stable car la quantité a compensé les faibles calibres.
L'établissement a consenti un effort important de main-d'œuvre en recrutant 20% de saisonniers de plus pour traiter tout le volume, mais aussi sur les postes de cassage-énoisage, cette opération étant désormais relocalisée de la Moldavie vers la France, à Têche, sur de nouveaux outils de production. Cet investissement permet à Coopenoix d'anticiper sur l'évolution du marché, qui observe une tendance à la hausse de la demande de cerneaux.
Planter des noyers
Pour réduire l'exposition aux risques climatiques et limiter les difficultés de récolte comme ce fut le cas cette année, Pierre Gallin-Martel propose aux producteurs trois axes de progression : le volet séchage et stockage, où les principaux dysfonctionnement sont observés, le dimensionnement des équipements, et l'organisation des chantiers avec des moyens humains adaptés. « Notre stratégie passe en premier lieu par le renouvellement de nos vergers, poursuit le président. En 2013, le niveau de plantation a atteint 5% de la surface des vergers, mais cela reste insuffisant pour combler les manques de ces dernières années. » Aujourd'hui, la filière connaît plus de problèmes d'approvisionnement que de commercialisation, si bien que planter permettra « de rester concurrentiel et de pérenniser notre production », insiste Pierre Gallin-Martel. La coopérative incite également les producteurs à diversifier leurs variétés en allant vers fernor ou chandler en complément des traditionnelles franquette, maillette et parisienne, pour améliorer la rentabilité des exploitations avec des fruits plus précoces. Sur le front de la qualité, la coopérative s'engage de son côté à investir encore dans deux lignes de conditionnement et de nouveaux systèmes de tri plus performants, avec de nouveaux séparateurs. Les coopérateurs sont conscients de l'exigence accrue de qualité et de l'attente de produits certifiés de la part de leur clientèle et entendent renforcer le groupe d'une vingtaine de producteurs déjà inscrit dans la démarche Globalgap. Certification IFS, bio ou encore Production fruitière intégrée (PFI) participent de cette même démarche d'amélioration de la qualité. Le tout s'accompagne d'un soutien technique accru et la mise en place de journées de formation. Quant à la récolte 2014, elle s'annonce « nettement inférieure à 2013, avec des calibres plus élevés, mais pas exceptionnels ».
Isabelle Doucet
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