Accès au contenu
Maraîchage

Cultiver des légumes pour les vendre

A Saint-Cassien, Isabelle Hibon et Alain Prost-Tournier ont bénéficié des références de leur cédant pour planifier leurs cultures maraîchères.
Cultiver des légumes pour les vendre

Reprendre une exploitation existante est un atout majeur pour qui veut s'installer en maraîchage et en vente directe. C'est le cas d'Isabelle Hibon et Alain Prost-Tournier qui ont repris les Jardins du coteau à Saint-Cassien en 2015.

L'exploitation, en bio depuis 10 ans, se compose de deux hectares de cultures maraîchères dont 2 500 m2 de serres. Elle a été complétée par un atelier de poules pondeuses réparti en deux lots de 200 poules. Il y a aussi trois hectares de prairie auparavant cultivés en céréales conventionnelles.

« C'est un maraîchage spécialisé en rien, s'amuse Isabelle Hibon. Nous cultivons au moins une trentaine de variétés. »

Les exploitants vendent leur production grâce à deux marchés à Grenoble ainsi qu'à la ferme, le vendredi. Pour faire face à une demande soutenue, il leur faut assurer côté cultures.

« Nous avons eu la chance de reprendre quelque chose d'existant. Lorsqu'on s'installe, il faut aller voir d'autres maraîchers, demander quelles quantités produire car il est impossible de savoir combien faire de carottes ou tout autre légume d'hiver, conseille Isabelle Hibon. Cela se planifie des mois à l'avance et quand c'est fait, on ne peut pas revenir en arrière. »

Elle se fie également au fichier de rendement régional.

Une gamme diversifiée

L'optimisation de la vente directe doit beaucoup à la réussite de la planification.

« Il ne faut pas s'affoler au regard des quantités à planter. Au début, cela nous paraissait énorme, mais il faut tenir tout l'hiver et c'est long », ajoute la maraîchère.

Ne jamais manquer de poireaux, ni de carottes ou de pommes de terre est un principe de base. « Dans la vente, lorsqu'on commence à manquer de certains légumes, les gens ne viennent pas. Il y a un équilibre à trouver. S'il n'y a pas de carottes, ils ne viendront pas acheter de salade. Ce qui nous oblige à avoir une gamme diversifiée pour garder notre attractivité. »

Réussir ses légumes de base, proposer un banc diversifié sont deux clés de réussite.
L'hiver, on retrouve des pommes de terre nouvelles, du chou rave, des radis, des oignons. L'été, c'est la saison des tomates, des aubergines, des concombres, des poivrons et des haricots. A l'automne arrivent les salades, les épinards, le fenouil, le persil, les blettes et les endives.

Cette année, l'essai de patates douces en plein champ s'est avéré fructueux et les maraîchers se lancent dans les carottes et les navets jaunes, les patidou, les choux chinois ou romanesco.

Travailler autrement, sans chambouler

Alain Prost-Tournier et Isabelle Hibon ont repris l'exploitation dans le cadre d'une reconversion professionnelle avec une forte envie de modifier certaines pratiques.

« Ni tracteur, ni plastique, on voulait faire de la permaculture, mettre des engrais verts, mélanger les plantations, tout reprendre à la base », raconte Isabelle.

Mais face à la demande de la clientèle et la nécessité de dégager un revenu pour deux, et puis trois personnes les exploitants ont modéré leurs ambitions.

 

Isabelle Hibon et Alain Prost-Tournier participent au groupe d'échange entre maraîchers du Pays voironnais.

 

« On vit de notre travail, explique la maraîchère, même si nous ne sommes pas totalement en accord avec ce que nous faisons, nous ne sommes pas prêts à abandonner le tracteur ! ».

Pour travailler le sol « autrement, sans tout chambouler », les planches permanentes seront mises en place cette année.

Les deux associés foisonnent de projet. Une troisième personne devrait rejoindre l'EARL. Ils envisagent également la construction d'un nouveau bâtiment.

Tous les premiers lundis du mois 

Depuis deux ans, les maraîchers ont su s'entourer d'un solide réseau, très dynamique dans le pays voironnais. « Nous nous rencontrons tous les premiers lundis du mois au restaurant, à midi, raconte l'exploitante. Nous avons lancé le projet de créer une pépinière de poireau tous ensemble. »

Ces échanges techniques ou sur les pratiques culturales sont précieux et peuvent aller jusqu'à l'échange de matériel, voire le coup de main ponctuel.

Isabelle Doucet
C'est vous qui le dites

Traduire des kilos de légumes en surfaces

Ces temps de rencontre organisés par la chambre d'agriculture de l'Isère et baptisés « C'est vous qui le dites » s'adressent plus spécifiquement aux jeunes installés.
Ils échangent ainsi sur leurs pratiques avec d'autres professionnels « et plus particulièrement sur les aspects organisationnels, de façon à ce qu'ils ne se sentent pas seuls après leur installation », indique Mélanie Michaud, conseillère consulaire.
Le thème choisi mi-décembre était la coordination des plannings de culture en maraîchage avec la commercialisation.
« Disposer de données chiffrées permet de savoir sur quelles bases partir », ajoute-t-elle, à l'image d'Isabelle Hibon et Alain Prost-Tournier qui disposaient des références de l'ex-exploitant de Saint-Cassien.
La reprise d'exploitation présente l'avantage d'apporter des données chiffrées.

« Lorsqu'on aborde un nouveau marché, il convient d'identifier les attentes des clients, en quantité et tout au long de l'année », prévient la conseillère.
L'équation tient à trois variables : que produire, quelle quantité et à quelle période ? « Cela se traduit en surfaces et en assolements ».
Mélanie Michaud rappelle « qu'il existe de nombreux paramètres à prendre en compte, en fonction de la demande, de l'organisation de l'exploitation, du chiffre d'affaires attendu et des pratiques culturales, souvent en agriculture biologique. » De sorte qu'il se crée souvent un écart entre un schéma idéal et les pratiques réellement mises en place.
Un raisonnement rétroactif

La conseillère indique la marche en avant : « On part du débouché et des attentes pour définir une liste d'espèces, puis leur quantité et leur surface. » La définition du plan de culture passe par l'établissement d'un calendrier de travail pour chaque légume : semis, plantation, récolte. Il est à mettre en perspective avec les assolements et les rotations d'une année à l'autre.
Autre conseil pour qui s'installe en maraîchage et en vente directe : jouer la carte de la diversification. Une quarantaine d'espèces différentes n'est pas trop.
Mais il faut aussi tenir compte de la réalité des nouveaux installés, à la tête de surface de plus en plus réduites, parfois inférieures à un hectare.
Des logiciels de planification existent, qui permettent de traduire les kilogrammes en surfaces et en rendements. Ce sont des outils d'aide à la répartition des tâches, à la prévision des dates de semis et des récoltes.
« C'est un raisonnement rétroactif, reprend la conseillère. Cela réclame un gros travail au début, puis la routine se met en place. »
Dernier conseil : soigner les assolements pour éviter que les maladies ne se développent et valoriser la fertilité des sols « car les légumes ne vont pas tous chercher la même chose dans le sol ».
ID