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Arboriculture

Dialogue bénéfique entre producteurs et détaillants

Afin de découvrir le fonctionnement des vergers de la région Rhône-Alpes, les détaillants et grossistes lyonnais ont visité l’exploitation du Val qui Rit de Jérome Jury à Saint-Prim (Isère) début mai.
Dialogue bénéfique entre producteurs et détaillants

Dans l'arboriculture, il y a le savoir produire mais aussi le savoir vendre. Jérôme Jury a exposé aux invités présents, détaillants et grossistes lyonnais, dans son exploitation le Val qui rit à Saint-Prim (Isère) la gestion de ses débouchés. Cultivant fraises, abricots, pommes et cerises, l'arboriculteur connaît bien son affaire. Afin de répondre aux attentes des fournisseurs, et des clients, il choisit ses variétés... et analyse les marchés. « Le marché de la pomme est un marché à batailler. Alors on garde la production en visant des variétés de niches telles que la tentation ». Sur le marché de l'abricot, c'est le nombre de variétés qui pêche. Bergeron, Colorado, Sefora... Jérôme Jury en teste quelques unes, en lien avec l'Asara (association stratégie abricots Rhône-alpes). « On va voir le potentiel de production des nouvelles variétés », s'enthousiasme-t-il. Mais à l'autre bout de la chaine, ce n'est pas la même réaction. « En abricots, il y a tellement de variétés... à part le bergeron, on ne les connaît pas. Pour faire connaître les nouvelles variétés aux clients et les faire accepter, cela peut prendre plusieurs années », explique Quentin Radufe, de Kent1 Primeurs. Quant aux 7 hectares de fraises produisant 150 tonnes de fruits, le marché concurrentiel semble bien se porter.

Marchés en tension

C'est sur les cerises que l'arboriculteur rencontre le plus de difficultés. « Les drosophiles ont un cycle court de 11 jours, donc on doit traiter sans arrêt et on a de moins en moins de molécules. Il y a pas mal d'impasses », déplore-t-il. Pour les détaillants, aussi la vente est délicate : « C'est difficile à vendre au niveau de l'étal. Il y a beaucoup de casse », explique Quentin Radufe. Pour un autre détaillant, le choix est plus radical : « Je fais l'impasse sur la cerise. J'en mets deux fois dans la saison et je préviens qu'il y a aura de la cerise tel jour ». C'est aussi le prix du fruit qui pose question. « Pour avoir du beau fruit, il faut payer cher ou sinon on a les fonds de cageots. Et la cerise de France est rare. C'est difficile d'être compétitif », confirme le détaillant. « C'est un fruit plaisir, impulsif, confirme Jérôme Jury, mais c'est dommage, on passe à côté d'un potentiel».
Le mode de culture fait aussi partie du choix du consommateur. De plus en plus de clients s'intéressent à l'agriculture biologique. Les détaillants et maraîchers tentent donc de s'adapter. « Mes clients ne demandent que du bio mais souvent ils ne savent pas ce que c'est. On paie plus cher en tant que détaillant mais la qualité n'est pas toujours au rendez-vous », précise Quentin Radufe.

Jérome Jury, au milieu de ses abricotiers protégés de la grêle par les filets.

Bio ou pas bio

Après avoir testé le bio, Jérôme Jury en est revenu et travaille aujourd'hui sous la certification HVE (haute valeur environnementale). Celle-ci prend en compte le fonctionnement global de l'exploitation, selon un grande nombre de critères, et non pas une pratique en particulier. « Selon moi, l'agriculture durable deviendra indissociable de notre activité. Malheureusement, on fait le travail mais on ne communique pas derrière », explique Jérôme Jury. C'est un problème pour les détaillants qui déplorent le nombre élevé de labels au regard de leur faible connaissance par la clientèle.
Le manque d'information favorise la concurrence des autres pays européens. « On doit travailler le gustatif, alors qu'en Espagne ce sont des bêtes à produire. On doit se démarquer par la gamme variétale et le mode de culture », analyse Jérôme Jury. D'autres fournisseurs, livrant notamment en Espagne, ont souligné que pour la majeure partie de leur clientèle, l'indicateur prix restait le premier argument, malgré les labels.
Qu'importe les arguments, pour expliquer le travail des arboriculteurs devant la clientèle, il est conseillé de bien connaître le fonctionnement d'un verger. Certains intermédiaires n'y avaient jamais mis les pieds. Au lieu de compter en hectares, l'un des détaillants a ainsi demandé le nombre d'arbres exacts sur la parcelle afin de visualiser le lieu. Une bonne idée pour faire passer l'information auprès des clients.

Virginie Montmartin