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EGALIM : Indicateurs, encadrement et sanctions

Le point sur le projet de loi sur " L'équilibre des relations commerciales" et les amendements déjà adoptés par la commission des affaires économiques, visant notamment à clarifier l'élaboration d'indicateurs de coût de production et à renforcer le rôle de la médiation.
EGALIM : Indicateurs, encadrement et sanctions

L'examen, par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, des quelque 1 800 amendements déposés pour le projet de loi EGAlim a commencé le mardi 17 avril.

Pour la première partie entièrement dédiée à améliorer les relations commerciales entre les différents maillons de la filière, un front commun s'est dessiné entre les députés de tous bords politiques.

En  effet, de nombreux amendements ont fait consensus, tout particulièrement autour de la prise en compte des coûts des producteurs dans la formation des prix et dans la nécessité de faire évoluer le secteur de la distribution.

Indicateurs : les députés veulent clarifier leur élaboration et la diffusion par les interprofessions

Cœur du projet de loi, les conclusions des ateliers des EGAlim prévoyaient la prise en compte des couts de production dans le calcul des prix par le biais d’indicateurs formulés par les organisations interprofessionnelles.
Les députés ont adopté un amendement qui prévoit que ces indicateurs soient « rendus publics ». Pour Stéphane Travert, cela répond au «
souhait de la profession » et permet de « clarifier la portée des indicateurs ». Certains députés souhaitaient muscler la copie en demandant que ces indicateurs aient « valeur d’indicateurs publics de référence ».

Cependant, les députés ont rejeté, après avis défavorable du rapporteur et du gouvernement, les propositions d’amendements de députés LR qui souhaitaient que les contrats fassent obligatoirement référence à des indices publics. Le texte prévoit aujourd’hui que les parties peuvent utiliser « tous indicateurs disponibles ».

Concernant le rôle des interprofessions, des amendements souhaitant rendre obligatoire leur mission de « définition des indicateurs auxquels peuvent se référencer les contrats », portés par des députés de tous bords (Les Républicains, communistes et LaRem), ont été rejetés.

En effet, comme le souligne le rapporteur Jean-Baptiste Moreau, « l’idée est tentante mais nous sommes contraints par le règlement OCM » qui ne permet pas de rendre obligatoire une mission des interprofessions.

Indicateurs : le role des interprofessions reste privilégié

En parallèle des missions des interprofessions, le role de l’Observatoire de la formation des prix et des marges a également suscité des débats quant à son implication dans « l’élaboration et la diffusion des indicateurs que les parties pourront prendre en compte dans les contrats de mise en marché des produits agricoles ».

À cet égard, le gouvernement souhaite « responsabiliser les filières ». En effet, « ce sont les interprofessions qui sont responsables des engagements qu’elles ont pris dans le cadre des plans de filière », indique Stéphane Travert.

Se joignant à cet avis, les députés ont rejeté une série d’amendements proposant que les indicateurs, figurant dans les contrats et qui ne seraient pas rendus publics, soientau préalable validés par l’Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM).

Le rapporteur a invoqué la liberté des co-contractants. Le rapporteur s’est lui-même vu rejeter un amendement qui visait à obliger les co-contractants à utiliser les indicateurs produits par les interprofessions ; le gouvernement a invoqué un avis du Conseil d’État lors de l’audit du texte.

Toutefois, un amendement, porté par le rapporteur Jean-Baptiste Moreau, prévoyant la possibilité pour l’OFPM de se substituer aux organisations interprofessionnelles a été adopté par les députés de la commission des affaires économiques.

 

Jean-Baptiste Moreau, rapporteur du projet de loi.

 

Ainsi, si les interprofessions ne « font pas usage de leur faculté » de proposer des indicateurs publics, l’OFPM pourra reprendre ce role et ainsi « élaborer et diffuser des indicateurs que les parties pourront prendre en compte dans les contrats de mise en marché des produits agricoles ». Des amendements prévoyant que l’OFPM opère ces missions en parallèle des interprofessions ont été retirés ou rejetés.

Répartition de la valeur : les coûts de production seront intégrés à toutes les étapes

Tout comme les indicateurs, les clauses de partage de la valeur adossées aux accords interprofessionnels ont été insérées dans le texte mais sans caractère obligatoire. Ainsi, les députés ont adopté un amendement du rapporteur Jean-Baptiste Moreau visant à l’application du règlement européen Omnibus. Ce texte prévoit qu’à l’exception du secteur sucre, qui bénéficie déjà de dérogations, « les agriculteurs, y compris les associations d’agriculteurs, et leurs premiers acheteurs peuvent convenir de clauses de répartition de la valeur portant notamment sur les gains et les pertes enregistrés sur le marché, afin de déterminer comment doit être répartie entre eux toute évolution due des prix ». Par ailleurs, le texte étend les missions des interprofessions à l’établissement de « clauses types de répartition de la valeur ».

Encadrement des promotions : le texte de loi restera souple

Une autre promesse du président de la République était l’encadrement des promotions. Cependant, les députés ont rejeté les amendements ambitionnant de chiffrer l’encadrement des promotions et d’y inclure spéciquement les produits vendus sous marques de distributeur. Les chiffres repris sont ceux des conclusions des États généraux, à savoir 34 % en valeur et 25 % en volume.

Toutefois, la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie, Delphine Gény-Stephann, a défendu « l’attachement du gouvernement aux conclusions » des ateliers mais, l’écriture des ordonnances étant très technique, elle a émis un avis défavorable pour ne pas y ajouter trop de contraintes. Avis qui a été suivi par les députés.

De plus, la secrétaire d’État a confirmé que les promotions des produits vendus sous marques de distributeur seront bien intégrées dans l’ordonnance et feront également l’objet d’un encadrement.

Concernant la revente à perte, les députés ne veulent pas sanctionner l’achat au-dessous des coûts de production. En effet, un amendement, proposé par la France insoumise, visant à sanctionner « le fait d’acheter un produit au-dessous de son coût de production » a été rejeté par la commission des affaires économiques. Le rapporteur a émis un avis défavorable estimant que la vente à perte peut être nécessaire pour dégager les excédents, en prenant l’exemple des filières fruits et légumes.

 

Stéphane Travert, ministre de l'Agricuture.

 

Le ministre de l’Agriculture a partagé « sur le fond l’idée de tirer un revenu de son travail » mais a dénoncé l’objectif de mise en place de prix plancher qui ne serait pas permis par le droit communautaire. De plus, Stéphane Travert met en garde sur le fait que les prix plancher puissent devenir des « prix plafond ».

Sanctions: un sujet à retravailler pour la séance publique

L'idée de la création d'une nouvelle juridiction, qui a fait l'objet de plusieurs amendements à plusieurs étapes de l'examen, a systématiquement été retoquée par le rapporteur et le gouvernement qui ne souhaitent pas voir alourdir les procédures. Ils souhaitaient plutôt renforcer le rôle du médiateur des relations commerciales.

C'est le sens de la proposition du rapporteur qui vise en laissant la possibilité au médiateur, « à sa seule initiative », de recourir au « name and shame », c'est-à-dire de rendre ses conclusions publiques au terme d'une médiation, a été adopté par les députés de la commission des affaires économiques le 18 avril.

Cet amendement a été maintenu au vote par le rapporteur, qui le considère « comme un engagement fort », malgré l’avis défavorable du ministre de l’Agriculture Stéphane Travert qui met- tait notamment en avant le risque que les opérateurs se détournent de la médiation.

Au sujet des sanctions financières encourues par les producteurs et leurs organisations, le gouvernement a refusé sur le fond, suivi par le vote des députés, un amendement des députés LR qui proposait que les producteurs et organisations de producteurs soient exonérés des sanctions. Stéphane Travert a rappelé qu’un délai de mise en conformité protégeait les agriculteurs.

De plus, le plafond des sanctions est fixé à 75 000 euros dans le texte.

Un bon nombre de députés ont retiré leurs amendements qui visaient à modifier les sanctions prévues en cas de non-respect des dispositions liées à la contractualisation.

En effet, le ministre de l’Agriculture avait demandé leur retrait en vue de la séance publique, approuvant les idées exprimées de moduler la sanction en fonction de la taille des entreprises. Le rapporteur Jean-Baptiste Moreau proposait notamment de fixer ce plafond à 2 % du chiffre d’affaires hors taxes, afin de rendre leur montant significatif pour les grandes entreprises.

Enfin, les députés ont adopté l’amendement porté par le rapporteur qui vise à sortir les produits agricoles et alimentaires des négociations commerciales.

Cet amendement a recu un avis de sagesse du gouvernement qui souhaite étudier la question. En effet, quel pourrait alors être le nouveau cadre de ces négociations ?

Source : Agra

Contractualisation et facturation : un calcul et une distinction clairs

Au sujet de la formation des prix, les députés ont adopté un amendement imposant que les critères et modalités de détermination du prix, qui devront figurer sur les contrats établis avec des agriculteurs, soient compréhensibles de ces derniers.
Plusieurs amendements allaient dans ce sens, les députés souhaitant que les agriculteurs puissent calculer à tout instant le prix auquel ils peuvent prétendre.
C’est un amendement LaRem qui a été adopté, imposant que le prix puisse eêre « déterminé ou déterminable selon des critères clairs et compréhensibles ».
Sur la facturation, l’amendement porté par le député Thierry Benoît (UDI) visant à ce que le mandat de facturation, accordé par un producteur à une OP ou à la laiterie, ne puisse être lié au contrat de vente a été adopté. Il prévoit que l’établissement d’une facturation fasse bien l’objet d’un mandat distinct du contrat, mais que ce mandat ne puisse pas être lié au contrat.
« Nous voulons redonner de la souveraineté au producteur »
, a expliqué Thierry Benoît.

 

 

Distribution: un sujet à éclaircir

Déjà au centre des débats lors de la discussion générale, la distribution et sa concentra- tion ont, à nouveau, été au cœur des débats parlementaires lors de l’examen du projet de loi EGAlim. Un consensus est largement apparu au sein de la commission des affaires économiques pour réguler ce secteur.
Cependant, le gouvernement a convaincu les députés de retirer leurs amendements qui visaient à élargir le contrôle des concentrations – préalable aux opérations – aux accords entre distributeurs.
En effet, le gouvernement a engagé des travaux avec l’Autorité de la concurrence, a expliqué la secrétaire d’État, qui souhaite proposer un texte en séance publique.
Les représentants des groupes de la commission des affaires économiques seront associés. « Le droit de la concurrence n’est pas facile à manier, a expliqué Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie. Nous essayons d’élaborer un dispositif qui a une vraie force ».