Accès au contenu
Informatisation

L'informatique au service de la traite

Grâce aux capteurs qui se multiplient dans les exploitations, l'éleveur a accès à de plus en plus d'informations accessibles via son ordinateur ou son smartphone sur son troupeau. Clément Allain, chef de projet sur l'élevage de précision à l'Idele, dresse un état des lieux des possibilités de valorisation de ses données comme source de progrès.
L'informatique au service de la traite

Quels types d'informations peut-on obtenir grâce aux technologies de l'informatique et de la communication lors de la traite ?

Une partie des outils utilisés ne sont pas forcément nouveaux. L'un des premiers qui a été développé est le compteur à lait électronique dans les salles de traite et maintenant dans les robots. Il mesure pour chaque vache, la production de lait lors de chaque traite, le débit de traite de la mamelle et la conductivité du lait qui permet de détecter les mammites.
Les nouvelles générations de compteurs à lait intègrent maintenant d'autres mesures comme par exemple la détection de sang dans le lait. Ils peuvent être associés avec d'autres types de capteurs qui vont mesurer la composition du lait : TB, TP, lactose, voire les cellules.
Des nouveautés récentes permettent d'aller encore plus loin. C'est par exemple le cas avec le "Herd Navigator" intégré au robot de traite de Delaval qui est capable de prélever un échantillon de lait pour chaque vache afin d'analyser le lait comme un mini-laboratoire. Il permet également d'obtenir des informations non plus par vache, mais pour chaque quartier de la mamelle.
Les robots de traite permettent de par leur conception d'obtenir des informations complémentaires comme le poids de l'animal, la quantité de concentrés consommée, l'activité de la vache, la température du rumen, etc. Il y a aussi des robots qui mesurent la température du lait à la sortie de la mamelle. Ces informations sont stockées dans le logiciel du robot et peuvent être consultées à tout moment.

Comment valoriser toutes les données recueillies ?

Ce n'est pas possible pour un éleveur de valoriser toutes ces informations tout seul. Les logiciels permettent de surveiller les valeurs par vache sur une longue période et de les comparer à celles du reste du troupeau. Une baisse de production peut être un signe de problème de santé par exemple. Les systèmes analysent les données en continu et sont en mesure de générer des alertes. En suivant une valeur dans la continuité, cela permet de faire ressortir les anomalies. L'éleveur peut ainsi utiliser des alertes liées à une chute de production de lait ou une hausse de conductivité du lait signe possible d'apparition de mammites. Il a accès à l'ensemble de l'historique pour pouvoir affiner les alertes du logiciel. Ensuite, c'est du classique, il faut aller voir l'animal pour affiner le diagnostic. On voit aussi apparaître des conseillers spécialisés sur le traitement des données des robots.

Toutes ces informations permettent également à l'éleveur de faire progresser son élevage.

Effectivement, c'est aussi un outil de diagnostic et de progrès pour l'éleveur. L'information en continu va pouvoir l'aiguiller dans plusieurs directions notamment pour la sélection des animaux qui s'en trouve facilitée : meilleures vaches productrices de lait, les moins sensibles aux mammites, les plus facile sur le robot, etc. Dans sa gestion annuelle de l'exploitation, il peut utiliser ces informations pour améliorer son plan de reproduction. 

L'informatisation et l'automatisation de la traite pourrait-il faire perdre le contrôle de la décision à l'éleveur ?

Ces outils permettent d'automatiser les tâches contraignantes. Mais au-delà de ça, certains constructeurs sont capables d'exploiter les informations pour proposer un système global de prise de décisions automatiques. Par exemple, en fonction du cours du lait, du prix des concentrés, des quantités d'aliments nécessaires pour cette vache pour produire tant de lait, le système prend la décision de la quantité de concentrés administrée à la vache lors de son passage au robot par exemple. Ce sont les éleveurs qui rentrent les paramètres de décisions et le système les applique. Lely est allé très loin dans cette direction. Chez Delaval, le "Herd Navigator" donne des consignes que l'éleveur peut suivre ou non.

Est-ce que les éleveurs sont suffisamment formés pour utiliser toutes ses informations ?

Il y a souvent un accompagnement de l'éleveur qui est proposé par le distributeur du robot. Le concessionnaire propose un appui et une petite formation. On trouve aussi des conseillers spécialisés robot de traite qui proposent des prestations d'accompagnement. Cependant, je pense qu'il y a sans doute un manque de formation des éleveurs, et des futurs éleveurs. Il y a aussi un manque d'intérêt pour la technologie et tout ce qu'elle offre chez par exemple certains éleveurs qui ont fait installer un robot pour supprimer l'astreinte de la traite. Certains ne sont pas très intéressés par les données supplémentaires. Il y a donc beaucoup de progrès à faire sur la formation des jeunes et des éleveurs sur les nouvelles technologies.

Quels sont les tendances en termes d'innovations liées à la traite et l'élevage plus généralement ?

Ces derniers mois sont apparus des capteurs capables de suivre le comportement de l'animal : quand est-ce qu'il mange, où mange-t-il, comment se déplace-t-il. La géolocalisation se développe avec de nouvelles applications. On peut ainsi suivre les déplacements d'une vache, la géolocaliser précisément sur son smartphone, ce qui peut être intéressant pour trouver une vache dans les très grands troupeaux, notamment quand il y a plusieurs bâtiments. La géolocalisation permet également de connaître ses déplacements ce qui donne des indications sur son état de santé. L'imagerie se développe également beaucoup avec des images 3D de vache ce qui permet de mesurer tout un tas d'éléments : le maigre, le gras, son poids, etc.

Propos recueillis par Camille Peyrache

Voir aussi : Deux robots pour alléger les contraintes, au Gaec de la Goula à Trept

et Des heures de traite laitière en moins, au Gaec l'Orée du bois à Saint-Jean-de-Bournay