Le cheval de Troie, grand jouet du Festival Berlioz
Terre dauphinoise offre des invitations pour la Grande fête d'ouverture du festival, le 17 août à La Côte-Saint-André.

A le voir, on se sent redevenir gamin. Colossal, élégant et rustique à la fois, l'animal ravive des souvenirs d'enfance, des images de cheval de Troie enfouies dans les plis secrets de l'imagination. Et pourtant il est bien là, devant nous, au beau milieu du parc Allivet. A moitié achevé, avec ses allures bricolées, sa tête articulée (pour pouvoir passer sous les lignes électriques !), ses pattes démesurées et son flanc gauche équipé d'un curieux hublot...
Ce n'est pas un cheval, c'est un rêve fou, un projet imaginé par Bruno Messina, à la démesure d'un festival (1) qu'il dirige depuis une dizaine d'années, plaçant chaque fois les œuvres les plus ambitieuses du répertoire à la portée du plus grand nombre.
« On dit souvent que l'opéra n'est pas pour tout le monde, déplore le passeur mélomane. C'est parce qu'il y a eu une confiscation par une élite, alors que tout le monde peut s'en saisir. Il y a un grand travail à faire pour enlever le poids des codes sociaux. » C'est à ce travail que va s'atteler le cheval de Troie du festival.
Cadeau insensé
La mission de ce canasson de six mètres de haut : susciter la curiosité et donner envie au public de venir écouter Les Troyens, un gigantesque opéra en cinq actes, programmé à l'occasion du 150e anniversaire de la mort du « roi Hector ». Un cadeau insensé. A l'époque de sa création, en 1863, l'Opéra de Paris, seul de taille à monter une telle œuvre, le jugeait déjà trop long et trop coûteux. Berlioz lui-même n'assistera jamais à une représentation complète.
Dimanche 25 août, le Jeune Orchestre européen Hector-Berlioz et le chœur de l'Orchestre de Paris relèveront le défi, sous la direction de François-Xavier Roth. Ils interprèteront La Prise de Troie, première partie de l'opéra (2), dans laquelle Cassandre, la fille du roi Priam, pressent la menace qui pèse sur son peuple.
Petit rappel des faits : les Grecs sont partis, laissant sur la grève un curieux présent. « Un cheval haut comme une montagne », les flancs « tressés de planches de sapin », décrit Virgile, le poète latin qui a su « enflammer l'imagination naissante » du jeune Berlioz. « Pourquoi avoir dressé ce cheval énorme ? Est-ce une offrande ? Une machine de guerre ? », se demande Priam. Nul ne sait.
Après moults conjectures, les Troyens décident de tirer le cheval dans l'enceinte de la cité. « Tous entourent l'ouvrage. Sous les pieds du cheval, ils font glisser des roues et tendent des cordes de chanvre autour de son cou ; la machine fatale, pleine d'hommes armés gravit les remparts », raconte le poète.
Fin lecteur de Virgile, Bruno Messina a rêvé de transposer la scène à La Côte-Saint-André. « L'idée est inspirée des arts de la rue et de ce qui se passe dans des lieux culturels, comme le Lieu Unique de Nantes, explique-t-il. Je voulais que le chantier soit lui-même un événement culturel, un spectacle populaire, que l'on retrouve cette notion de partage et d'appropriation par le public. »
Entre le tonneau et le bateau
C'est en bonne voie. Installée dans le parc Allivet, au milieu d'un village troyen en construction, la bête est arrivée d'Autrans, par camion, le 5 août. En partie construite sur le site de l'Echarlière, elle n'est encore qu'une carcasse bardée de bois d'un côté. Elle a été dessinée et réalisée par le constructeur scénographe François Gourgues, avec l'appui de Gaël Denis, maquettiste et menuisier chez Lithos, une entreprise spécialisée dans la création d'objets muséographiques.
Le duo, réuni par Pierre Hernicot, le directeur technique du festival, a travaillé sur la structure pendant plusieurs semaines en toute liberté. « Bruno voulait un cheval hors du commun, singulier, quelque chose entre le tonneau et le bateau », explique Gaël Denis. Pour le jeune homme, plus habitué aux projets minutieux qu'aux chantiers titanesques, la proposition est d'autant plus inédite que le cheval ne doit surtout pas être parfait. C'est la consigne.
Comme un jouet gigantesque
« Il fallait qu'il soit énorme, mais qu'il y ait des défauts pour que les gens comprennent que c'est humain, comme une cabane, comme un jouet gigantesque fabriqué par un grand-père », précise François Gourgues qui, avec Gaël Denis, s'est amusé à « se forcer à l'imperfection ».
Pour rester fidèle aux écrits, il fallait en effet donner l'impression d'un cheval fabriqué avec des débris de navire (en réalité plusieurs mètres cubes de douglas gracieusement offerts par la filière bois de l'Isère, en l'occurrence la scierie Eymard de Veurey-Voroise), avec une tête bonhomme, mais pas trop gentille, toute recouverte d'or. « C'est un cheval de guerre, mais c'est aussi un cadeau », souligne le directeur du festival.
Equarri à la hache
Un cadeau qui, comme dans le récit mythologique, sera transporté sur un gigantesque chariot à travers la ville jusqu'au château Louis XI, où se déroulera la représentation des Troyens.
Pour fabriquer l'engin, Pierre Hernicot a fait appel l'association Georges Antonin, les métiers d'antan. Mécanos, soudeurs, charpentiers, menuisiers, tout le monde s'y est mis. Car construire un char de dix mètres de long capable de transporter un cheval d'une tonne et demi ne s'improvise pas : il faut du solide, tout en restant dans l'esprit bricolé du cheval.
« Nous avons récupéré et adapté un châssis d'usine, explique Jean-François Gourdain, agriculteur à Saint-Siméon-de-Bressieux et président de l'association Georges Antonin. Nous l'avons ensuite habillé avec du bois que nous avons équarri à la hache pour que ce soit plus rustique. » Les Georges Antonin ont également fabriqué les cabanes-ateliers du village troyen, la crinière et la queue du cheval ainsi que la corde en chanvre pour tirer le chariot.
Un chantier participatif
Restent les finitions. A quelques jours de la grande fête d'ouverture, le chantier participatif accueille depuis le 6 août habitants, vacanciers et curieux de passage ayant envie de donner un coup de main pour teinter le bois, scier, clouer, barder les flancs du cheval, couper des feuilles de laiton qui vont décorer la tête et fabriquer des costumes.
« Ce n'est pas évident de partager ça quand on est habitué à travailler seul, confie François Gourgues. Ça demande une certaine souplesse. Il faut savoir se laisser surprendre par les propositions des gens, mais c'est bien de redistribuer le plaisir. » Un plaisir partagé avec toutes les bonnes volontés qui se présenteront.
Notez qu'aucun prérequis n'est exigé : chacun trouvera sur place une mission adaptée à ses compétences. Même si elles sont nulles.
Marianne Boilève
(1) Le festival Berlioz se déroule du 17 août au 1er septembre à La Côte-Saint-André.
(2) La seconde partie, Les Troyens à Carthage (actes III à V), sera montée au festival l'an prochain.
Chantier participatif / Jusqu'au 16 août, le festival Berlioz accueille le public au parc Allivet de La Côte-Saint-André pour achever la construction du cheval de Troie.
Participez à la construction du cheval de Troie
C'est parti. Depuis le 6 août, habitants, bénévoles, parents, enfants, bricoleurs ou non, tout le monde met la main à la patte (de cheval).En amont de la fête d'ouverture des 17 et 18 août, le Festival Berlioz invite le public à participer à la construction de sa mascotte de six mètres de haut.
Tous les jours, de 9h à 12h et de 14h à 19h, des professionnels de la menuiserie animeront des ateliers pour petits et grands.

Novices ou expérimentés, les participants aideront à découper et assembler des planches, tresser la queue du cheval ou l’embellir de dorures.
En parallèle, des ateliers couture auront lieu du mardi 13 au vendredi 16 août pour réaliser des costumes de Troyens à l’aide de patrons.Plus d’informations et programme du festival : www.festivalberlioz.com / 04 74 20 20 79
Places à gagner / Terre dauphinoise, partenaire du Festival Berlioz, offre des invitations pour la soirée d'ouverture du festival, samedi 17 août.
Grand fête d'ouverture à l'heure troyenne les 17 et 18 août
Pour sa traditionnelle Fête populaire d'ouverture les 17 et 18 août, le Festival Berlioz se met à l'heure troyenne.Dès 15h le samedi, le parc Allivet, transformé en village troyen, sera le théâtre d'ateliers et de déambulations musicales. Le public pourra aussi bien découvrir les « méditerranées musicales » qu'apprendre à danser le syrtos, s'initer au tir à l'arc ou déguster des spécialités locales.
Le samedi soir, à partir de 20h30, place à la danse avec le bal des contrebandiers, animé par les Corsaires rouges, sur des airs grecs et turcs. Le bal se concluera par un spectacle pyrotechnique à 23h.

Le lendemain, dimanche 18 août, dès 11h, le cheval de Troie quittera le village troyen sur un char tiré par une quarantaine de vaillants guerriers en costumes.
Il arpentera les rues de La Côte-Saint-André avant de rejoindre la cour du chateau Louis XI.
Après l'effort, le réconfort : à 13h, la ferme du Chuzeau ouvrira ses portes pour un pique-nique champêtre, avec surprises musicales et animations pour petits et grands.Le Festival Berlioz se déroule du 17 août au 1er septembre à La Côte-Saint-André.
Pour recevoir vos invitations pour la soirée du 17 août :
Il vous suffit de nous écrire en retour sur l'adresse [email protected] pour valider votre invitation, en nous précisant :
Vos nom et prénom
Votre adresse mail et n° de téléphone
Les invitations seront attribuées par ordre d'arrivée de vos réponses.