Le curetage pour lutter contre l’esca

Début juillet, au milieu des vignes, le ciel est menaçant. Mais rien qui puisse décourager les vignerons du groupe d’échange de pratiques du secteur. Ils sont une dizaine à s’être déplacés pour découvrir la technique du curetage. En ce début d’été, Nicolas Romy, viticulteur à Morancé partage son savoir-faire. « Je commence à avoir quelques années de pratique et d’expérience sur la technique du curetage », indique-t-il.
La recherche qui débute
Nicolas Romy est à la tête d’un domaine éponyme d’une vingtaine d’hectares plantés sur Morancé en gamay et chardonnay. Depuis quatre ans déjà, après l’avoir évoqué pendant une formation organisée par la chambre d’agriculture, Nicolas procède au curetage.
« J’ai approfondi mes connaissances grâce à différents ouvrages, notamment le Manuel des pratiques viticoles contre les maladies du bois, Remise à jour du Guide pratique de la taille Guyot rédigé par la Sicavac et le BIVC ou encore le livre de René Laffon Modifications à apporter à la taille de la vigne dans les Charentes* publié en 1921. Je me suis également formé en visionnant des vidéos sur YouTube notamment sur la méthode Simonit et Sirch », se souvient le viticulteur qui souligne également que la recherche autour des maladies du bois, notamment l’esca, ne fait que commencer.
Prévention
« Aujourd’hui, de plus en plus de pieds sont touchés par la maladie et les facteurs sont encore méconnus. De nombreux ouvrages indiquent que c’est la conjonction de plusieurs techniques qui permettent d’obtenir les meilleurs résultats », commente Nicolas Romy. Ainsi, si le curetage est une technique curative, il faut tout mettre en œuvre pour prévenir les maladies du bois grâce à des méthodes préventives.
« Sur les nouvelles plantations, il est important de raisonner la vigueur de la vigne et sa taille, en optant notamment pour la taille Guyot-Poussart. »
Toutefois, sur un secteur comme les Pierres dorées où le renouvellement des vignes est en cours depuis quelques années déjà, il est important de trouver des solutions pour sauver les ceps atteints par la maladie. « Les premiers symptômes apparaissent généralement sur les vignes qui ont une vingtaine d’années. Il est important de se familiariser avec cette technique dès maintenant », confie Nicolas Romy.
Surveillance et méticulosité
Le premier secret de la réussite du curetage est ainsi l’observation, la surveillance. « Il faut parcourir rang par rang ses parcelles de vigne une à deux fois par mois pour être certain de pouvoir agir dès l’apparition des premiers symptômes », commente le viticulteur.
Muni d’une tronçonneuse, « il en existe des petites électriques sur batterie qui sont plus légères que les grosses », on ouvre le cep en faisant attention de ne pas couper les flux de sève. Il faut ensuite éliminer les parties atteintes par le champignon, l’amadou.
« Il est important d’être très méticuleux et de retirer toute la partie molle pour prévenir toute rechute. Il faut compter en moyenne cinq minutes par cep », précise Nicolas Romy. Depuis qu’il pratique le curetage, ce dernier est catégorique : « entre 50 et 80 % des pieds que j’ai curetés ont été sauvés. Sans cette technique,ils seraient sans doute tous morts. Si l’esca a commencé à s’exprimer, pour moi, la solution se trouve dans le curetage. Il permet de sauver les ceps, voire même la récolte de l’année si la maladie est prise à temps ».
Aujourd’hui, il va même un peu plus loin. Sur les vignes plus jeunes, sur lesquelles les premiers symptômes apparaissent, Nicolas n’hésite pas à les décapiter. « La maladie se déclare généralement à la tête du cep. Une fois décapité, le pied de vigne produit de nouveaux sarments dansles jours qui suivent. Dans le curetage, il faut maîtriser les mécanismes de survie de la vigne et le tour est joué. »
Marie-Cécile Seigle-Buyat
* livre disponible gratuitement sur : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6565326w/f11.image