Accès au contenu
Exploitation

Une répartition efficace des tâches

A Doissin, le Gaec de la Gambille joue sur plusieurs leviers de rentabilité : la spécialisation, la rationalisation et la mutualisation. Productivité laitière et pratique agronomique complètent l'équilibre productif. Avec une originalité : la constitution d'un GIE avec une exploitation voisine.
Une répartition efficace des tâches

Un GIE*, fallait y penser. « Cela a marché très vite et très fort », commente Hervé Annequin, le plus jeune des trois associés du Gaec de la Gambille à Doissin. L'exploitation compte un troupeau de 82 vaches laitières de race prim'holstein, 14 mères allaitantes de race salers et une SAU de 149 hectares, dont 60 hectares de prairie et 34 de blé semence. La production laitière dépasse les 800 000 litres livrés à Danone. Dans ce Gaec qui réunit trois cousins, chacun est très spécialisé. Jean-Luc Riffard est un passionné d'élevage, Jean-Luc Annequin, s'occupe plutôt du troupeau allaitant, des fourrages, des prairies et assure des responsabilités dans la société civile. Quant à Hervé Annequin, il est responsable des cultures avec un très gros parti pris pour l'agronomie. Les trois hommes savent qu'ils tirent la force du Gaec de l'équilibre des fonctions et de leur spécialisation « qui améliore l'efficacité de l'exploitation, insiste Hervé Annequin, ce qui nous permet d'être plus pointu chacun dans notre domaine ».

 

Hervé Annequin est passionné d'agronomie.

Une initative orginale

Alors, quand le spécialiste des cultures a vendu la charrue et qu'à Virieu, une autre exploitation s'était engagée dans la même démarche de non -abour, le rapprochement s'est opéré naturellement. En 2013, chaque Gaec a apporté 200 000 euros au capital du GIE, regroupant tout le matériel de fenaison et de culture. « Nous fonctionnons un peu comme une Cuma intégrale avec beaucoup d'entraide », explique l'agriculteur. Le matériel est amorti sur 200 hectares de cultures et 150 hectares de prairies, « ce qui permet d'écraser les charges ». Le principe est de mutualiser les chantiers et parfois même les risques : si des bottes de pailles sont mouillées, elles sont équitablement réparties entre les deux exploitations. Le matériel reste le plus souvent attelé, les exploitants travaillent en binôme et les tâches avancent beaucoup plus vite. « Nous partageons la même approche du travail du sol, donc nous tombons vite d'accord pour l'achat de matériel », poursuit Hervé Annequin. Cette initiative originale reste encore rare. « Nous avons regroupé le plus facile : le matériel », indique l'agriculteur.

Le couvert idéal

Hervé Annequin a rejoint le Gaec familial avec l'idée de passer au non labour « plus par approche agronomique que pour les coûts de mécanisation, même si cela représente un avantage.» L'objectif est de conserver la fertilité des sols. Située en zone vulnérable, l'exploitation est soumise à la directive nitrate. « Nous avons commencé les couverts végétaux en 2003, mais on rencontrait des problèmes pour labourer les parcelles sous couverts. Nous avons donc fait le choix de poursuivre les couverts et de cesser le labour », explique Hervé Annequin. Il commence avec de la moutarde, puis s'oriente vers des mélanges complexes, est confronté à des problèmes de levées et revient à des couverts de base. « Avec la moutarde, l'apport en azote n'est pas tout à fait satisfaisant, mais elle pousse vite et étouffe les plantes invasives. De plus, c'est un couvert qui complète bien les apports en effluents d'élevage ». L'agriculteur poursuit ses recherches pour trouver le couvert idéal. « Je veux aussi un couvert gélif pour ne pas avoir à le détruire », précise-t-il. Semé à la mi-août après la moisson, le couvert doit également être développé à l'automne. Il l'assure, en coûts de production et en consommation de gasoil, l'exploitation s'y retrouve. « Pour ressemer du blé derrière, je passe simplement le mulcher et le semoir ».

Autosuffisance

L'exploitant n'a pas dressé un état des lieux des sols avant de passer au non-labour. « Mais avec les couverts ont évite que les sols se referment. Quelque chose se passe. A l'automne, il y a toujours un tapis de matières organiques, des résidus et à la fin de l'hiver, tout a été digéré par le sol. » Bon, le semis direct sous couvert, ce sera pour la prochaine étape. « Tout le monde veut tendre vers cela, mais rares sont ceux qui y arrivent en France. » Pour Hervé Annequin, « il faut d'abord remplir le silo avant de faire des expériences malencontreuses. Nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas être autosuffisants ». Un autre levier de rentabilité pour l'exploitation est la culture d'un blé semences d'un type spécifique. « Nous ne sommes que quatre producteurs à en faire en Isère. Les rendements sont inférieurs, mais la valeur ajoutée importante ». La récolte a été de 260 tonnes à raison de 235 euros par tonne.

 

*GIE : Groupement d'intérêt économique

Isabelle Doucet

 

Un troupeau taillé pour la performance

Les trois associés ne cessent de le répéter, l'équilibre du Gaec et sa rentabilité tiennent à la spécialisation de chacun. L'exploitation a largement amorti l'ensemble de ses installations avec une stabulation de 1 500 m2 construite en 1993, selon des critères très fonctionnels. Les vaches sont réparties en deux lots – les plus productives et les moins en forme - séparés par un couloir central menant à la salle de traite. Pour respecter leurs aplombs, les logettes sont équipées de matelas. Tout est organisé « pour produire le quota avec le moins de vaches possibles ». En 2x6 postes la salle de traite est un peu limitée, la traite durant plus de deux heures. Mais aucun investissement n'est à l'ordre du jour.
Vaches à lait
La production moyenne est de 9 800 litres par vache pour un prix moyen de 378 euros la tonne. La prochaine campagne devrait s'établir à 824 000 litres, mais avec une incidence certaine sur la matière grasse et une baisse du TB (taux butyreux) qui réclame toute l'attention des éleveurs. Il faut dire que l'exploitation valorise un maximum les fourrages qu'elle produit. Si l'ensilage est de qualité, en revanche, l'herbe est très présente dans la ration. Elle est complétée par du tourteau de colza. La sélection génétique doit satisfaire à trois critères prioritaires : la productivité des vaches, de bonnes mamelles et de bons aplombs. Côté reproduction, les choses se sont dégradées en 2014 avec l'arrivée de la BVD, le taux de réussite des IA par vache passant de 50/55% à 37%. Mais la bonne marche de l'exploitation se mesure aussi à la présence de certaines lignées, comme la famille Bugatti ; une mère née en 2006, qui en sept vêlages a donné six femelles. Ses filles et petites-filles présentent les mêmes caractéristiques : fécondation facile et adaptation à l'élevage. Bugatti elle-même (ISU 140) a produit en moyenne 12 700 kg de lait sur ses six premières lactations. La gestion économique du troupeau passe également pas la vente de vaches à lait valorisées en moyenne autour de 1 700 euros.
Si Jean-Luc Riffard est référent et fin connaisseur du troupeau, en revanche le Gaec est organisé de telle sorte qu'un des trois associés est d'astreinte pour la traite toutes les trois semaines, à partir du vendredi soir. Pour aider les deux exploitants qui connaissent moins bien les bêtes, les agriculteurs ont mis au point un système de codage très simple qui facilite la traite. Les vaches longues à traire (c'est le cas de la famille Bugatti) portent un scratch à la patte et celles dont l'implantation des trayons requiert un ajustement de la trayeuse ont un trait rose sur le jarret.
ID

 

Assemblée général des Prim'holtein
Le Gaec de la Gambille accueillait fin février l'assemblée générale d'Isère Holstein. Il apparaît que le nombre des troupeaux laitiers en race prim'hostein a considérablement baissé en Isère pour passer de 175 élevages en 2007 à 111 en 2014. L'agrandissement des troupeaux n'a pas complété cette chute puisque le cheptel est passé de 6 735 bêtes en 2007 à 5 985 en 2014. Les vaches produisent en moyenne 8 449 litres par an, soit 330 litres de plus qu'en 2007, avec un TB à 38 et un TP à 31,8. De moins en moins de vaches, certes, mais toujours de beaux résultats dans les concours : les éleveurs de prim'hosltein préparent activement l'interdépartemental d'Hauterives (26) à Pâques et le départemental de Biol au mois d'août.