Finie l’embellie observée en 2021 et 2022. La valeur ajoutée dégagée par chaque actif agricole reculerait de 9 % en valeur réelle en 2023, selon l’Insee. À l’origine de cette évolution le retournement des prix dans les productions végétales, la baisse des volumes en productions animales et la poursuite de la hausse des charges.
Après l’embellie des deux années précédentes, le résultat de la branche agricole a chuté en 2023 d’après les estimations du compte prévisionnel de l’agriculture publiées le 20 décembre par l’Insee. En prenant en compte les subventions d’exploitation, la valeur ajoutée brute par actif baisserait de 9 % en 2023, après avoir augmenté de 13,1 % en 2021, puis de. 9,6 % en 2022. Contrairement aux deux années précédentes, la valeur de la production agricole se replierait de 0,8 % dans un contexte mondial de retombée des prix des céréales et des matières premières qui avaient fortement progressé en 2021 et 2022. Certes les récoltes des productions végétales progresseraient de 6, 1 % en volume en raison de conditions météorologiques plus favorables, selon l’Insee. Celles de céréales et d’oléagineux-protéagineux seraient respectivement en hausse de 5,8 % (à l’exception du blé dur) et de 4,2 %. Idem pour les productions de légumes et pommes de terre en hausse de 6,2 %, alors que la production fruitière serait quasi stable (+ 0,2 %). La production viticole dépasserait de 3,3 % en volume son niveau de 2022 qui était déjà le plus élevé depuis 2018, tirée par les appellations d’origine protégée et celle de champagne (+ 12,8 %). En revanche, les prix n’ont pas été au rendez-vous. Ils diminueraient de 10,1 % pour l’ensemble des productions végétales. Particulièrement concernés, les prix des céréales (- 28,4 %) et les oléagineux-protéagineux (- 24,8 %). Également en léger repli, ceux des vins (- 1,1 %), alors que les prix des légumes et des fruits font exception : ils s’accroîtraient respectivement de 7,1 et 7,5 % stimulés par les pommes et les poires.
Effet ciseau et décapitalisation
Coté productions animales, c’est à un nouveau repli des volumes (- 2,5 %) que l’on a assisté en 2023. La baisse serait de 4,8 % pour les bovins, de 6,8 % pour les veaux, 5,7 % pour les ovins et de 5 % pour les porcs. Les volumes de volailles ne remonteraient que de 1 % après avoir reculé de 14,4 % en 2022 à cause de l’épizootie de grippe aviaire. La production de lait se replierait également de 2 %. Dans ce contexte d’offre limitée, les prix des produits animaux ont été orientés à la hausse en 2023 de + 7,9 % en moyenne pour l’ensemble de ces productions. L’Insee estime cette progression à 21,7 % pour les porcs, 5,8 % pour les veaux, 5 % pour les gros bovins, 2,3 % pour les ovins, à 6 % pour la volaille et 5,5 % pour les œufs. Quant au prix du lait, il augmenterait de 7,1 %. S’agissant des consommations intermédiaires, leurs prix ont continué à progresser en 2023, mais de moindre ampleur que l’année précédente. Les achats augmenteraient à nouveau de 2,5 %, sous l’effet de la hausse des prix (+ 3,5 %), alors que les volumes fléchiraient (- 0,9 %). Premier poste de dépenses, les achats d’aliments progresseraient de 1 % en valeur, ceux d’engrais baisseraient de 1,1 % en combinant à la fois un nouvel accroissement des prix (+ 19,1 %) et un fort recul des utilisations (- 17 %), qui s’inscrit dans une évolution tendancielle depuis le début des années 2000. Les prix de l’énergie fléchiraient de 1,5 % après avoir augmenté de 40,6 % en 2022, le repli du prix du gazole non routier étant estimé à 7,5 % par l’Insee sur l’année 2023. Enfin, les subventions agricoles qui conditionnent également le revenu des agriculteurs s’élèveraient à 8,4 milliards d’euros en 2023, en progrès de 150 millions d’euros par rapport à 2022 sous l’effet principalement de l’augmentation du paiement de base au titre de la Pac.
Actuagri
FNSEA : garantir des prix équitables
Dans les productions végétales, la FNSEA note que les agriculteurs ont subi « un effet ciseau délétère », en raison du retournement des marchés des productions végétales et la poursuite de l’augmentation des engrais, et cela malgré un rendement correct. Pour les productions animales, si les prix ont augmenté, ils n’entravent pas le recul des volumes de production tandis que les importations ne cessent de s’accroître « questionnant le défi de la souveraineté alimentaire ». Les revenus des éleveurs demeurant très faibles, « le respect des lois Égalim doit absolument rester de mise », note la FNSEA et « aucune baisse de prix n’est envisageable dans un contexte d’accroissement des arrêts d’activité d’élevage ». Avant de conclure sur « l’urgence d’adopter des politiques qui garantissent un prix équitable, tout en soutenant l’innovation et la transition écologique dans le secteur agricole ».