Patrimoine
Les Archives départementales de l'Isère ont étoffé leur collection des carnets des forestiers

Isabelle Brenguier
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Les Archives départementales de l’Isère viennent de terminer leur collecte de documents relatifs à la gestion des forêts publiques. Il est possible de consulter la majeure partie d’entre eux.

Les Archives départementales de l'Isère ont étoffé leur collection des carnets des forestiers
Crédit photo : Archives départementales de l'Isère. Extrait d’un livret forestier du brigadier Julien Repellin, de la brigade de Villard-de-Lans, rédigé en février 1874, il y a tout juste 150 ans.

Depuis la publication du Code forestier en 1827, les agents forestiers avaient pour obligation de consigner l’ensemble de leurs activités de terrain dans des livrets journaliers. Pendant longtemps, ces carnets sont restés dans les maisons forestières dont disposait l’ONF. Mais depuis plusieurs années, l’établissement public vend celles dont elle n’a plus l’usage, faisant ressortir des archives très anciennes. 
C’est ce qui a conduit Jean-Sylvain Rey, chargé des archives des administrations d’Etat aux Archives départementales de l'Isère, à parcourir les territoires forestiers isérois pour récolter carnets et autres documents produits par les forestiers depuis le XIXème siècle.
Son objectif : les classer pour les conserver au sein du site des Archives départementales de l’Isère, à Saint-Martin-d’Hères.

Documents locaux

Ainsi, durant toute l’année 2023, l’archiviste s’est rendu dans les bureaux de l’ONF des massifs du Trièves, de la Matheysine, du Vercors, de la Chartreuse, de Belledonne, de l’Oisans et également dans la forêt de Chambaran et dans les territoires du Nord-Isère.
Reçu par les agents de l’organisme, il a recueilli des livrets forestiers retraçant au jour le jour le quotidien des agents, des délimitations de bornage, des procès-verbaux d’aménagement des forêts, des plans, de l’iconographie… Le document le plus ancien recueilli est un livret de 1828, qui retrace la vie de la forêt de Goncelin.
« Tous ces documents témoignent de l’évolution des politiques d’aménagement de la forêt dans les départements, des modalités d’application des directives nationales au niveau local, du fonctionnement des services, mais aussi des reconstitutions de parcours de forestier… Ce sont des documents locaux très intéressants pour alimenter notre fonds constitué jusqu’à présent de généralités départementales. Ces livrets forestiers sont à l’interface entre histoire climatique, géographique, administrative et ethnographie », soulignent les archivistes isérois.

Selon Jean-Sylvain Rey, « tous ces écrits donnent un éclairage sur les aménagements pratiqués, les essences plantées, les coupes réalisées, les tournées de surveillance, les constats de délits, ainsi que le travail accompli par les forestiers et même sur leur vie quotidienne, la météo, les journées de travail administratif… puisqu’ils consignaient tout de façon extrêmement précise. Ces documents, ces journaux de bord, sont des témoignages sur 100-150 ans de chacun de ces territoires ».

Sous format informatique

Une fois ces documents collectés (environ un millier), ils sont classés pour être mis à disposition du public en quête d’informations sur ces sujets. Ceux des unités territoriales des Chambaran, de la Chartreuse, du Voironnais, de la vallée du Grésivaudan avec les massifs de Chartreuse et de Belledonne, ainsi que ceux du Vercors sont déjà disponibles. Ceux de l’Oisans et de la Matheysine viendront les compléter d’ici peu. 
Aujourd’hui encore, les agents de l’ONF continuent de tenir ces registres mais plus sous la même forme, ni avec la même précision qu’avant, quand ils avaient l’obligation légale de tout consigner dans leur livret quotidien.
Sous format informatique depuis 2016, ces registres rassemblent seulement les éléments marquants relatifs à la forêt. Une dématérialisation des informations et des témoignages qui n’est pas sans interroger les agents des archives.
Pour Mathilde Le Roc’h Morgère, directrice adjointe des Archives départementales de l’Isère, « cette dématérialisation des processus est croissante dans tous les domaines. Or les données électroniques sont beaucoup plus fragiles que les documents papier, du fait de la courte vie des supports et des soucis de lisibilité des formats dans le temps », explique-t-elle. « Aussi, les administrations doivent répondre à un défi réel et pressant : assurer la conservation de ces données très volatiles, au risque sinon de perdre des pans entiers de l’histoire du début du XXIe siècle », met-elle en garde.

Isabelle Brenguier