Installation et transmission
Rencontre au sommet entre cédants et porteurs de projets

Isabelle Brenguier
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Une rencontre a été organisée en Belledonne pour faire se rencontrer cédants et porteurs de projets. Pour discuter, échanger… et plus si affinités.

Rencontre au sommet entre cédants et porteurs de projets
Pour permettre à des cédants et à des porteurs de projets de se rencontrer, la Chambre d'agriculture de l'Isère, la Communauté de communes du Grésivaudan et l'Addear ont organisé une rencontre à Theys.

Dans ce territoire du Grésivaudan, à cheval sur deux massifs et une vallée, on a d’un côté, une population agricole qui, proche de l’arrêt de son activité, s’interroge sur la transmission, et de l’autre, des porteurs de projets qui veulent s’installer, mais qui rencontrent un chemin semé d’embuches.
Afin que ces deux publics aux histoires et aux parcours différents se rencontrent, la Chambre d’agriculture de l’Isère, la Communauté de communes du Grésivaudan et l’Addear (1) de l’Isère, ont organisé une après-midi d’échanges sur ces sujets. Elle a eu lieu le 4 avril dernier, dans la ferme de Françoise Payerne-Baccard, à Theys, en plein cœur du massif de Belledonne. L’objectif était de permettre des discussions… Peut-être plus si un porteur de projets jetait son dévolu sur une exploitation à céder.

Projet de vie

Les motivations des candidats et des agriculteurs en place vis-à-vis du choix de ce métier sont très différentes. Certains, c’est parce qu’ils étaient enfants d’exploitants, ou parce qu’ils en ont épousé un. D’autres, parce qu’ils ont toujours été passionnés d’agriculture, d’élevage, de nature, parce qu’ils veulent ou ont voulu contribuer à « manger mieux ». D’autres encore, parce qu’ils sont habités par les valeurs portées par le métier d’agriculteur.
Pour beaucoup, le projet d’installation en agriculture représente davantage que le choix d’un métier. Il correspond à un projet de vie, une envie de s’établir et de travailler dans un territoire, de s’inscrire dans un environnement, d’être en lien avec la nature…
Certains ont des rêves. Comme Mattéo, Céline, ou Agnès, qui nourrissent le souhait de trouver une terre et une exploitation où s’installer. D’autres craignent les regrets et les désillusions. Comme Michel Lopez qui, contraint d’arrêter brutalement son activité d’élevage de canard située à Allevard à cause de la grippe aviaire, a du terrain et du savoir-faire à offrir, mais qui ne sait pas encore à qui. Ou Françoise Payerne-Baccard qui souhaite prendre sa retraite et céder son exploitation, mais qui a peur que son fils, Félix, ne trouve pas d’associé pour continuer ce qu’elle a créé et qui contribue à garder un paysage ouvert.
« Je me désole quand je vois cette forêt qui nous envahit. Je ferai tout ce que je peux pour maintenir une agriculture et un paysage ouvert. Mais je ne me vois pas encore travailler des années et des années », soupire-t-elle, émue et inquiète par le défi qu’elle sait devoir relever. Ou encore Jacqueline Rebuffet, installée à Laval avec son fils et sa belle-fille, qui va prendre sa retraite le 1er juillet de cette année et qui est convaincue que « pour que les fermes de montagne résistent, elles doivent continuellement s’adapter ». C’est ce qu’elle a fait tout au long de sa carrière. C’est ce qu’elle encourage les jeunes à faire.

Réalités complexes

A Theys et dans les environs, le territoire est attractif. Certes. Tentés par cet environnement montagnard, les candidats à l’installation en Belledonne et en Chartreuse ne manquent pas. Mais les réalités sont plus complexes.
Le foncier, rare et coûteux, est soumis à une forte pression. Les logements sont difficilement accessibles. Le voisinage composé de néo-ruraux, est parfois peu compréhensif vis-à-vis des agriculteurs. Les contraintes de pente et de climat ne permettent pas toutes les cultures. Et il n’est pas facile de vivre du métier.
Les exploitants en place en témoignent. Il faut trouver la taille d’exploitation qui convienne, avec une charge de travail supportable et un revenu suffisant. Ce sont des équations qui ne sont pas si simples que cela à résoudre.
Pour autant, s’ils n’ont pas tous le même objectif, ils ont tous envie d’avancer dans leur projet, qu’il s’agisse de rentrer en activité ou de la céder. Sans regrets. Parfois, cela a tient à peu de choses, à une rencontre, au fait d’être au bon endroit au bon moment. C’est ce qu’ils souhaitent.

(1)   Association départementale pour le développement de l’emploi agricole et rural

Isabelle Brenguier

La ferme Payerne-Baccard

L’exploitation de Françoise Payerne-Baccard, aidée par son fils Félix en tant qu’aide familial, est une ferme de polyculture-élevage implantée à Theys dans le massif de Belledonne. Elle est composée d’une trentaine de vaches laitières de race abondance et de 70 hectares de SAU (Surface agricole utile). Une partie du lait produit est transformé sur place et commercialisé en vente directe à la ferme ou sur le marché du village. Le reste est livré à la coopérative Sodiaal.

IB

Transitions progressives
Plusieurs dispositifs visant à favoriser la transmission et l'installation en agriculture ont été présenté.

Transitions progressives

Trois dispositifs permettant de tester une nouvelle activité agricole ont été présentés durant la rencontre organisée à Theys. 

Pour accompagner les candidats à l’installation et à la transmission du territoire du Grésivaudan, Marion Canaud, conseillère transmission à la Chambre d’agriculture de l’Isère, et Morgane Laurent, conseillère à l’Addear (1), ont profité de la rencontre réalisée à Theys le 4 avril, pour présenter les dispositifs permettant de faciliter les reprises et les cessations.

Le stage-test est l’un de ceux qui fonctionnent bien en Isère. « Dénommé auparavant stage de reprise ou stage-parrainage, il permet un temps de transition entre les deux parties pour tester l’entente, se former et préparer finement son projet de reprise ou d’association. Sur une quarantaine réalisée chaque année dans le département, un tiers conduit à l’installation », indique Marion Canaud. Morgane Laurent a aussi présenté le test agricole en archipel. « Il s’agit de tester son activité chez un agriculteur déjà installé, et si l’expérience est concluante, on reste. Dans ce cas, le porteur de projets n’est pas stagiaire. Il est en activité, mais il limite les risques, car pour la partie financière, il est porté par une couveuse d’activités (2). Quant au cédant, l’initiative lui permet d’amorcer une transition progressive », indique la conseillère. Le dernier dispositif présenté est tout nouveau. « Tellement nouveau qu’il n’est pas encore en place », précise Marion Canaud. « Il s’apparente à un emploi aidé dans le cas de fermes exploitées par des personnes de plus de 50 ans. La différence avec un stage-test est qu’il n’y a pas de projet de transmission de la ferme. L’objectif premier de cette procédure est de transmettre du savoir-faire et des compétences. C’est du salariat combiné à de la formation », poursuit-elle.

(1)   Association départementale pour le développement de l’emploi agricole et rural

(2)   La couveuse d’activité Starter permet, à travers l’établissement d’un contrat Cape (Contrat d’appui au projet d’entreprise), l’hébergement juridique de l’activité du porteur de projet.

IB