Premiers concernés par les impacts du dérèglement climatique, les agriculteurs doivent faire face à une accélération des aléas. D’un autre côté, la globalisation des échanges concourt à renforcer les pressions sanitaires. Interview croisée des responsables de la FNSEA et de Jeunes agriculteurs en charge de ces dossiers.
Comment JA et la FNSEA travaillent-ils à l’anticipation des risques sanitaires et climatiques ?
Manon Pisani (JA) : « Depuis plusieurs années maintenant, nous travaillons avec la FNSEA et ses associations spécialisées à une amélioration des bonnes pratiques de biosécurité et au suivi de prophylaxie en élevage, ainsi qu’à la vulgarisation et la diffusion de celles-ci. En effet, il nous semble essentiel que ces moyens de prévention soient connus et accessibles à tous. La mise en place de la biosécurité dans les élevages, quels qu’ils soient, le bon suivi des prophylaxies, ou encore la vaccination préventive, doivent être considérés comme des outils de gestion des risques et, de ce fait, participent à l’anticipation des risques sanitaires. »
Laurent Saint-Affre (FNSEA) : « Chez JA et à la FNSEA, nous croyons fermement que la prévention est essentielle pour faire face aux crises sanitaires animales. C’est pourquoi nous militons pour renforcer la stratégie vaccinale dans les élevages, avec une prise en charge des vaccins par l’État, afin que tous les éleveurs qui le souhaitent puissent y avoir accès. En garantissant un accès simplifié aux vaccins et en anticipant les risques, nous protégeons les troupeaux et limitons les pertes économiques, tout en sécurisant l’avenir de nos exploitations. »
Jean-Baptiste Sablairoles (JA) : « Dans un contexte où les aléas devraient s’amplifier, Jeunes agriculteurs met en avant le développement des diagnostics de risques pour permettre aux jeunes, qui souhaitent s’installer, d’avoir une meilleure visibilité sur la pérennité de leur exploitation. Ces diagnostics doivent permettre ensuite de constituer des contrats d’avenir liant l’agriculteur, les pouvoirs publics et les filières, et d’accompagner les agriculteurs et les filières dans les adaptations et transitions nécessaires. »
Comment JA et la FNSEA sont-ils acteurs dans la mise en place des mesures de protection des exploitations ?
M.P. : « Pendant la crise d'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) en 2021-2022, 22 millions de volailles ont été abattues, dont une partie d’abattages préventifs. Lors de ces crises sanitaires, il est important d’avoir des syndicats réactifs afin d’enjoindre les pouvoirs publics à mettre en place les mesures de protection le plus rapidement possible pour endiguer la propagation des maladies. Bien qu’elles soient nécessaires, nous sommes aussi là pour rappeler les impacts psychologiques et économiques énormes que peuvent avoir les mesures de protection, comme l’abattage préventif ou la restriction de mouvement. Il est aussi nécessaire de faire remonter à l’administration toutes les subtilités des productions sur le terrain afin de négocier d’éventuelles dérogations aux mesures de protection définies, lorsque cela est cohérent entre la production et le risque sanitaire. »
Franck Laborde (FNSEA) : « La réforme historique et structurante applicable depuis janvier 2023 repose sur une responsabilité partagée entre les agriculteurs, les assureurs et l’État. Si l’équilibre global qui en découle permet de bénéficier d’une couverture universelle des risques climatiques et d’un accès facilité à l’assurance, il réaffirme aussi le caractère fondamental de la prévention. La loi impose désormais que les mesures et les pratiques de prévention mises en œuvre par les agriculteurs pour réduire leur exposition aux aléas climatiques soient prises en compte par les assureurs dans le calcul de la prime d’assurance. C'est une véritable avancée qui mérite désormais d’être suivie des faits ! »
Comment JA et la FNSEA accompagnent-ils le réseau pendant les crises ?
M.P. : « Dans les situations de crise sanitaire comme nous l’avons vécu avec l’IAHP et comme nous le vivons encore avec la maladie hémorragique épizootique (MHE) et la fièvre catarrhale ovine (FCO), en tant qu’élus en charge de ces dossiers, nous sommes mobilisés quasi quotidiennement pour échanger avec les services du ministère de l’Agriculture. Nous sommes l’oreille attentive de nos deux réseaux respectifs afin de faire entendre à l’administration les voix du terrain. Notre rôle est de travailler conjointement sur les mesures de lutte à mettre en place à court terme, mais aussi à moyen et long terme sur la négociation des enveloppes d’indemnisation et les critères pris en compte. »
J-B.S. : « Les conditions climatiques particulièrement pluvieuses sur une partie du territoire français ces derniers mois, et une sécheresse qui s’intensifie d’année en année dans le Sud de la France, ont terriblement impacté l’activité agricole et ont engendré des pertes de récolte. Notre mission, dans ces conditions, est de recenser les dommages pour identifier les secteurs les plus touchés et de relayer les demandes individuelles auprès des préfets pour accélérer les procédures d’indemnisation. »
S-A. : « JA et FNSEA ont su anticiper et accompagner efficacement le réseau agricole face aux crises sanitaires en mettant en place des outils adaptés. Le Fonds national de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), créé en 2012 sous notre impulsion, est devenu un outil central dans la gestion des risques sanitaires et environnementaux. Avec plus de 63 millions d’euros d’indemnités versées, 14 500 exploitations soutenues et 210 programmes d’indemnisation mis en place, le FMSE est un véritable bouclier pour nos agriculteurs. Lors de l’épidémie de MHE en 2024, le FMSE, en relai des indemnisations de l’État, a pris en charge 90 % des pertes animales et des frais vétérinaires, illustrant son efficacité et sa réactivité. »