Le coin des pros
Une aide financière pour les contrats de professionnalisation

La MFR de Chatte et la FDSEA de l'Isère ont signé un accord destiné à aider financièrement les exploitants qui s'engagent à embaucher des jeunes en contrat de professionnalisation. Un atout pour les futurs installés.
Une aide financière pour les contrats de professionnalisation

Le contexte économique ne souffre pas l'approximation. Quand un jeune agriculteur prend les rennes d'une exploitation, il doit pouvoir piloter son entreprise tant sur le plan technique qu'au niveau économique. D'où l'importance d'une formation solide. Pour répondre aux besoins de la profession, le réseau des MFR de la Drôme et de l'Isère propose un BTS Acse en contrat de professionnalisation. Cette formation de niveau III (bac +2) présente l'avantage de combiner formation pratique et théorique. Le problème, c'est que le contrat de professionnalisation, revient plus cher à l'employeur que le contrat d'apprentissage. Plus chargé et moins « accompagné » par les pouvoirs publics, il peut apparaître comme moins attractif aux yeux des tuteurs potentiels. Pourtant les étudiants le plébiscitent, notamment au regard des perspectives de rémunération qu'il propose : « Quand on est étudiant c'est bien mieux, parce que cela permet de faire face à nos dépenses », explique Justine Chapot qui vient d'entamer un BTS Acse à la MFR de Chatte. Pour les stagiaires de moins de 26 ans, il est en effet prévu une rémunération de 65 à 80% du Smic moyennant une présence importante en entreprise. Encore faut-il trouver un employeur capable d'assumer de tels appointements. « Si les exploitants sont plutôt favorables à l'accueil d'un jeune, au niveau financement, ça coince », explique Béatrice Ferron de la MFR de Chatte.

Coup de pouce de 2 000 euros

C'est ce qui a poussé le centre de formation à solliciter un coup de pouce de la FDSEA de l'Isère. Depuis la rentrée de septembre, les agriculteurs qui embauchent un jeune en contrat de professionnalisation, via Agri Emploi, reçoivent une aide de 2 000 euros de la part du syndicat. Une première en France. « Dans un contexte économique comme celui d'aujourd'hui, il n'y a pas beaucoup de signaux positifs indiquant que l'agriculture est un métier d'avenir : on voit de nombreux jeunes bifurquer vers des voies parallèles, regrette Pascal Denolly, son président. Avec cette aide financière, nous avons voulu envoyer un signal fort en direction d'une formation qualifiante qui met l'accent sur la gestion d'entreprise de façon pertinente. »

Trois contrats de professionnalisation ont déjà été conclus entre Agri Emploi et la MFR de Chatte. Un début timide, mais prometteur. Car agriculteurs et étudiants trouvent largement leur compte dans la formule. « J'étais en alternance pour mon bac pro et j'ai voulu continuer dans cette voie, explique Manon Girard-Carrabin. Je trouve intelligent d'apprendre et de mettre tout de suite en application ce que j'ai vu en cours. » Son tuteur, Alexandre Dollé, éleveur d'angus à Saint-Martin-de-la-Cluze, apprécie de son côté l'aide ponctuelle apportée par l'étudiante, mais aussi son regard expert : « J'ai un projet d'installation avec ma femme, indique-t-il. La présence de Manon va me permettre d'alimenter ma réflexion sur l'évolution de l'exploitation. » La jeune fille, qui possède déjà un bon bagage, doit en effet étudier un cas concret dans le cadre de sa formation. Elle va donc mettre en pratique chez son tuteur ce qu'elle aura appris en cours. Combinée à son expérience issue de stages antérieurs, sa formation va lui permettre de poser poser un regard avisé sur « ce qui marche... et ce qui ne marche pas ».

Flexibilité

Pour son contrat de professionnalisation, Manon Girard-Carrabin va d'ailleurs partager son temps entre la ferme de son tuteur et celle d'un autre exploitant, Daniel Maubleu, à Sinard. « Tout seul, je n'aurais pas pu payer Manon à plein temps, car j'ai déjà un salarié à mi-temps, justifie Alexandre Dollé. Avec cette formule et l'aide qui nous est accordée, ça ne nous revient pas trop cher. Pour simplifier les démarches, nous passons par Agri Emploi qui nous facture moitié-moitié. Ça me coûte un peu plus de 300 euros par mois pour un petit quart temps. Comme Daniel et moi communiquons très bien, il peut y avoir pas mal de flexibilité entre les deux emplois du temps. » Pour Manon, ce qui pouvait apparaître comme une contrainte au départ devient un atout supplémentaire : « J'ai envie de me diversifier, confie-t-elle. Aujourd'hui, on vit dans un monde où il faut plusieurs productions pour vivre. » Avec ce double contrat, l'étudiante va bénéficier de deux expériences pour le prix d'une. Un bon départ dans la vie professionnelle.

Marianne Boilève