Restauration scolaire
A la cantine de Barraux, on sert des produits bios et locaux
Depuis la rentrée, la commune de Barraux a fait le choix de passer sa cantine en gestion directe. Les enfants profitent ainsi de plats à base de produits bios et locaux préparés sur place.
Le nouveau restaurant scolaire de Barraux, dans le Grésivaudan, est une cuisine qui plaît aux enfants et qui donne aussi aux parents envie d’y déjeuner. Et pour cause. Depuis début septembre, les 160 enfants des écoles maternelle et élémentaire de la commune (1) profitent des bons petits plats préparés sur place par un chef cuisinier embauché spécialement pour eux.
« Passer notre cantine en gestion directe faisait partie de nos projets. Mais quand les coûts de notre prestataire ont augmenté de 20 % et que la qualité des repas s’est trouvée dégradée, nous avons voulu que les choses avancent », explique Christophe Engrand, le maire de Barraux.
Aussi, les élus et les agents des services scolaires et périscolaires de la commune se sont mis en ordre de bataille pour repenser entièrement leur offre de cantine. C’était en novembre 2022.
Leur délai de mise en œuvre était court, car, ils voulaient que les enfants aient accès à ce nouveau service dès la rentrée suivante. Un vrai défi.
Cinq euros
Nadine Petroz
Le cahier des charges était précis. « Les élus voulaient que les enfants mangent des produits locaux et bios, mais sans augmenter le tarif du ticket de cantine à cinq euros pour tous », indique Nadine Petroz, responsable des services scolaires et périscolaires de Barraux.
L’idée paraît simple mais pour la concrétiser, une réorganisation s’imposait.
En s’inspirant d’autres initiatives portées par des collectivités voisines, Christelle Faivre-Chalon, l’adjointe aux affaires scolaires, Valérie Lasibille, la directrice générale des services et Nadine Petroz ont établi leur plan d’actions pour faire passer la cantine de la commune en gestion directe.
« Faire simple et bon »
En plus de reconcevoir l’approvisionnement des produits, la commune a aussi dû réaliser d’importants travaux pour aménager une cuisine dans les locaux, passer d’un service à table à un self et embaucher un cuisinier.
Formé en école hôtelière, Stéphane Bordiec a été chef dans différents établissements avant de se tourner vers les collectivités et de travailler dans des centres pour sportifs de haut niveau et des Ehpad, avec pour seul credo : « faire simple et bon ».
Habitant le village depuis plus de 20 ans, il a tout de suite été séduit par ce projet de cuisine directe lui permettant de cuisiner comme il le voulait des produits de qualité. Il a vite été considéré comme le candidat idéal.
Recruté le 1er juillet 2023, il a été chargé de tout mettre en place.
Il a dû acheter le petit matériel, élaborer les plans de maîtrise sanitaire, les plans d’hygiène, les marches en avant… Car dans une cuisine collective, la règlementation est dense et la traçabilité doit être irréprochable.
Puis, il a cherché ses fournisseurs, avec comme premier critère la proximité. Il s’est donc rapproché des deux boulangeries de la commune, de producteurs locaux comme les maraîchers de Plantzydon, à Pontcharra, de la boucherie « Theys Salaisons », de l’association « Mangez bio Isère » qui, avec ses 70 producteurs, lui procure beaucoup de facilité.
80 % de produits bios
Stéphane Bordiec prépare ses menus pendant les vacances précédant chaque période scolaire pour les sept semaines à venir. Ils sont suivis par une diététicienne et une nutritionniste, et le logiciel « e-Quilibre » l’aide sur le nombre de grammage nécessaire par enfant, les allergènes, les coûts de revient…
Afin que les parents sachent ce que mangent leurs enfants, l’approvisionnement est toujours indiqué. « Quand on stipule que le plat est bio, cela signifie que tous les ingrédients sont bios, jusqu’au beurre ou à l’huile d’olive utilisés pour les pâtes brisées ou feuilletées », précise Nadine Petroz.
Finalement, Stéphane Bordiec va bien au-delà des obligations de la loi Egalim, qui stipule que « la restauration collective doit comporter au moins 50 % de produits durables et de qualité dont 20 % issus de l’agriculture biologique dans ses achats alimentaires ».
« A Barraux, nous sommes désormais à plus de 80 %. Toute la cuisine est « faite maison, préparée sur place avec des produits frais et de saison le jour même où elle est servie », explique Stéphane Bordiec. Son plaisir est d’aller chercher ses pommes de terre le mercredi et de servir les frites aux enfants le jeudi.
Quelques astuces
« Je prépare la cuisine que j’aime. Elle est simple, adaptée aux enfants. Mon seul objectif est qu’ils mangent et surtout qu’ils goutent », assure-t-il.
Et d’évoquer ses astuces. « Ce serait trop facile de faire burger-frites. Alors, un jour, je fais les burgers avec un légume et le lendemain, je sers des frites avec des moules. Il y a des goûts qu’ils ne connaissent pas. Je prends plaisir à les leur faire découvrir. Mais en majorité, ils mangent bien », ajoute-t-il.
Preuve en est, la très importante diminution des déchets alimentaires générés par rapport à l’année dernière. « Aujourd’hui, nous n’avons plus que 500 grammes par jour. Et nous faisons le compost », souligne fièrement la responsable des services scolaires.
340 000 euros d’investissement
Nadine Petroz et Valérie Lasibille se réjouissent de l’aboutissement de ce projet mené dans ce délai de neuf mois. « Nous constatons que lorsque toutes les parties adhèrent, on peut obtenir de très beaux résultats. C’était un challenge. Mais tout le monde s’est employé à le relever. Les élus, les agents municipaux, le maître d’œuvre, les entreprises qui ont terminé les travaux 15 jours avant la date de rendu prévue, et le chef qui a tout de suite compris les ambitions du projet », soulignent-t-elles.
Il est encore difficile de chiffrer le coût total du projet pour la commune qui s’est donnée le premier trimestre de l’année scolaire pour établir avec précision les coûts de revient des repas et réaliser un premier bilan.
Pour autant, l’investissement est loin d’être neutre pour la petite collectivité de 2 000 habitants, puisque le montant des travaux s’est élevé à 340 000 euros TTC, dont 100 000 euros rien que pour le mobilier de cuisine. Mais les premiers retours des enfants et de leurs parents sont positifs.
A l’image d’Églantine, en classe de CM2, qui estime que « c’est meilleur que l’année dernière, on voit bien que les plats sont préparés par le cuisinier, que la viande est de meilleure qualité ». Et de sa maman, Audrey, qui se réjouit qu’on serve à sa fille des produits bios et locaux.
Un apprentissage
Au-delà de profiter de bons repas chaque jour, les petits barrolins bénéficient aussi d’une démarche d’éducation à une alimentation de qualité. Incontestablement, c’est un apprentissage.
Peut-être contribuera-t-il à ce que à ces consommateurs de demain acquièrent dès aujourd’hui de bonnes habitudes alimentaires…
La démarche de la commune est bien avancée. Mais elle n’est pas totalement aboutie puisque ses services sont aussi engagés dans d’autres projets portés par le Département et la Communauté de communes du Grésivaudan leur permettant de s’approvisionner encore plus en légumes -et légumineuses- locaux.
Isabelle Brenguier
(1) et ceux qui fréquentent l’espace jeunes pendant les vacances scolaires
Aux côtés des communes
Grâce à des moyens techniques et financiers, la communauté de communes du Grésivaudan accompagne les collectivités qui veulent s’approvisionner en circuits courts.
Engagée dans le Projet alimentaire inter-territorial (PAiT) de la grande région grenobloise, la Communauté de communes du Grésivaudan a acté dans ses orientations politiques sa volonté de « conserver sa capacité de production agricole pour répondre aux besoins alimentaires de ses habitants et leur permettre de mettre davantage de produits locaux dans leur assiette ».
Aussi apporte-t-elle son soutien -financier et technique- aux collectivités désireuses de se lancer dans des démarches permettant d’atteindre ces objectifs.
Différentes formations
Avec son projet de cantine en gestion directe, la commune de Barraux en a profité. Christelle Faivre-Chalon, l’adjointe aux affaires scolaires de la mairie, Valérie Lasibille, la directrice générale des services et Nadine Petroz, la responsable des services scolaires et périscolaires, chevilles ouvrières de ce projet, ont ainsi bénéficié de différentes formations intégrées au programme d’accompagnement collectif du PAIT.
Dispensées par l’Adabio (1), Nourrir l’Avenir (2), et la Ligue de l’enseignement de l’Isère, elles ont pu rencontrer de nombreux interlocuteurs qui, forts de leur expérience, ont répondu aux questions très concrètes qu’elles se posaient, en matière d’approvisionnement, d’organisation, et d’horaires de travail pour le cuisinier…
Aujourd’hui, dans le territoire de la Communauté de communes du Grésivaudan, les restaurants scolaires des communes du Plateau des Petites Roches, de Crolles, d’Allevard, de Theys, des Adrets, de Revel, de Saint-Martin-d’Uriage, de Chamrousse et de Barraux sont en gestion directe. Celle du Touvet y sera aussi d’ici peu.
IB
(1) Association de développement de l’agriculture biologique qui accompagne les collectivités dans leurs projets agricoles et territoriaux, en particulier sur la restauration collective, en lien étroit avec les fournisseurs de la restauration collective
(2) une SCIC qui rassemble des formateurs, cuisiniers, diététiciens, gestionnaires et autres acteurs de la restauration collective et forme un réseau d’experts techniques pour la formation de professionnels de la restauration collective
(3) une association qui accompagne les collectivités et associations dans leur projet de développement de service de restauration et propose des formations à destination des équipes techniques intervenant sur le temps de pause méridienne