Sanitaire
La vaccination FCO se met en place

Isabelle Doucet
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Les autorités sanitaires et le GDS sont intervenus lors d’une réunion avec les éleveurs du Trièves et de Matheysine afin de les informer de l’avancement des mesures sanitaires concernant l’épidémie de FCO.

La vaccination FCO se met en place
Les éleveurs étaient nombreux pour assister à la réunion sur la FCO à Saint-Jean-d'Hérans. Photo : ID TD

La vague de l’épidémie de FCO (1) a désormais atteint le sud du département.
Aussi les éleveurs ovins et bovins du Trièves et de Matheysine se sont réunis nombreux mercredi 18 septembre à Saint-Jean-d’Hérans pour rencontrer les autorités sanitaires et le GDS de l'Isère (2).
Tous partagent une seule et même attente : et maintenant, que faire ?
Tests, vaccination, entre FCO 8 présente et FCO 3 menaçante, les protocoles se mettent en place alors que la violence de l’épizootie a pris tout le monde de court.
« Si certains veulent taper sur le GDS, faites-le », a lancé en introduction Sébastien Simian, le président du GDS.


Mais pour lui, « certains organismes n’ont pas joué leur rôle de dialogue ». Touché comme plus de la moitié des éleveurs en Isère, il rappelle que « le GDS est une association pour les éleveurs et par les éleveurs », sans obligation de cotisation.
Il déclare : « Lorsque le GDS est sollicité il sait répondre en moins de huit jours. » Le président énumère les services apportés par le groupement comme la caisse coup dur, les formations gratuites ou le déplacement sans frais du vétérinaire dans les exploitations.

Une situation catastrophique

La détresse des éleveurs face à l’hécatombe étant palpable, nombreux sont ceux qui ont pu exprimer leur colère et leur désarroi.
« Le but de cette réunion est de regarder devant et non pas en arrière. Il y en a encore pour deux ans avec la FCO
 8, la 3 et la MHE », a prévenu Jean-Luc Delrieux, le directeur adjoint de la DDPP (3).
Comme tous les services de l’État, lui aussi mis à l’index par les éleveurs.
Face aux retards de livraison des vaccins, au défaut d’information et au manque de préconisation, le responsable tente d’expliquer combien, face à l’explosion de l’épidémie, les décisions du niveau national, « budgétaires et politiques » sont frappées d’inertie, surtout en l’absence de ministre jusqu’alors.
La situation en Isère est pourtant catastrophique. Plus de 700 suspicions ont déjà été établies et touchent 3/5 ovins et 2/5 bovins ainsi qu’une vingtaine de chèvres.
Depuis le mois d’août, la mortalité des bovins a bondi de 30 % et celle des ovins a été multipliée par quatre, touchant surtout les béliers et les animaux adultes.

Les vaccins arrivent

Pour la FCO3, Françoise Hugon, cheffe du service santé animale de la DDPP, annonce que le vaccin arrive. Il est gratuit.
Elle précise que les doses déjà achetées en privé, en revanche, restent aux frais des éleveurs. Un autre vaccin, couvrant les sérotypes 1, 3 et 8 devrait aussi être à disposition.
Les autorités sanitaires indiquent que la FCO 3 n’est pas encore arrivée en Isère.
Le département a été placé en zone régulée car un cas a été détecté en Saône-et-Loire. Il s’agissait d’une bête destinée à l’export.
Selon des études récentes, ce sérotype entraînerait 25 % de mortalité chez les ovins, une baisse de la production laitière chez les bovins, mais ne toucherait pas les caprins.

Trois visites prises en charge

Si la vaccination FCO 3 est prise en charge depuis le 1er septembre (vaccins commandés le vétérinaire sanitaire), en revanche, les vaccins pour la FCO 8 ne sont pas gratuits, rappelle Françoise Hugon.
Par ailleurs, elle conseille aux éleveurs est « de continuer à faire des suspicions car si la profession obtient des indemnisations, c’est le point de départ. »
La responsable précise que l’État prend en charge jusqu’à trois visites de vétérinaire par espèce. Ces trois prélèvements permettent de constituer un fichier.
Un éleveur dénonce cependant le fait que les vétérinaires sollicités n’ont pas encore été payés pour leurs visites. Françoise Hugon s’est voulue rassurante. « On va les payer », a-t-elle déclaré.

Un effet de masse

Jean-Luc Delrieux préconise pour sa part de vacciner tous les animaux, FCO8 et 3, brebis gestantes ou pas.
« C’est l’effet de masse qui jouera. Le bénéfice sera supérieur au risque de vacciner. »
Le vaccin sert aussi à éliminer les vagues, le virus agissant comme lors de l’épidémie de covid.
Il est en outre conseillé aux éleveurs de « prendre les doses gratuites et de les conserver au frigo ». Beaucoup s’interrogent sur le moment opportun de vacciner les bêtes et sur la durée d’immunité des vaccins.
Aurore Tosti, la directrice du GDS, fait remarquer que la période critique de propagation de la maladie court jusqu’à fin novembre. Le virus serait inactif à partir de 10-12°.
« La période d’activité vectorielle est au printemps », ajoute-t-elle. La rentrée des animaux en bâtiment peut être propice à la vaccination.
La décision de vacciner relève du choix personnel des éleveurs.

Vacciner dès maintenant

Les dernières préconisations du GDS en date sont de vacciner contre la FCO 3 dès maintenant.
Les vaccins disponibles chez les vétérinaires sont : Bultavo 3 pour les ovins (une seule infection, 1 ml/animal) ; Bluevac 3 pour les ovins et bovins, mais distribué aux éleveurs de bovins (2 injections de 4 ml à 3-4 semaines d’intervalle).
Possibilité de finir les flacons de Bluevac sur les ovins (2 ml par ovin) pour les éleveurs qui possèdent les deux espèces.
Pour les deux vaccins, l’immunité totale est atteinte au bout trois semaines, un début d’immunité commence en 10 jours.
Le vaccin de la FCO 3 n’existe que depuis le mois d’août. Il a été élaboré selon la même technologie que le 8 « et n’a pas forcément d’effets secondaires », indique Françoise Hugon.
Pour la FCO8, le vaccin doit faire l’objet d’un rappel annuel.
À l’issue de la réunion de Saint-Jean-d’Hérans, un éleveur conclut : « La FCO, c’est comme le covid, des choses marchent ou pas, mais on ne peut pas rester sans rien faire quand animaux sont malades. »
Enfin, Jérôme Fauconnier, le président de la Communauté de communes du Trièves, a assuré les éleveurs du soutien de la collectivité, en lien avec les mesures qui seront prises par la Région et le Département.
Isabelle Doucet

(1) FCO : Fièvre catarrhale ovine
(2) GDS : Groupement de défense sanitaire de l’Isère
(3) DDPP : Direction départementale de la protection des populations

La FCO en chiffres
Les symptômes de la FCO sur brebis. Photo : Florian Oriol

La FCO en chiffres

L’enquête menée par la conseillère de la Chambre d’agriculture de l’Isère, Catherine Vénineaux, auprès de 93 élevages ovins établissait, début septembre, 22 % de mortalité dans les élevages de la Bièvre.
Ce taux n’était « que » de 10 à 15 % dans le Trièves et en Matheysine où la maladie continue de progresser.
Sur les 14 000 brebis du département, le taux de mortalité est de 9 %. Les plus gros troupeaux payent le plus lourd tribut avec 40 à 50 % de pertes dans certains secteurs.
La mortalité chez les béliers est de 20 % en moyenne. En revanche, les troupeaux en alpage ont été jusqu’alors mieux épargnés.
Chez les brebis, 1/3 des bêtes contaminées meurent. « Plus les bêtes grandissent et plus elles sont sensibles à la maladie », indique la conseillère.
Elle précise qu’il n’y a pas de différence dans les races touchées, le moucheron piquant les animaux là où il y a le moins de laine.
Catherine Vénineaux s’attelle désormais à dresser une liste de béliers vaccinés contre la FCO 3 et 8 qu’elle pourra fournir aux éleveurs qui peuvent aussi entamer des démarches de leur côté.
Il est aussi conseillé d’améliorer la ration des agnelles avant l’agnelage (entre 300 et 500 g de concentré supplémentaire pour les retaper).
Reste dans les mois à venir à dresser le bilan des dégâts en termes d’infertilité des béliers, d’avortement, de mortalité des agneaux, de baisse de croissance, de difficultés à recapitaliser les troupeaux.
ID

Cas de force majeure

La DDT rappelle que le cas de force majeure lié à la FCO est applicable pour les campagnes PAC 2024 et 2025.
Les animaux morts seront pris en compte au regard du seuil d’éligibilité.
L’impact de la FCO n’est pas pris en compte pour les aides ovines 2024 car la maladie est survenue après la période de détention obligatoire (PDO). Pour l’aide bovine 2024, il est tenu compte des animaux morts pendant la PDO.
Pour la campagne 2025, les éleveurs ovins touchés pourront bénéficier d’une dérogation. Pour les bovins, la perte d’animaux pourra être primée. Sera également prise en compte la baisse des vêlages dans le calcul du nombre d’UGB femelles.
Concernant l’aide à la protection et si la taille du troupeau diminue, ce dernier reste éligible mais les plafonds pourront être revus.
Il n’y aura pas d’impact concernant les aides surfaciques pour la campagne 2024. Le plafonnement des surfaces pastorales ligneuses tiendra compte en 2025 du cas de force majeure.
Idem pour l’ICHN : pas d’impact en 2024 et application du cas de force majeure en 2025. Pas de sanction non plus concernant les MAEC et l’aide à la conversion à l’agriculture biologique (CAB).
La DDT insiste sur l’importance de signaler les troupeaux affectés. Un lien de démarche simplifiée « Demande d’activation du cas de force majeur suite à épidémie de fièvre catarrhale ovine (FCO) » permet aux éleveurs d’éviter l’envoi de courrier.
Cas de force majeure
Dans la salle, à Saint-Jean-d’Hérans, certains éleveurs râlaient devant ces nouvelles contraintes. « Nous sommes en pleine crise. Nous allons encore devoir faire de l’administratif alors que nous sommes descendus dans la rue pour plus de simplification. Ne serait-il pas plus simple de prendre les chiffres de 2024 et de les reporter ? », interroge un éleveur.
ID