Syndicalisme
« La production française est vraiment mise à mal »

Isabelle Doucet
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Les responsables de la FDSEA de l’Isère ont rencontré les sous-préfets de Vienne et de La Tour-du-Pin pour faire remonter les difficultés de la profession.

« La production française est vraiment mise à mal »
Richard Duvert (à g) et Aurélien Clavale (à d), ont rencontré Christian Michalak, le sous-préfet de La Tour-du-Pin.

À la suite de  l’action en GMS menée le mardi 21 novembre dernier à l’appel des syndicats FDSEA et JA de l’Isère, deux délégations de représentants syndicaux ont rencontré les sous-préfets Denis Mauvais à Vienne et Christian Michalak à La Tour-du-Pin.
« Notre objectif était de présenter en préfecture nos revendications à la suite des actions conduites au niveau national et en Isère, explique Aurélien Clavel, secrétaire général de la FDSEA 38. Notre mot d’ordre est : « Alimentation française, bientôt la faim », car nous estimons que la production française est vraiment mise à mal. Il suffit de se référer à la hausse des importations. Si l’on veut arrêter cette hémorragie, il faut agir sur les prix. C’est pour cette raison que nous sommes allés dans les GMS car certains industriels, pour éviter de payer le juste prix agricole en France, vont s’approvisionner à l’étranger et jouent sur l’étiquetage des produits. »
Il ajoute : « La population française est de plus en plus sensibilisée à la production française », aussi les exploitants agricoles demandent aux industriels et aux GMS de jouer le jeu.
L’enjeu est le respect de la loi Egalim lors des prochaines négociations commerciales.
Pendant leur échange avec le sous-préfet, Aurélien Clavel et Richard Duvert ont aussi abordé la question « des moyens de production que l’on donne à l’agriculture française, qui a de plus en plus de mal à se maintenir. Cela concerne l’irrigation, les taxes, ou encore la suppression de certaines molécules alors qu’il n’y en a pas d’autres pour les remplacer, plongeant dans l’impasse des filières complètes, comme c’est le cas de la cerise. »
Les questions de la prédation et les difficultés de la production nucicole ont également été abordées.
« Nous avons eu un échange très ouvert et le sous-préfet a pris note de nos problématiques, reprend le syndicaliste. Il nous a garanti qu’il ferait remonter ces questions. »
Aurélien Clavel rappelle aussi que le mot d’ordre national est : « On marche sur la tête », ce qui explique les panneaux retournés dans nombre de départements.
« C’est pour illustrer l’incohérence entre la volonté de souveraineté alimentaire alors que l’on ne s’en donne pas les moyens et que tout ce qui est mis en œuvre est empêché. »

Des prix abusifs

À Vienne, la délégation était composée de Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère, de Didier Serre et de Nicolas Jourdan.
Les exploitants ont présenté au sous-préfet les produits douteux collectés la veille dans les supermarchés.
Étiquetages qui portent à confusion quant à l’origine des produits pourtant affichés comme français, prix exorbitants notamment en fruits et légumes « où les GMS font plus de 50 % de marges », Jérôme Crozat s’interroge : « comment voulez-vous que le consommateur s’en sorte avec des prix abusifs ? »

Tromperie sur les étiquettes dénone la FDSEA

Des consommateurs qui ne sont plus dupes et qui ont témoigné spontanément auprès des syndicalistes de l’ambiguïté, voire de la tromperie de certaines étiquettes.
« Nous avons aussi échangé sur différents dossiers isérois comme la réserve naturelle de Sablons, le demi-échangeur de Reventin-Vaugris et les attaques incessantes de la part des écologistes, relayées par les grands médias, ajoute Jérôme Crozat. Le sous-préfet s’est montré à l’écoute et essaie de mener un travail avec les élus. Il a une très bonne connaissance des branches intégristes auxquelles nous sommes confrontés. »
Autant de malaises en agriculture que les sous-préfets feront remonter au ministère dédié. Mais le leader syndical reste amer.
Il déclare : « Nous vivons sur l’héritage de ce qu’ont construit nos grands-parents. Aujourd’hui nous ne sommes plus capables de créer pour notre avenir et celui de nos enfants. »
Une nouvelle rencontre est prévue en préfecture au mois de janvier.

Isabelle Doucet

 

Egalim : peut mieux faire

À l’occasion de la dernière session de la Chambre d’agriculture de l’Isère, le 23 novembre, Marine Raffray, de Chambre d’agriculture France, a présenté les évolutions de la loi Egalim.
Selon elle, les objectifs visant à permettre un meilleur équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole, une alimentation plus saine et plus durable, et une plus juste rémunération des producteurs laissent « un bilan mitigé ».
« Dans certaines filières, la contractualisation est restée peu développée, et les contrats laissant la possibilité de s’appuyer sur des indicateurs de coûts de production, ne sont pas allés jusqu’à l’obligation d’un prix les couvrants. Les négociations commerciales sont encore compliquées et les interdictions de promotions ont pu être contournées », précise-t-elle.
Pour autant, même si la grande distribution a fait plus de marges sur des produits dits d’appel, elles ont tout de même permis de redonner un peu d’oxygène aux agriculteurs. Ex-président du Pôle Agroalimentaire de l'Isère attaché à ce que les producteurs retrouvent de la valeur ajoutée, Pascal Denolly avait suivi avec attention les évolutions d’Egalim.
Il estime aujourd’hui que « même si c’est loin d’être parfait, si leur efficacité est modeste, ces évolutions législatives ont permis de passer des caps qui n’avaient jamais été atteints. Il faut maintenant s’appuyer sur ce travail pour aller plus loin », avance-t-il ainsi.

IB