Alpes
Un verdissement multifactoriel

Morgane Poulet
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L’accélération du verdissement des Alpes depuis au moins trente ans s’explique par trois phénomènes, selon Philippe Choler, chercheur au CNRS de Grenoble.

Un verdissement multifactoriel
Les sommets des Alpes verdissent depuis une trentaine d'années en raison de différents facteursqui agissent les uns sur les autres.

Lors de sa conférence intitulée « Pourquoi les sommets des Alpes verdissent-ils depuis au moins trente ans ? » et tenue le 3 février à Seyssinet-Pariset, Philippe Choler, chercheur au CNRS de Grenoble, évoque trois principaux phénomènes, qui agiraient comme un cercle vicieux. Ce dernier s’accroîtrait avec les années.

Climat et azote

Le réchauffement climatique provoque un « déneigement plus précoce et des étés plus chauds », explique Philippe Choler. En moyenne, 16 jours d’enneigement sont perdus chaque année. Cela rend les Alpes plus favorables au verdissement car les prairies sont rendues visibles de plus en plus longtemps dans les massifs.
La pollution atmosphérique engendrée par les activités humaines accentue également le phénomène de verdissement des Alpes. L’industrialisation a pour conséquence un relâchement d’azote dans l’air, ce qui fertilise les sols et augmente donc la densité de zones herbagères.

Prolifération du mélèze

Au néolithique, les forêts étaient déboisées jusqu’à parfois 500 m afin de favoriser la pratique du pastoralisme. Qui plus est, les forêts étaient entretenues, le bois coupé. « Cette activité est maintenue jusque vers la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle », explique Philippe Choler. Mais dès la fin des années 1950, « les alpages sont moins entretenus, le bois est moins valorisé et il y a donc moins de déboisage ». Le climat devient ainsi favorable à la croissance de la forêt, ce qui est accru par le réchauffement climatique.
Le principal bénéficiaire de cette diminution de l’entretien des forêts : le mélèze. Depuis 60 ans, les scientifiques constatent une implantation importante de cette espèce dans les Alpes internes du Nord.

Pour en savoir plus sur le recul du déboisement dans les alpages :

Pastoralisme

Des changements dans la pratique du pastoralisme auraient également un impact sur le verdissement des Alpes, selon Philippe Choler.
« Le parcage des bêtes, lié à la prédation croissante, concentre les déjections, riches en azote, ce qui favorise donc la pousse des herbes », précise-t-il. Il constate également que dans les Alpes du Sud, ce sont surtout des troupeaux d’ovins viande qui sont présents et un verdissement important a lieu dans cette région. Dans les Alpes du Nord, en revanche, les troupeaux sont plutôt constitués de bovins laitiers et il y a peu de verdissement.
Des zones sont alors laissées à l’abandon car il devient trop difficile de s’en occuper, ce qui favorise notamment l’implantation des mélèzes. Cela est surtout le cas dans les Alpes du Sud, dans lesquelles l’arbre s’est tout particulièrement développé.
Le verdissement a un « effet bénéfique pour les troupeaux car il y a ainsi plus de zones herbagères, mais cela n’est rien comparé aux contraintes liées aux prédateurs », conclut Philippe Choler.

Morgane Poulet